Mosaïque de poésies prosaïques & de proses poétiques

parfois sous forme d'aphorismes, de chansons et surtout de fables…

mercredi 25 juillet 2018

LA MARMITE & LA SOUPIÈRE

Petite fable affable
D’après La marmite de terre et la soupière d’argent
 de Charles Porphyre Alexandre Desains
 « Sic vos non vobis » (Virgile)

Mijotant et mitonnant le quotidien
Frichti, une marmite de terre au feu mise,
Se dit : « C’est dimanche, le jour des chemises
Blanches et d’un faste modeste gardien
De la tradition dans cette humble chaumine
Où je cuisine, sans art, le pot et le rôt 
Chaque autre jour que Dieu fait, qui file ou chemine.
Il faut donc que je m’applique avec les poireaux
Les carottes, les patates,… et, pis, la viande.
Ne pas trop bouillir et ne point trop rissoler :
Ma fricassée se doit d’être des plus friandes,
Je dois la fricoter mieux que cassolets ! »

Prenant le plus grand soin à être délectable
Et le temps d’être ragoûtant et savoureux
Afin d’honorer la dominicale table,
La marmite songe déjà aux regards heureux,
Aux lippes gourmandes, de saveurs délicates
Se parfumant, de goûts succulents se parant
Et, pour être inoubliable, joue de l’aromate,
Travaille son moelleux autant que son piquant.
Jamais cocotte, ma foi, ne fut plus habile
À plaire, ne fit tant de labeur ni ne mit 
Tant de cœur à son ouvrage ayant grande bile
À l’échec : il faut tenir ce qui est promis !

À l’heure du repas, savourant déjà le silence
Du dîneur qui vaut le plus beau des compliments,
Voilà qu’on place son œuvre, sa succulence, 
Dans la soupière de faïence dormant
Au dressoir tous les jours de la sainte semaine
Et qu’on la remise, hélas, sans plus de procès,
 À l’évier comme tous ces énergumènes
D’ustensiles ou la vaisselle qu’on va brosser.
Ainsi tout le mérite de la vielle marmite
Passa, pour les hôtes venus ce jour ruper,
À ce beau plat de service désoccupé
À qui on fit honneur… et pas en chattemite.

Même si l’habit ne fait le moine ici-bas,
On vaut toujours moins que sa vêture, Papa !

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