Mosaïque de poésies prosaïques & de proses poétiques

parfois sous forme d'aphorismes, de chansons et surtout de fables…

jeudi 1 mars 2012

LE COQ DÉFIANT LES LIONS

Petite fable affable
Un coq versé dans les sciences,
Membre de l’Académie de la Gadoue,
Passait pour la vraie conscience
De la Basse-Cour, hautain comme un nandou.
À la face de ce monde,
Il accusa les lions d’usurpation
Avec conviction et faconde :
Il affirma, cris et vitupérations,
Que les grandes théories scientifiques
Offrant aux fauves respect,
Monnaie et considération spécifique,
Étaient en fait le succès
Oublié d’un de ses plus nobles ancêtres.
Une lettre l’attestait.
Chez les lions, les délires de ce Maître,
Firent rire ou protester.
Il prit à partie tout le monde, oeufs et ailes,
Il ranima la rancœur
De la poulaille pour l’ardeur criminelle
De ces prédateurs sans cœur.

Cabale et intrigues, la polémique enfle
À la Une du journal.
Crêtes qui rougissent, crinières qui renflent,
Le moindre mot fait signal :
On sort dents, becs, ergots, griffes ;
On se dresse ou on rugit ;
On bat de l’aile, on se traite d’escogriffe
Ou d’escroc,… Ça réagit !
« Cette missive, Messieurs, est une preuve ! »
Le coq, tout en vanité,
Dresse la Cour avec lui, dans son épreuve,
Face à l’immoralité
Des lions, terreurs de toutes les volières.
On était dans un guêpier.
Ô Temps ! Ô mœurs ! On risquait donc la guerre
Pour un vieux bout de papier !

Un vieux sage, au pays des lions, suspecte
Que cette lettre est un faux,
Par son aspect comme par son dialecte.
Il prit le coq en défaut,
Non de vain mensonge, mais de vraie bêtise :
Dupé par un vieux faisan,
Chateclerc avait acquis, sans expertise,
Des manuscrits fort plaisants
Attribuant à quelque auguste volaille
La culture et le savoir
Du monde depuis que carpe a des écailles ;
L’érudit put les avoir
Contre force florins faisant sa fortune.
Entre rire et pâmoison,
On dauba le coq qui, suprême infortune,
Perdit honneur et raison,
Plus les doublons et ducats de son pactole.
Le docte gallinacé,
Futile fût-il, abandonna l’étole
Et sa chaire aussi, lassé…

Combien de pédants, de cuistres,
Qui se disent et se croient intelligents,
Séduits par le premier cistre
Propageant des vérités, jouant les régents
Du peuple et de leurs ministres,
Sont plus naïfs que gens d’esprit indigent !

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire