Mosaïque de poésies prosaïques & de proses poétiques

parfois sous forme d'aphorismes, de chansons et surtout de fables…

mercredi 13 avril 2011

GASPARD

J’écoute le vent vénéneux
Qui va, qui vient. Son cri haineux
 Balaie, sans violence,
L’avenue rendue au silence
Où personne ne vient,
Où plus rien, jamais, ne survient :
C’est une souricière
Où ne pousse que la poussière…

Seul et déconcerté,
J’habite un quartier déserté,
Encombré  de carcasses
Qui sommeillent à la même place,
Attendant sagement,
Durablement, obstinément,
Alignées face au feu rouge
Qui clignote. Mais rien ne bouge…

Juché sur une jonchée
De débris sans vie, ébréchés,
Abandonnés, qu’aucune mouche
Depuis longtemps ne touche,
Je guette, encore, et me souviens
De ce temps où les miens
Pouvaient trouver en abondance
Bonne chère et faire bombance…

Il y a bien longtemps,
Qu’ici, on ne trouve plus tant
De quoi remplir son ventre
Et, cela, même dans le centre.
Tout a été croqué, mangé,
Rogné ou, jusqu’aux os, rongé.
Les poubelles sont vides
Même pour un crevard avide…

Ma ville meurt de faim
Et ma race touche à sa fin.
J’ai le poil qui grisonne ;
Les moustaches aussi. Ça étonne
Car dans ce quartiers, vieux
Et petits, pour l’estomac envieux
Contraint à ce carême,
Deviennent des proies. Sans problème…

On pourrait tous partir
Ou s’unir, sans s’assujettir,
Mais notre espèce est vile.
Je me souviens qu’il fut, en ville,
Un temps où, trublions,
Nous croissions, multipliions.
Aujourd’hui, on se compte
Et, désespérés, on s’affronte…

Les vitres éventrées
D’un bâtiment, où peut rentrer
L’eau du ciel, si acide,
Qui tant nous brûle et tout oxyde,
Reflètent les rayons 
D’un soleil pire que scorpion :
Je fuis quand il se lève
De peur, qu’un jour, il ne m’achève…

Je vis dans les égouts
Par nécessité. Pas par goût.
La faim m’y accompagne
Et la peur y est ma compagne.
Ce cloaque est à moi,
Protège mes joies, mes émois,
C’est mon home sweet home,
Com’ quand vivaient les hommes…

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