Mosaïque de poésies prosaïques & de proses poétiques

parfois sous forme d'aphorismes, de chansons et surtout de fables…

dimanche 17 avril 2011

LE MINISTRE

Sur « Le Gorille » de et par G. Brassens (1921-1981)

Au-delà de grilles sinistres,
Tous les potaches du canton
Conspuaient un puissant ministre,
Manifestant en pelotons.
Avec impudenc’ ces élèves
Parlaient mêm’ d’un endroit précis
Qu’il voulaient lui botter sans trêve
Pour qu’Il comprenne leurs soucis.
Marr’ du ministre…

Avec leurs slogans pour badine,
Tous ces mômes encolérés,
Qu’on avait pris pour des sardines,
Ne pouvaient plus le tolérer.
Ils voulaient, quémande ordurière,
Être en classe bien moins nombreux,
Pour pouvoir poser leur derrière,
Et tant pis si c’est onéreux !
Marr’ du Ministre…

Comme pour les classes en surcharge,
Ces lycéens aussi boudaient
Des emplois du temps qui dégorgent
Et des programmes boudinés.
Ils réclamaient - quelle insolence ! - 
Des remplaçants aux profs absents
Pour parfaire leurs connaissances
Car réussir ne vient pas sans !
Marr’ du Ministre…

Mais c’est un sanguin, ce Ministre :
Il écorche à vif tous les profs
Pour toute explication, le cuistre :
Démagogie réjouit les beaufs !
Là, dans la rue y’a que des mômes,
Pas d’électeur, même à demi,
Il n’a pas de raison, en somme,
De bouger son académie.
Marr’ du Ministre…

Lui qui faisait régner la crainte
Et ne lâchait jamais un rond,
Se sentait Goliath hors d’atteinte
Face à des David Gai-Lurons.
« Et ces gosses qu’on manipule,
Dit-il en fin politicien,
Entendent gérer mon pécule :
Je ne suis pas un magicien ! »
Marr’ du Ministre…

Il subit ce cruel martyre,
Lui qui les consulta exprès,
Car la réforme qu’il en tire
Réglera tout… ou à peu près !
De peur que ça ne tourne à l’aigre,
Le Ministre sourd à leurs cris
Dit aux enfants - mais c’est bien maigre -
Qu’il les aime et les a compris.
Marr’ du Ministre…

Il attend, joue l’Inamovible,
Les vacances venant bientôt
Calmeront ces incorrigibles,
Si ça ne craque pas plus tôt.
« Après tout ces ados prétendent
Tous, qu’ils veulent bien travailler,
Et faudrait pas trop qu’ils attendent :
On n’a pas le bac à bâiller ! »
Marr’ du Ministre…

Car, si par malheur, le Ministre
Au jeu du plus con vaut son prix,
On sait que son brillant registre,
Ignore le verbe et l’esprit.
Aussi finit-il par promettre
Bien des mots pour panser leurs maux.
Mais c’était là bien mal connaître
Ceux qu’Il prenait pour des marmots !
Marr’ du Ministre…

La suite est vraiment détestable :
Chacun à son entêtement,
C’est l’Ministre, poing sur la table,
 Qui mit fin aux “événements”.
Mais gare aux fureurs éconduites
De ces gamins bien décidés,
Qu’avaient pas la révolt’ fortuite
Ni de la fuit’ dans les idées !
Marr’ du Ministre…

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