Mosaïque de poésies prosaïques & de proses poétiques

parfois sous forme d'aphorismes, de chansons et surtout de fables…

lundi 27 février 2012

LA MOUCHE AU PARFUM

Petite fable affable

Une mouche, un peu merdeuse,
Comme on sait l’être enfant,
Se rêvait, quoiqu’hideuse,
Un destin et, piaffant,
Arpentait sa couche,
Au fumet de fumier,
Aussi puant et louche
Que l’était le  fermier.

On lui dit qu’on s’élève
Par les fruits du travail.
Elle se fit l’élève
D’un bousier qui, détail,
Sentait, odeur fétide,
Bien plus mauvais
Que le vieux tas sordide
Où, hier, elle vivait.
Depuis quand on raconte
Qu’argent n’a point d’odeur ?
Celle, nauséabonde,
Du bouseux baladeur
Éloigne notre mouche
Du travail manuel
Et des fangeuses douches
Qui le rendent cruel.

La jeune insatisfaite
Ne se sentant pas très
Bien, sur ces entrefaites
- Et fouette, cocher ! -
À tout jamais s’envole
Loin de ces puanteurs
Souillonnes dont raffolent
Bêtes en pesanteur.

En voulant se défaire
De ce sol repoussant,
Elle fit son affaire
Dans un rucher naissant.
On la met guichetière.
Labeur peu astreignant,
Point d’ordure en litière :
Là, rien de répugnant,
Écœurantes fragrances,
Arômes repoussants
Oubliés sans souffrance,
Notre altière en passant
Se veut vite rentière.
Seule mouche à l’essaim,
Elle se fait conseillère
En services malsains.

Mais la reine du lieu
Vieux jeu, chasse, cruelle,
Sans merci ni adieu,
Notre intellectuelle
Qui fait fuir en pampa
L’ouvrière servile.
Ah non, la vie n’est pas
Qu’effluves bien tranquilles !

Infecte comme l’est
Senteur pestilentielle,
La Belle, insecte ailé,
Se croyait essentielle.
L’ambition pour talent,
Après son préjudice,
Elle gagne les relents
D’immondes immondices :
La fille des bourbiers,
Méphisto méphitique,
Se fait, sans autre biais,
Artiste et vit en tique
Chez les grands papillons,
Vedettes par nature.
À elle les millions,
Strass, stress et aventures.

Elle a beau empester,
La gloire a quelque chose
De pourri qu’à tester,
Pas dégoûtée, elle ose.
Bien que tout ce qui brille
N’est pas ordure, allez,
Elle y perd ses billes
Et sa vie en allée.

Bien souvent c’est d’un infâme merdier,
Remugles exhalés, que nous émanent
Vieux comme modernes mégalomanes
Voulant avoir plus qu’être et mendier.
Mais, parfois, les lieux où leurs pas les portent,
L’espoir mu par des rêves bien choisis,
Depuis ce prime antre autrement moisi,
Sont plus corrompus que ceux d’où ils sortent.

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