Mosaïque de poésies prosaïques & de proses poétiques

parfois sous forme d'aphorismes, de chansons et surtout de fables…

mardi 3 mai 2011

NEUF

Cycle toulousain

Malgré ce qu’on dit en ma patrie,
Les deux pieds bien plantés dans le fleuve,
 Je suis le plus vieux de ma fratrie.

Même si j’ai, souvent, fait peau neuve,
Témoin impassible des assauts
Des eaux dont je porte tant de preuves,
Je guette leurs remous, leurs sursauts,
Veille sur leur lent et long voyage,
Aux imprévisibles soubresauts.

Oui, ici je règne sans partage
Entre quais fatigués, encombrés,
Et rive basse. Depuis tant d’âge.

Je suis plus massif, moins adombré,
Que mon petit frère de Saint-Pierre,
Fragile, toujours prêt à sombrer.
J’ai l’allure moins folle et moins fière
Que mon cadet des Catalans,
Large d’épaules. Beauté altière.

Je suis sain, solide et vigilant,
Loin de ces vibrantes Demoiselles,
Dont le pont, sur Canal, va volant.

Quand le soleil d’août dore et cisèle,
Ma pierre, je suis le plus couru
Et, mieux, quand il rougit, avec zèle,
Ma brique, on vient par toutes les rues
De la ville haute et on admire
Ma grâce sur le fleuve décru.

Que Saint-Michel seulement se mire,
Arches béton, tablier d’acier,
Il verra qu’il ne vaut or ni myrrhe !

Je ne suis pas de ces ponts grossiers
Qui ne sont qu’utilité notoire.
À la fois noble et populacier,
Je suis beauté et je suis histoire :
Depuis la Daurade et les Beaux-Arts
Jusqu’à la Grave est mon territoire.

D’hommes en dômes, je suis musard,
Entre Hier, si riche en épreuves,
Et aujourd’hui aux contours vasards…

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