Mosaïque de poésies prosaïques & de proses poétiques

parfois sous forme d'aphorismes, de chansons et surtout de fables…

mardi 3 avril 2012

DE L'AUTRE CÔTÉ

Ce soir de mai, de l'autre côté de la vitre,
Dans ce restaurant au luxe climatisé,
L'ambre des bijoux aux reflets irisés
Se noie dans les vins fins, s'engloutit dans les huîtres.
Les smokings, les robes ou le porteur de mitre
Ne jettent pas l'ombre d'un regard à l'enfant
Qui les envie de les voir, ainsi triomphants,
Ce soir de mai, de l'autre côté de la vitre.

Ce gosse vient de l'autre côté de la ville,
De l'étrange pays, banal et balisé,
Sis au-delà des voies rapides où, brisés,
S'entassent tant et tant de gamins serviles,
Pris, vendus, loués ou donnés, telles des proies,
Pour de gros bras de brique qui brisent et broient ;
Dans lesquels leurs trop frêles corps plie ou ploie.
Oui, à qui vit de ce côté-ci de la ville,
Misère et Crasse donnent un regard de faon
Traqué, en fils meurtri, affamé, étouffant,
Dans les taudis surpeuplés du vieux bidonville.

Ce soir de mai, de l'autre côté de la vitre,
On ne voit pas que, sous néons tamisés,
Les mômes se collent au verre, hypnotisés ;
L'alcool coule en litres ; on  distille et on filtre.
Pendant que pintades, grues, cuistres et bélîtres
Jasent et boivent en bâfrant et en bouffant,
Les gosses aux yeux qui mendient vont s'échauffant,
Ce soir de mai, de l'autre côté de la vitre…

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire