Mosaïque de poésies prosaïques & de proses poétiques

parfois sous forme d'aphorismes, de chansons et surtout de fables…

lundi 29 juin 2020

HAÏKU DEMAIN

Je croise les doigts pour ceux qui ne le font pas de leurs bras…

UN CENSEUR POUR LES CHATS FAUX

Petite fable affable

Raminagrobis et Rodilardus,
Chagrins et chafouins, un grenier se partagent.
Ces deux gras et gros olibrius
Prêtaient la patte depuis leur plus jeune âge
À d’inavouables mais aussi, las,
Forts hasardeuses actions et entreprises.
Fripons autant que larrons, ces deux as
Étaient redoutables en matière de prises
De rongeurs mais aussi de rapines au logis.

Ce même s’ils n’en avaient pas la raie moins droite 
Ni le cul plus fendu - C’est gabegie ! -
Aux yeux du maître de la maison qu’ils squattent.
Ainsi nos loulous, bien qu’utile fût
Leur présence, furent traqués comme malebêtes
Et sitôt chassés après maint affûts.
La maisonnée est la proie, sans plus de courbettes
Des intrigantes souris et des rats
Malfaisants qui se moquaient fort, sans fard ni feinte
De leurs tourmenteurs devenus, ces fats,
Grutiers, croquants,… et dont on oit la plainte
Lointaine quand la nuit est venue.

Sous les dents des proies devenues chasseresses
La maison vite fut ruinée. Nue,
Elle fut croquée à son tour malgré la détresse
De son propriétaire à qui on dit 
Qu’il n’est, comme il croit, en rien maudit :
« Ici-bas, on ne pardonne jamais deux choses :
La réussite et, plus, qui en jouit
Et l’échec, qui lui fort réjouit,
C’est bien là de ton si grand malheur la cause ! »

samedi 27 juin 2020

HAÏKU PAIX !

Qui respire mal ne souffle mot.

ASIATES AMOURS

Petite fable affable

Les pandas roux, dit-on, aiment les enthymèmes
Pour vous causer de tout, y compris en famille.
Ainsi  on dit « Quand on ne marie pas les filles, 
Les filles hélas se marient par elles-mêmes. »
Et s’inquiètent-ils quand leurs petits bouchons,
Devenues roses tendrons, ont bien moins l’âge
D’être battues que cocues par jeune ronchon
Qui les demandera, matin, en mariage.

Un vieux mandarin, parmi ces bêtes-là,
Voulut un jour caser son aînée, gourgandine
Certes un peu espiègle jouant les gredines, 
Qui avait plus de prétendants, et jamais las,
Qu’une vie d’homme ne compte de nuits noires.
« Pourquoi voulez-vous, disait-elle, me priver
De ces dévots à mon bon plaisir accessoires
Pour un malotru natté voulant mon clou river ? »

Lors, elle ne se hâtait point cette jeunesse
De trouver à sa patte si petite un chausson.
Que parents pressés ou voisines ayant garçons,
Entremetteuses moustachues sans vraie finesse
Et autres marieuses trop tôt vieillies,…
Aillent se faire voir. Elle ne veut, la Belle
Aucun de tous leurs beaux - ou tous leurs bons - partis,
Nul ne trouvant grâce à ses yeux de rebelle.
« Bonzesse tu vas finir ! » l’a-t-on avertie.

Elle s’obstina à refuser la coutume
Disant : « Quand la fille ne veut pas dire amen,
Cette fille se doit de fuir tout hymen !
Liberté, pour elle non plus, n’est apostume ! »

jeudi 25 juin 2020

HAÏKU BLANC

Un hétéro’ peut-il prendre quelqu’un au mot ?

LES OISEAUX JASEURS

Petite fable affable

Les oiseaux sont, en tout, de bons philosophes.
De ce point, ici, pour l’heure, il ne s’agit.
Mais ils me rappellent, comme on apostrophe,
Que les mieux placés pour discuter, magie !,
Ne sont pas nécessairement les bonnes langues
Embourbant, par trop souvent, leur harangue en cangue.
L’exemple qui suit fait foi car chez les oiseaux
Qu’on croit débiles du bulbe, bec vaut ciseaux.

Une grive, une fauvette et un rossignol
Oiseaux chanteurs s’il en est, et dont le ramage
Surpasse le plumage, autour d’un campagnol
Grognon et chiffon, lui que l’on dit si sage,
Font une ronde qui, ma foi, lui déplaît fort.
Modèles de constance en ironie en leur for,
Ils l’ont mis colère et d’humeur fort chafouine,
Non avec fariboles qui font s’esbaudir,
Mais parce qu’ils n’ont, hélas, que mots qui couinent
Sur son compte. Il y a de quoi s’en prou raidir.

Ils n’ont pas langue en poche ces agitateurs d’ailes
Et ayant, par contre, des idées fort bien 
Arrêtées, pas à bon endroit et force zèle,
Ils défendent leur bel art, comptant pour rien
 Les trilles de ce brave souriceau qui aime
À vivre ici-bas au comptant le cœur content.
Eux, oiseux, ils consument leur vie insipide
En disputes, procès,… avec un monde stupide.

Douché par les critiques de ces trois bohèmes,
Désabusé autant que désappointé, un temps,
Il répond en termes choisis qu’aucun poème
Leur ne méritera jamais deux de ses vers.
Voilà que la contrariété de bord change.
Le désillusionné mit ainsi fin à l’échange.

La hulotte, qu’ils n’effraient, leur glisse ses Lettres :
« On s’offusque ? Qui va à l’autre avec au bec
Couronne d’épines ne doit s’étonner d’être
Reçu avec autre chose que roses ou rebec ! »

mardi 23 juin 2020

T’AS HAÏKU’M PRIX

D’aucuns croient qu’ils ont le temps alors que c’est le Temps qui les aura…

LEVER LE PIED

Petite fable affable d’après
La queue du lézard de Geno Namy

N’ayant le temps de rien en ce bas monde,
Même pas celui de procrastiner,
Un lézard vert suit, sur son mur, la ronde
Du temps plus vite qu’une aiguille obstinée.
Il court de l’heure du laitier, sans sieste,
À celle, pourtant tardive, du berger.
Vif, ce fol n’est jamais à court ni en reste :
Dans l’air sec, sur sol chaud, il passe léger
Et tout aussitôt repasse comme une ombre,
S’affairant fort ici ou se pressant là,
Leste et preste comme chat en sa pénombre.
Rien ne le fatigue ou ne le rend las.

Le gros chien, pacha de la bonne ferme
Où il va et où il vient à son train,
Qui doit si peu aux sénateurs, en bons termes
Avec toute bête, rageux et plein d’entrain
Le poursuit et l’agace, voire le stresse,
L’obligeont à un rythme plus effréné
Encore, à plus de mille tours d’adresse
Car pour lui échapper, ‘faut pas traîner !

Point de sérénité donc pour notre reptile
Qui aspire à plus de calme par instants.
Mais il faut être aux aguets de fort subtile
Façon pour pouvoir se dérober à temps.
Oc, point de tranquillité avec cette hydre.
Se poser un brin voire se reposer
Relève d’un exploit qu’on fêterait au cidre.
(Chez les bêtes, c’est jà beuverie osée !)

Un jour, hélas le cabot mit bas la patte
Sur notre bon coureur de murs échaudés.
Mais il n’en obtint que la queue, la benoîte
Bête, en riant, fit lors : « Va donc farauder
L’Ami, avec ce beau trophée dérisoire,
Ce symbole que je sais, moi, prise lâcher
En sacrifiant la montre et l’illusoire
Pour garder vie sauve et ne la plus gâcher ! »

dimanche 21 juin 2020

HAÏKU DE JE DE MEAUX

Il s’est levé tôt le véto’ pour soigner les cuillères de l’écuyère !

DONNER LE TON AU TEMPS

Petite fable affable d’après une idée de Marielle

Chez le bon luthier du conservatoire
Une note la joue rebelle : le « si ».
Il peste et râle qu’il est attentatoire
À son honneur que le « la » soit seul ici
À donner, toujours, le ton à tout autre,
À commencer par lui. C’est anormal.
Profitant de l’huis entrouvert cet apôtre
S’envole au vent, libre comme air, l’animal.

Las pour ce « si », une hirondelle le gobe,
En passant trop près du sol, car son bon bec
Est pire que rets d’Homme. On ne s’y dérobe.
Notre fat est coincé, ces salamalecs
Pour que le libère enfin son bel hôte 
N’y font mie… Au contraire, ce bon son plaît
À l’oiselle qui en plane, tête haute,
Sur le ventre et sur le dos, à souhait.

Mieux son bon plaisir, elle le partage, 
Non sans un vrai zèle, avec tous les siens,
Au gré de ses envols et de tous ses voyages
Tant et si bien que « si » musicien
Devint scie des demoiselles hirondelles
Marquant l’ouverture, sur tout horizon,
 Du printemps et, loin des modes et modèles,
Finale de l’automne, non son oraison.

Sois toute ouïe ou regard et si tu n’es mire
Tu verras qu’il est toujours lieu ou moment
Où ton talent sera su et qu’on admire
Qui ne veut pas être admirable instamment !

vendredi 19 juin 2020

HAÏKU PEAU CARRÉE

Avec la mode actuelle des crânes rasés on se retrouve vite à quatre pelés et un tondu !

LE POIDS DU SAVOIR, LE CHOC DU POUVOIR

Petite fable affable

Dans quelque séjour, frayait une buse
Qu’en ses montagnes on disait triple, hélas,
À cause de son volume. En excuse,
Elle, elle présentait, toujours très très class,
Comme un encombrant excédent de plumes.
C’est qu’elles lui pesaient comme du plomb
Lui faisant un caractère d’enclume
Face à qui en doutait avec aplomb.

Ayant vu les abus de « l’Esprit » chez l’Homme
Elle s’efforça de devenir ballot,
Et comme elle venait, n’étant pas un gnome,
À bout de tout, avec ses commensaux
Qu’elle invitait à la suivre en affaire,
Elle y réussit fort convenablement…
Mais elle avait peu de chemin à faire
Et ses hôtes, rapaces, mêmement.

Cette buse était reine. C’est le problème.
Elle sentit vite chez ses bons sujets,
Même les souriceaux tremblants, tout blèmes,
Qui à sa vue recommandaient, gagés,
 Déjà leur âme à Dieu, quelque rebelle
Esprit de parti. Prise par la peur
Que cette meute d’oisons et corbelles
N’courre à l’émeute elle fuit sa torpeur.

Il y a souvent illusion, mode
Et caprins caprices dans les pensers
De la plèbe. Ils naissent, depuis Commode
Et Sévère, de recueils mal pensés,
Lus à la dérobée ou qui circulent
Sous le manteau. Et, par leur faute, on vit
Dans un monde où on n’a rien vu d’Hercule
Mais dont on sait tout, et où à l’envi,
On ne comprend rien mais tout déforme.
La rustre ingratitude ainsi se forme !

Comme il n’est, dit-on en vaux, de bon blé
Né de mauvaise graine, Dame Buse
Fit incinérer les livres, puis a doublé
L’autodafé de bûchers, son infuse
Science lui soufflant, las, de brûler 
Qui les avait écrits et, pour conclure,
Celles et ceux qui les avaient lus. Buller
En pareil péril l’aurait fait enflure !

Car la lumière des feux jaillit
En tout lieu dans ses bonnes montagnes,
Signalait son royaume ; elle faillit
Se faire proclamer, par les campagnes
 Et les villages, « Monarque Éclairé ».
Mais un hibou se présenta au trône :
On a omis de le mettre aux arrêts !
Puis il ajoute ces mots valant prône :

« De sa propre lueur, luit la Vérité
Jamais flammes n’ont éteint son acuité ! » 

jeudi 18 juin 2020

mercredi 17 juin 2020

HAÏKU CÔTIER

À trop secouer le cocotier on finit par s’assommer !

LES DEUX PÉLICANS

Petite fable affable d’après Les deux Persans
de  J.B. Claris de Florian (Fables,  II, 18)

Il n’est las plus mauvaise compagnie 
Qu’un pélican, tant l’oiseau envahit
Votre vie pour y vider ses querelles
Et, pis, son sac de mère maquerelle.
Alors imaginez deux de ces coureurs
D’océans orangés de bec et pattes :
Cela ne peut produire que quelque horreur
À qui veut la tranquillité non la hâte.

Donc deux pélicans, le goitre pendant,
Se disputaient à en perdre les dents
Sur le Dieu qui devrait faire « Norme » :
Sans se désigner chacun, c’est énorme,
 Se nomme comme le seul parangon ;
Les traits claquent, les insultes cloquettent
Comme en cour où oisons se font dragons.

Le premier cherchant auprès de l’autre
Qu’il juge, sans fard, fort mauvais apôtre
Plus, sur ma foi, un unanime avis
Propose alors, pour l’honorer sa vie 
Durant, de tourner son oeil vers cet astre
Du jour qui est, sûr, le seul vrai dieu.
Un mois plus tard, arrive le désastre :
Aveugle, il se noie en quelque lieu.

Le second, crédule à toute chimère
Reniant, pour ce, s’il faut père et mère,
Ignorant vivant aux dépens des sots,
Tire leçon du sort du bécasseau
Qui le contredisait et, sous la terre
S’enferma pour se protéger de Râ,
Divinité à craindre pour ses rais-serres 
Autant qu’à vénérer sur l’agora.

Il en perdit la vue et, à la pêche
Ne pouvant aller, la vie. C’est rêche !
Il en va ainsi quand on n’a pas compris
Qu’en tout et pour tout, il est un bon prix :
Le meilleur des partis, comme nous disent
Isopets, est un juste milieu ;
Mais quand on est bêtise et balourdise
C’est le plus dur à trouver, Mon Dieu !

lundi 15 juin 2020

HAÏKU’RATIF

J’en ai cure d’Alzheimer et tout le tremblement !

Y’A PAS D’LÉZARD !

Petite fable affable

Dans un pays par trop écrasé de chaleur, 
Harassé de moiteur et suant la lumière 
Parmi les ombres égarées sur les pâleurs
Brûlantes des hauts murs poudrés de poussière,
Courait un gros lézard qui se disait croyant
Et qu’on moquait à ce propos dans son espèce.
Il croisa un de ces gausseurs qui, le voyant,
Commença la scie de ses railleries épaisses.

L’autre lui répond avec amabilité :
« Tu fais fi de ma foi qui me f’rait fou, vipère,
Et me pousserait au faux. C’est crédulité.
Avant que tu n’quittes ton fût, mon petit père,
Pour faire du foin sur mes superstitions,
Avec feu, n’as-tu pas, auparavant, la moue distraite
Sur ton horoscope et ses vaines mentions 
Jeté un œil ?… N’as-tu pas en venant d’une traite
À moi, contourné l'échelle qui se trouve là ?
Évité le chat noir ? Discuté des terribles
Fins du Monde prévues par mages et Mayas ?
Et pour, sur ton chemin, ne pas être la cible
D’un vorace, croisé les doigts, jeté du sel
 Pour que le danger ne soit que des parasels ?

Vois-tu, mon ami, qui ne croit en rien,
Croit à tout… aérien ou tellurien ! »

samedi 13 juin 2020

HAÏKU DENTU

J’ai la dent dure quand je l’ai mauvaise !

NE SOYONS PAS CHIENS

Petite fable affable

Un berger qu’on gouverne comme une baderne,
Pour faire quelques économies (car ce temps 
Était habité par un esprit neuf, moderne,
Appelé « compétitivité » par instant,
Parfois, à d’autres moments, « productivité »,
Quand on ne le nommait pas « rentabilité »)
Remplaça en son pré le mâtin, gardien
Des bêtes. Mangeant comme trois ses assiettes
- D’y grignoter ne serait-ce qu’une miette
Souris aurait été embarrassée, tiens ! -
Surtout, il savait comme pas deux son affaire
Et s’en occupait comme lui seul savait faire.

Donc, on mit à sa place trois petits chiots,
Adorables comme chatons mais, ‘faut l’admettre,
Cons comme pas deux et mangeant moins qu’un, grouillots
Qui fuyaient le combat refusant de s’entremettre,
Que troupeau refusait de suivre ou de guider,
Malgré abois nombreux faisant rire équidés.
À cause de ces incompétents, notre pâtre
Perdit son cheptel au gré des chemins, ravins
Et autres loups qui lui causèrent plus chagrins
Qu’à ses jeunes chiens, eux toujours plus folâtres :
À vouloir rogner sur la dépense à tout prix,
Souvent, on s’apprête à des débours hors de prix !

vendredi 12 juin 2020

jeudi 11 juin 2020

HOT HAÏKU TURE

Certains ont la langue si bien pendue qu’ils pourraient en profiter pour la mettre dans leur poche !

VERS SOTS POUR UN BÉLIER ?

Petite fable affable

Loin de l’été qui attise la peau
Et fait braise de tous les oripeaux,
Une brebis rêvait fort à son prince
Dans un concert de clarines, en sa province
De songes, du clair matin de sonnailles
À la brune qui rend l’agneau canaille,
Elle composait, pour son bélier
D’amant, des vers, calame délié.

Lui, pressé comme un lavement, moins drôle
Que risible était toujours dans son rôle :
Robuste ribaud, il couvrait ses brebis
Comme un libertin sans besoin d’un bis.
Ce débauché estimait que, sans zèle,
C’était seul dû que dame ou demoiselle
Pouvait attendre ici d’un mâle, un vrai.

Vouée à la fille du vent, la plume 
De la donzelle, toujours sans écume,
Nomadisait sur ce macho ballot,
Sot comme un bulot, fat comme un mulot.
Mais elle prolixe et lui prolifique,
Étaient destinés au plus magnifique
Des amours, ça, elle, elle le sentait :
En ses cœur et âme il habitait.

Lui aussi en pinçait mais l’ignare,
Craignant d’en dire trop, comme font gnares,
N’en disait jamais assez : toujours dispo’,
Il était l’étalon de ce troupeau ;
Cela ne pousse pas à conter fleurette 
Ni aux tendres aveux dessus l’herbette.
Comme une autre, il la toisait au vert pré,
La snobait à l’étable à la vesprée.

Lors, cherchant plus un aval qu’un avis,
Il se confia au dogue, ravi
D’expliquer la vie à ce fils d’ouaille
Qui le prend d’ordinaire pour valetaille.
Toutou dit : « À trop cacher ses sentiments,
Comme l’écureuil faisant sa provende,
On finit par perdre, avant les lavandes
 Revenues, ce qui fit notre tourment. »

mardi 9 juin 2020

HAÏKU PY

Quand Carpe Diem, brochet dit haine ?

AU FIL DU GRAND FLEUVE

Petite fable affable

Sans doute lassé de ne manquer de rien,
Un atèle quitta sa canopée altière
Pour voir si sous cette futaie c’était bien
Malgré les cruels hôtes des termitières,
Et tous ceux des terriers, pis que des chiens
Ou les fauves, ou les serpents, non moins avides.
Et ne parlons pas de ces fourmis impavides !

Il plonge parmi la multitude des branches,
Agile comme en songe, il arrive à l’aplomb
Du grand fleuve et y choit sans que ce soit la franche
Rigolade, tombant comme barre de plomb.
Notre singe, hélas, nage comme une vraie planche.
Il se voit donc couler. Il appelle au secours 
À grands cris qui résonnent au jardin, à la cour.

« Attrape liane à ta portée ou ramille,
Plutôt que de hurler et de gesticuler ! »
Fait un ara que dérange ce Sans-Famille.
Mais notre pauvret perd pied, plus acculé
Que jamais : « Qu’attends-tu pour nager comme anguille
Au lieu de crier ! » lui lance Anaconda,
Familier des abords, gras comme un vrai Bouddha.

On l’abreuve de conseils, alors qu’il boit la tasse
Et finit par se noyer, happé des piranhas,
Dans l’indifférence d’une jungle brutasse
Où nul ne lui a tendu perche ou main. hélas.
Combien est-il de conseilleurs en ce bas monde
Qui ne font geste pour le rendre moins immonde ?

dimanche 7 juin 2020

HAÏKU À CORPS DES FENDANTS

Ce qui fend le cœur prend aux tripes celui qui n’a guère d’estomac !

AUX ESCLAVES VOLONTAIRES

Petite fable affable

Chacun croyant avoir trouvé la martingale
Deux fort jeunes chats régnaient à part égale
Sur le logis d’une dame qui les aimait
Mêmement et ce, malgré leurs caractères
Opposés comme chez deux frères jamais
On n’en vit : les antipodes sur la Terre !

Le premier était doux et caressant,

Prou ronronnant quoiqu’il fût des plus pressants,
Quand venaient, jour ou nuit, ces bonnes heures
Où il mangeait, sortait, rentrait,… pas de leurre,
Comme ses pairs, il était un dictateur.
Mais la rondeur de ses façons, à ce bretteur,
Offrait un total vrai pardon par avance
Sans qu’il eut à faire quelque repentance.
Il avait compris qu’il était plus important
D’être agréable qu’utile en nos bons temps*.

Le second, chasseur, coureur de grenier,

Était d’un abord plus rude. Le nier
Revenait à s’avouer sourd et aveugle :
Il miaulait, impératif, comme meugle
Vache en quête de frais ombrages en prés.
Fuyant la main mais non la gamelle, goulu
Comme Gargamelle quoique fort mafflu ,
Il réclamait d’être au premier service,
Griffe sortie et gosier en abysse.

La dame vieillissant dut se séparer,

À regret, de l’un des poilus qui sa table
Partageaient. Le second dut partir errer
Car gouvernement le plus insupportable
Ce n'est pas la tyrannie, je vous l’avoue,
Mais la façon dont elle s’impose à vous.

* Sans doute était-il un disciple de J.-P. Claris de Florian (1755-1794)

vendredi 5 juin 2020

HAÏKU DANS LE NASE

Même si j’ai du nez il m’arrive de ne pas me sentir bien.

LA DÉBÂCLE DU COQUET

Petite fable affable

Non loin des lourds rochers de Pyrène,
Ayant, hélas, vu son père choir, 
Coquelet se méfiait des reines
Qui vous font perdre, parfois, les rênes
Du pouvoir voire pire : déchoir !

Notre bon coquardeau répondait,
Quand le voulait bien cette bête,
Au nom de « Coquet, le grand dadais » :
On devait à ce puceau cadet
L’exploit d’être plus sot que bette :
Ce bougre, il fallait se le fader !

Dès que Phoebus ardait sur les plaies
De nos plaines par la sécheresse
Imposée, il fanait d’un air laid
Les pavots du sommeil et allait
Dépeupler de peur, tout allégresse, 
Le poulailler qu’il voulait valet.

Une pécore, dotée de forte
Personnalité, et de poitraille
Ne l’étant guère moins, à sa porte
Vient réclamer qu’enfin il porte
Attentions, plutôt qu’il ne braille,
 Sur ses sœurs… qu'en mâle il se comporte.

Il reçoit ce camouflet-là 
En grimaçant surtout que la poule,
En être ayant le goût délicat 
Du charretier en nid-de-poule,
Le hélait comme harengère en foule.
Le cochet s’en ouvrit au choucas,
Son seul ami parmi ces maboules.

Certes ce ne se serait demain
Qu’on verrait de folles cousinades 
En son enclos, n’ayant fait gamins
À quelconque oiselle en son chemin
Fût-elle vraie nonnette ou ménade
Mais c’était atteinte hors du commun.

Attristé, chagriné, désolé…
Dévasté pour vraiment bien dire
Le coq eut-là bois vert en volée
Qui son honneur a immolé,
Son autorité brisé,… Pire,
L’a laissé défait, inconsolé…

Sans fatiguer sa rage au sommet,
Le corbac’ affirma dans un rire :
« Tout déboire a le même fumet.
Dans la vie, moi, je ne perds jamais,
Soit je gagne,… soit j’apprends*. Au pire,
Ris-en, voire fais-t’en un plumet. » 

* D’après un aphorisme de Nelson Mendela (1918-2013)

mercredi 3 juin 2020

HAÏKU MAIS DIEN

Dans le cadre du déconfinement du pays, demain « Journées Portes Ouvertes » dans les maisons closes !

FATHER & SON*

Petite fable affable

« Père, Comment faire pour réussir dans la vie ?

- “Pour réussir sa vie”, mon enfant, tu voulais dire.

- Non ! je veux être riche et célèbre à l’envie !

- À qui sert la Nation, ce destin on peut prédire.

- Trop aléatoire : le sot peuple est ingrat…

- Fais des affaires. Rien ne vaut le négoce.
À travailler autrement on ne finit guère gras.

- Trop dur et pénible car la concurrence est rosse !

- Devient un savant qui le monde décille…

- Trop long et les études me fatiguent aussi !

- Alors, mon enfant, reste un parfait imbécile,
Aie d’utiles amis. D’aucuns vont loin ainsi ! »

* D’après Le jeune homme et le vieillard (I, 17) Jean-Pierre Claris de Florian (Fables, 1792)