Mosaïque de poésies prosaïques & de proses poétiques

parfois sous forme d'aphorismes, de chansons et surtout de fables…

jeudi 19 avril 2012

L'AMANTE RELIGIEUSE


« Moi, je me suis faite sœur pour me prémunir,
Plus que par conviction ou manque de repère,
Et ne suis pas mariée au Christ ni à son père
Mais suis veuve d’amours qui font mes souvenirs,
Bien plus gais que les joies den ce couvent pépère,
Même si plus qu’hier, importe l’avenir :


Mari marri, mon père était octogénaire.
Mon premier homme était un beau faiseur de vers
Il parlait bien d’amour sans jamais me le faire.
Comme il roulait toujours vite, “à tombeau ouvert”,
J’ai du le refermer, un soir de lune claire.
Les freins avaient lâché, je n’en eus rien à faire.


Je dus me consoler avec mon cher notaire.
Parce qu’il n’appuyait pas sur le champignon
Autant qu’il me plaisait, il goûta, débonnaire,
Comment j’accommodais ces plantes et, quel guignon,
En fut incommodé. Ma vie fut à refaire,
J’eus de nouveaux amis, quelques partis vulgaires.


Riche veuve éplorée, le curé bien en chaire,
N’a pas pu résister au troisième accord
De nos corps enlacés, au pied du vieux calvaire.
Malgré mes prières, mes vœux et mes encor’,
Il mourut en extase et, pis, tout en suaire,
Dans mes bras, en pleine période du Rosaire.


Seule à nouveau, vint à passer un militaire
Qui me fit mon quatre heures et les autres repas.
Mais ce gueux adorait me faire taire ou braire,
Et puis surtout m’aimer, et je ne voulais pas,
Comme les moinillons s’unissent pour forfaire,
Alors que cela est, à leur règle, contraire.


Je le quittai matin pour un banquier d’affaires,
Et jouai au docteur avec son médecin.
Je partis donc pour un jeunot, un libertaire,
Que, lassée, je laissai à ses petits desseins
Pour un lapidaire puis pour un fonctionnaire
Moins à cheval sur moi que sur ces p… d’horaires !


Je finis mon parcours par un pousseur d’araire,
Un gros paysan rustre aimant à labourer.
J’en fus des plus comblées mais cet Éros agraire
Voulait, en mon sillon, semer pour savourer
Quelques moissons d’enfants. Idée des plus vulgaires.
 Se croyant stérile, il se suicida. Primaire !


Désormais respectée, je ne fais que bénir
Pucelles dont le teint, les traits me désespèrent.
Oui, je suis une nonne à langue de vipère
Mais que faire d’autre ; Dieu, l’âge est à honnir
Mais pour les novices, revit mon temps prospère ;
L’Abbesse, ici, c’est ma mère. Quant à punir… »

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