Mosaïque de poésies prosaïques & de proses poétiques

parfois sous forme d'aphorismes, de chansons et surtout de fables…

samedi 9 décembre 2023

LE GRAND BLESSÉ

Petite fable affable

Là où le soleil est un gros maravédis
Et la lune sequin, au bon temps de jadis,
Malgré myriade d’obligations, un comte
Qui comptait alors - Oh, je sais : je me ferai
Pardonner plus tard ! - sans l’ombre de quelque honte
Revenait à tombeau ouvert et à grands frais
D’un de ces lieux où l’on fraie - Excuse ! - « Où d’aimables
Courtisanes ont joué dessus, dessous la table,
 Fort tard, au bilboquet avec sa seigneurie. »

Paraître oisif alors avait ce juste prix !
La vie étant pleine de tours valant, la rosse !,
Cent détours et aucun retour, le beau carrosse 
Qui le voiturait au galop croise trop prés,
Trop vite, la route d’un berger, et la quitte
Précipitamment pour finir au pré après.
Rencontre fâcheuse, certes hélas, mais fortuite.
L’hidalgo qui offrait  potence aux mauvais drôles 
Et ses faveurs aux bons, pas qu’avec la parole,
Se retrouva alité, aux mains de docteurs
Zélés mais ignorants, de leur métier gâteurs.

Alliant la science apprise d’Esculape
Aux restes du génie de Galien, ces gouapes
Firent plus de mal que de bien à un patient
Qui ne l’était guère : le saignées et la diète
Le rendirent très vite plus déficient…
On s’en interroge autant que lui s’en inquiète.
Quoique homme habitué à toujours commander,
Il obéissait pourtant sans rien demander.

Faute de martingale et, pis de panacée
Les médecins qui lui donnèrent bien assez
De leur temps et, mieux, tout leur savoir lui vendirent
Essayèrent de le soulager à défaut
De le guérir, puis pour alléger son martyre,
Faute de le sauver, laissèrent à la faux
Le soin de couper court. Et si du sanctuaire
Au bordel il n’y a parfois - pourquoi le taire ? -
Que quelques petits pas, il n’y en a, ma foi,
Qu’un seul de la vie au trépas. Souventesfois.

Comme en ce cas, combien de royaumes, d’affaires
Durent leur perte aux soins qu’on prit pour leur salut ?
Si en toute chose il faut faire bien, ni plus
Ni moins, quelquefois il vaudrait mieux ne rien faire.

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