Mosaïque de poésies prosaïques & de proses poétiques

parfois sous forme d'aphorismes, de chansons et surtout de fables…

mercredi 31 mars 2021

HAÏKU DE CHARCUT’

À la rosette de la légion d’honneur je préfère celle de Lyon.

LE TITANE DU VINTAGE

Parce que le Temps, ma foi, n’attend pas
Et qu’il avance toujours, pas à pas,
Quoi qu’il se passe ou advienne
Je ressasse mes antiennes ;
Car votre serviteur vient d’un temps 
Qui n’est plus, quoique encore palpitant
En son coeur et vient d’un monde
N’existant pas où vagabondent
Dix milles mots faits du meilleur métal
Offrant à d’aucuns leur doux récital.

Ce Temps, de plomb, bronze nos rêves
Tout autant, las, qu’il se fait glaive.
Aussi garder un moral d’acier
Quand on ne se sent que besacier,
N’est pas aisé, déjà géronte :
Il met aux fers, jusqu’à nos fontes,
Brise souvent nos rares instants d’or
Et parfois nos moments d’argent endort 
À l’heure où les zincs disparaissent
Et le cuivre fait bourse épaisse.

Je viens du temps des platines,
Que tous vos « C’est nickel ! » patine,
Celui, oui, où on avait l’airain
Solide et de toujours vastes terrains
Où, tout en chrome, cohorte d’autos
Jouaient sous le soleil des biscottos,
Bruits et fureurs au mercure
Montant dont, lors, on avait cure.
Ce monde vermeil était tout alu’
Laiton est désormais étain, Lulu !

lundi 29 mars 2021

HAÏKU TRAIT

Puisqu’on enterre « sa vie de garçon », certes rarement la mort dans l’âme, c’est donc que le mariage, fruit d’une passion surtout pour ceux qui en portent la croix, peut être une authentique résurrection !

L’OCELOT & LE COYOTE

Petite fable affable

La paix ancrée au cœur face aux aléas 
De la fortune et aux risques d’ici-bas,
Un jeune ocelot quitta sa dense et noire
Forêt pour les plateaux où il voulait boire
Les éloges dus aux beautés sans pareilles
De sa livrée colorée. Une merveille !

Car quand on est si beau, il faut le montrer !
Que ça se sache et dise. Or, en sa contrée,
L’ombre le masque, les autres le jalousent,
À commencer par la panthère qui épouse
La nuit sombre même au grand jour. Folie
Que d’avoir un pelage si peu joli !
Donc, lassé de ne trouver d’enthousiasme
À se voir tel qu’il est que dans le sarcasme
Des petits singes ou dans le miroir des eaux,
Il quitta les basses terres à cacao
Qui l’avaient vu naître et toute sa famille :
Il est un âge où il faut briser sa coquille !

Foin des dénicheurs et fi des chasseurs.
Il part vers les plateaux, alerte danseur.
Parmi rocailles et rocs des terres hautes, 
Il croise, drapé en ses loques, un coyote.
Face à la terne pelisse dépenaillée,
Plus usagée qu’âgée, sans guère atermoyer,
Notre jeune tacheté, tout mépris, lâche : 
« Quelle horreur un habit sans couleur ni tache !

- C’est qu’il est taillé pour se fondre aux rochers,
Qui est l’endroit où je viens à crécher !

- Je ne goûte ni le servile propos, ni l’offense.
Mais comment peut-on vivre sans l’alliance 
Entre la grâce et la beauté, mal accoutré ?

- On n’est pas plus sage de salir que d’outrer !
À quoi sert donc l’éclat sans l’esprit, Dépouille ?

- Dépouille ? Voudrais-tu me chanter pouilles ?

- Que nenni, l’Ami !… Mais l’Aigle que tu vois,
Là-haut, lui, t’a repéré quand ma voie
Est fort protégée par mes hardes et guenilles.
Va, je te laisse à votre proche gambille ! » 

samedi 27 mars 2021

HAÏKU DUR

La patience c’est savoir faire taire son impatience.

CHANTS D'HONNEUR ?

Ami, on a tant chanté la guerre,
Et ses cimetières et sa poussière,
Les vaines prières des lavandières 
Qui finiront, hélas, loudières
Quand Victoire coulera en bière
Dans les veines bleues des stipendiaires.
Ce qu’on a pu chanter feues ces guerres !

On louait les conflits de naguère
Et leurs cortèges de vivandières,
Plus ou moins serviles cantinières
Qui, sur les cadavres en cordillères,
Picoraient en razzia fauconnières
Comme gens de guerre aux moutonnières
Curées tues par les Va-t-en-guerre !

On a tant chanté toutes les guerres,
Au temps où n’avions qu’œillères
Et l’humeur encor’ plus cocardière,
Célébrant chevauchées cavalières,
Vantant canonnades incendiaires,
Aux psaumes de tel ou tel bréviaire
Faisant marcher au front le Vulgaire.

Bien sûr, on disait ne l’aimer gère
Cette guerre ordurière, outrancière,…
Mais tout en exaltant ses carrières,
Bannière pour tout saute-rivière
Qui y finirait tantôt en civière
Quand on médaillera Paul ou Pierre,
Fêtant hargne et instincts grégaires.

Si, moi aussi, je parle de guerre,
C’est pour vous rappeler, sans manière,
Qu’elles ont fermé tant de paupières
Ouvertes sur le choc des rapières
Et que de leurs flammes meurtrières
Jamais ne naquit nulle Lumière,…
Que c’est tourbière que toute guerre !

jeudi 25 mars 2021

HAÏKU’PULATION

Je voudrais bien prendre femme mais à qui ?

LE ROSSIGNOL EN GEÔLE

Petite fable affable

Sous des ciels délavés par l’orage, 
Dont le bleu lavé paraît un outrage
À l’été, auprès d’un ru cristallin
Et limpide murmurant sa charmeuse
Chanson, arrosant terres brumeuses
Et fumeuses forêts, dans l’opalin
Matin, oiseaux se disputent la gloire
Du chant le plus beau sur leurs brandilloires.

La respiration du vent, au ras 
Du sol se fige alors que rais de Râ,
Jusque dans les trous d’ombre, s’enquièrent
Des besoins de chacun. Alors dans l’air
S’élèvent plaintes et complaintes, sons clairs,
Pour célébrer le jour, l’âme fière.
Seul l’ami rossignol manque à l’appel
Lui dont le chant provoque rappels.

Corneilles sont allées le quérir à l’aube
Sur ordre des corbeaux, oiseaux de robe :
Il fut décrété d’arrestation
Pour tapage. Et à répétition.
Ce héraut de l’Hérault, devenu chantre
Des haies vives et félibre de nos champs
Est aux arrêts à cause de Méchants.
« Qu’ai-je donc fait pour mériter cet antre
Plutôt qu’air libre, et leur haine, Dieu ?
Quel noir forfait ? Quel méfait odieux ?

- Vous n’avez que bien fait ! D’ordinaire 
Cela suffit à courroucer lunaires
Et médiocres. Et s’ils ont du pouvoir…
Fit le chat-huant pour qui jour est nuit.
Votre malheur vient qu’en ce bas-monde
On n’est satisfait que quelques secondes
De ce qu’on a. L’Envie, voilà l’ennui ;
On veut mieux. Si d’aucuns le possèdent,
Jalousie pousse à des choses fort laides ! »

mardi 23 mars 2021

HAÏKU DE FEU

Être mordu de quelqu’un revient à en être pincé. 
Dès le début, l’amour est donc un masochisme !

LES VIEUX DU PAYS

Cycle toulousain
D’après G. Vigneault, Les gens de mon pays

Les Vieux du Pays
Étaient gens de paroles,
Parlotte et causeries,
Qui parlaient pour s’entendre
Et parlaient pour parler.
J’allais les écouter,
Disputer, patoiser,
Vérités et mensonges
Sur la Vie, le « Bon Temps »,…
De « Boudu » en « Pardi » ;
Leur échappaient pourtant
Et leurs petits bonheurs,
Et leurs grandes misères,
Qu’ils taisaient à loisir
Car on parlait tout haut
Que d’ce qui met à l’aise,
D’ce dont, « à force », on sourit.
Là, j’entendais parler
Raisin foulé aux pieds,
Labours faits à l’oreille,
Jours de faim, jours de foin,…
Et de dates où, diserts,
Tout était à fêter
Avec « ceuss’ » du village.
Je ne répéterai
Ni les mots ni les rires
Fusant à tout allure,
À dire certains noms

Je vous ai écouté,
Vous tous qui n’êtes plus
Et moi qui suis si peu,
Mais votre écho honore,
Vous qui aimiez jaser
« Atal », entre deux portes,
Béret sur le côté,
Ou au pied des clôtures
Où tout notre oc chantait
En vos belles saisons.

Sécheresses d’été
Et printemps qui inondent,
Hivers réveillés
Et automnes au beau temps,
Faisaient parler de vents,
De pluies sans agrément,
De travaux à finir
De semailles en récoltes,
De légumes et de grains,
Et « des tant belles filles »
Jà « ménines » endurcies
Dont on ignore l’âge.

Ces voix venues des champs
De gens pas malheureux
Ces voix chantaient Marie
Au clocher du village
Entre deux « coups » de vin
Au grand café « d’en ville »
Où on moquait l’école
Qui mena au carnage
Des tranchées, Général,
Et décima le coin
Pour des gars à cigares
Qui n’seront pas victimes
Et n’savent que paraître,
Ignorant jusqu’à nos treilles.
De vous je « me » rappelle
« Pépis » qui « vous les peliez »
Comme disait mon grand-père
Qui bâtit ma Thélème.

Vous m’avez fait voyage
De votre sage folie
Et n’avais qu’un désir,
« Quelque rêve joli »,
C’est, qu’en ces bonnes terres,
Mes fils aussi entendent
Vos dires et vos non-dits,
Et y glanent des fruits
Comme je l’ai fait moi,
Et, sur ces entrefaites
Se fassent, dans vos pas,
Un chemin nostalgique,
Se donnent à rêver
Un avenir prospère,…

Mais ils ont embarqué
Pour gagner le grand large
Sur leur bac, ont frondé,
Eux, par vaux et montagnes,
Où on entend rouler
Les eaux comme la foudre,
Et l’accent pour conter
Et chanter à toute heure.
Je les entends « roner »
Comme moi, mal à l’aise,
Dans leur âge  harassé
Et leur temps plein d’oracles,
Mais sans craindre demain,
En toute liberté…

lundi 22 mars 2021

dimanche 21 mars 2021

HAÏKU VIDE 19

La communication gouvernementale sur la pandémie ? 

Du vent pour habiller du vide !

L’OURS & LE RUCHER

Petite fable affable

Il fut un temps où Compère ours qui dévore
Tout ce qui pousse et vit, en bon omnivore,
N’était qu’un banal lourdaud de prédateur, 
Un chasseur-cueilleur de plus, en bon squatter,
Brigandant des vallons ombreux et des sombres
Bois à l’heure triste où les échos, sans nombre
Lassés se taisent, avec les oiseaux chanteurs.

Il mangeait assez peu et mal mais cette cruche
Vint à passer, matin, devant une ruche,
De celles qu’il comptait pour moins que rien.
Or la fringale guette le vaurien.
Alors l’occasion fit ce petit père
Larron : rucher lui semblait fort prospère
Et quête aisée pour un propre-à-rien.

Notre plantigrade n’avait goûté mie
Au délice des dieux , il fut tsunami
Pour le si fragile dôme mellifère.
Ce gras lard se gava, tout à son affaire
Et malgré la gent mellifique, aux bons dards
Maléfiques, que ravagea ce pendard.
Il détruisit tout, comme il savait le faire.

Un carnage accompagna donc le festin,
Pour avettes dont il scella le destin,
Quelques façons, à cette heure, qu’abeilles firent
Et même quelques détours, las, qu’elles prirent.
Mais pour lui et pour la première fois,
C’étaient succulence et abondance, foi
De conteur. Il en eut un large sourire.

Combien est-il de gens en ce bas-monde
Qui, comme de gros ours, plutôt que de vivre
Suivant leurs besoins, en de furibondes
Sarabandes saccagent ce qui veut vivre…

samedi 20 mars 2021

HAÏKU SOT

C’est bêtise que de contredire un idiot : il pense, a priori, que tout contradicteur n’est qu’un imbécile !

vendredi 19 mars 2021

HAÏKU TENNISTIQUE

L’ace est le propre des as.

À LA RECHERCHE D’UN PORT ?

Cycle toulousain

Pour quérir sa Margot ou sa Joconde,
Pourquoi partir à l’autre bout du monde 
Alors que cette bonne Terre est ronde
Et qu’il est agréable au cœur d’aimer l’Amour ?
Je préfère hanter prairies floribondes
Plutôt que de courir la furie de l’onde
Et d’affronter les folies furibondes
De ces vents qui vous rendent, las, cabourds.
On en croit caner à chaque seconde…

Tant pis si, sans retour, le lourd labour
Du temps nous prend de court et sans recours.

Alors qu’on croit avoir trouvé sa blonde,
Comment fuir à l’autre bout du monde 
Alors que notre vieille Terre est ronde
 Et qu’il est agréable au corps d’aimer d’amour ?
Aimons à s’en faire péter la bonde,
En terres fécondes où racines profondes
Des Nôtres nous ont donné la faconde
Qui fait croire, en nos frondes, qu’on est tambours
Et aux Belles qu’on est tout, sauf immonde.

On n’est pas gourds ni, Beauté, sans secours
Quand s’émoussent les sens, s’éteint le four,…

jeudi 18 mars 2021

HAÏKU PARANO

Un instructeur est une personne qui suit des instructions et les inculque à qui n’a pas eu d’instruction…

mercredi 17 mars 2021

HAÏKU IBÉRIQUE

Le mâle espagnol est souvent ténébreux. 
Est-ce pour cela qu’on le dit « hombre » ?

UN AIGLE ESPIÈGLE AU-DESSUS DE NOS SEIGLES ?

Petite fable affable

Un aigle craignant la famine pour lui 
Et les siens à cause de la concurrence 
Des autres rapaces pour qui aussi luit
Le soleil, malgré ses rappels à déférence
Pour son trône, les rassemble un bel et bon jour
Espérant tous les remettre à leur rang et place
Ou, à défaut, leur jouer quelque sale tour.
Il faut que personne, en ces airs, ne le surclasse !

Répondirent donc à son invitation
L’épervier, le milan, le faucon, la buse,…
Non sans craindre un coup de Jacnac par cols ou cluses
Car ce roi est moins connu pour ses attentions
Que pour ses coups fourrés. Dès lors, être sa dupe
Devient fatal à qui est trop confiant
Ou à qui vit de rêves : on finit vite en drupe
Sous ses bec et serres. Restons donc méfiants !

En voyant tous ces oiseaux de malheur qui tournent
Dans leur ciel, les habitants des monts et vaux
Décident de les arquebuser avant qu’ils ne détournent
D’humaines repues bêtes de cours ou troupeaux.
Ce fut carnage chez les égorgeurs… Fort rapide
Au surcroît. Quand l’aigle, qui aime à se faire espérer
En réunion, arrive à ses intrépides
Rivaux, ils ne sont plus qu’entrailles aérées.

Ainsi fut préservé le règne de notre aigle,
Souverain des cimes, expert en vils traquenards
Qui, plus roué que ne l’est le rusé renard,
Sut appliquer une fois de plus l’antique règle
De ses pères : « Quand un quidam te veut baston
Débrouille-toi pour qu’un autre aille lui faire
Le triste sort qu’il mérite ; ainsi garde-t-on, 
Et griffe propre et tête haute en toute affaire ! »

mardi 16 mars 2021

HAÏKU’P OF COFFEE

S’il est des petits blancs qui vous grisent à l’envie, 
Un petit noir donne des couleurs à la vie. 

lundi 15 mars 2021

HAÏKU À PUCCINO

Un petit café vaut mieux qu’un grand qu’ « a r'en foutu » !

DE NUIT GLOUTONNE EN JOUR GOULU

La lune, bouche rieuse de la nuit,
Pour tromper, un temps, et son monde et l’ennui,
S’apprête à faire un très grand banquet d’étoiles.
La faim de nos ciels est proverbiale,
Et ce festin-là se finira, matin,
Quand leur ventre aura blanchi le tain
À ces voraces agapes de lumière.

Les nues iront, dans l’aube nourricière
Et dans l’aurore brillante comme un œuf,
Alors en frairie avec un soleil neuf
Pour des libations où l’éther avale
L’azur et gobe la chaleur estivale.
Ce repas durera, malgré taciturnes
Et chagrins, jusqu’au prochain régal nocturne…

dimanche 14 mars 2021

HAÏKU BIQUE

Une réponse qui pose problème n’est pas une bonne solution même si elle est la moins mauvaise des options.

samedi 13 mars 2021

L’HAÏKU NIX

Les transports en commun, en amour comme ailleurs, sont rarement tendres.

ÉSOPE & SES MAÎTRES

Petite fable affable

Un bon citoyen, homme sage pensant peu
 Et parlant prou avait un bon esclave,
Un phrygien fuyant à sauve-qui-peut
La foule, race imbécile qui lave
Son honneur bafoué dans un grand  bain de sang
Comme elle essuie tout affront par le blâme.

Servile d’état et non d’esprit, serviteur
Dévoué mais guère soumis, Ésope,
Puisque tel était son nom, était bretteur
En matière de pensée et moins myope
Qu’un philosophe. Le propos parfois cassant,
Le mot, souvent, plus affuté que lame,
Il disait son fait, franco, à tout un chacun
D’une épigramme valant maints épais bouquins.

Il méprisait fort le luxe et le faste 
Qui le faisait vivre, tout autant qu’il respectait
La misère que craignent tant les dynastes.
Esope, libre d’esprit comme un grand dadais,
Était, dit-on, contrefait à l’extrême,
Nous affranchit sur un monde mort quoiqu’éloquent,
Le sien, pas si éloigné du nôtre,
Et des vices dans lesquels il se vautre.

Ainsi son nom survit-il à sa mort
Quand tous ses maîtres dans l’oubli tombèrent.
Et en mordant, sa vie durant, du sort le mors,
Il prouva aux éternels pauvres hères,
Soient-ils hilotes, que Talent rend pérenne, quand
Le rang ne fait grand qu’un temps de carême.

jeudi 11 mars 2021

HAÏKU VRAI

Qu’importe si je chante faux du moment que je pense juste !

FUGITIF

Avancer avec le vent
Le ventre vide et la tête pleine
Pour fuir sa vie d’avant
À travers les monts et les plaines
Avancer contre le vent
Les yeux secs et l’esprit avide
Aller toujours vers devant
Les muscles morts et le teint livide

Aller les pieds dans la boue
Soi et des souvenirs pour bagage
Étonné d’être encore debout
D’avoir ajouté un an à son âge
Tirer ses pieds de la boue
N’être qu’un pauvre hère qui erre
Quand autour le monde bout
Entre faims de guerre et fin des terres

Avancer avec le vent
Car je ne suis pas d’ici mon frère
J’ai fui ma vie d’avant
N’étant plus du pays de mes pères
Avançant contre le vent
Dans la peur la solitude l’orage
Allant toujours vers devant
La sollicitude pour rivage

Aller mes pieds dans la boue
À travers déserts et villes vides
Étonné d’être encore debout
D’avoir mal jusqu’à être impavide
Tirer mes pieds de la boue
Avec pour compagne mon haleine
Quand autour le monde bout
Et qu’on vaut moins qu’une bête à laine

mardi 9 mars 2021

HAÏKU CHIEN

Messieurs, apprenez à apprivoiser les tâches domestiques !

LA PLUME & LE PINCEAU

Petite fable affable d’après A. de Vitallis
La plume, le pinceau & l’écritoire (Fables, livre V, 3)

À nouveau, sur l’écritoire plume et pinceau,
Pour une question de préséance,
Se prennent fort le chou : « Secret n’est point un sceau !
Du calame et du stylet, descendance
Je suis ! faisait la plume au cul de l’encrier.

- Mais Lascaux fut décorée par mes pères !
Tu me dois donc le respect, bavarde prospère.

- Gloire d’avant la Polis. Y’a pas d’quoi l’crier.
Ce n’est pas de Saint Chrême dont ta chevelure est ointe !»

Ne prisant que son état, cette pointe
Empennée estime qu’hors la graphie des mots
Tout ouvrage n’est point œuvre, au mieux broutille.
Quant au vieux poilu, l’encre noire étant maux
Sans fin, hors la couleur, tout n’est que vétille :
Peu de bon, hélas, et point de salut.

On discutait lors sans qu’en plus-value
Ne vînt un peu d’esprit ou de raison. La dispute
S’éternise et lasse l’office qui Chandelle députe :
« Amis, un sot orgueil pousse souvent
À s’attribuer le prestige et tout l’avantage
D’un grand succès qui fait se pâmer sans ambages…
Alors qu’on n’en fut qu’instrument ! » Ah, le vent !

dimanche 7 mars 2021

HAÏKU DE FOLIE

Un escargot peut-il faire autrement que de vivre sur un grand pied ?

À L’OUEST D’ÉDEN

À l’heure où, de tout mon corps j’étais, las, confiné
Sous un ciel qui grisait quand il ne pleurait,
Prisonnier d’écrans où peurs et mort affleuraient,
Mon coeur là-bas, en ce paradis, retournait…

Là-bas, à Bormes, où les pierres s’endorment
Sous le soleil de Midi en points scintillants,
Petits éclat d’or relevant le gris dessous les ormes,
Animant l’ocre de traits chauffés et brillants.
Mes pensées caressaient, sortant de mon triste cadre,
À fleur, la serpentine moirée qui encadre
Ces portes entrouvertes qui ont l’accent d’antan,
Que gardent des heurtoirs de bronze d’un autre temps.

Là-bas, dans ces moments-là, même l’ombre est sèche,
Au pied de façades aux couleurs d’Italie
Appuyées sur l’azur où aucun souffle ne crèche.
Par les venelles en lacis c’est hier qu’on lit,
Et dans ce dédale de ruelles montantes
Et tournantes, enlacées, on sort. Enfin on tente,
En se posant aux cuberts ici encombrés,
Et là, en paliers descendants, pénombrés.

Là-bas, résonnent de couleurs fleuries ces voûtes,
À l’heure où les volets repoussant la chaleur
Sont croisés, où tous les balcons sont à l’écoute
Du moindre courant d’air que solaire pâleur
Hypnotique, rend à l’esprit hypothétique.
Les fenêtres l’ont compris, baignées d’aromatiques
Essences embaumant jusqu’aux pierres nues,
Jusqu’aux cadrans solaires griffant l’air ténu.

Allant de figuier en mûrier, je paresse
De placette en fontaine, suivant d’un pas lent
La route  de l’eau, celle qui, ici, loin de la presse,
Chante la vie facile et tant pleine d’allant,
Que rythment les jours de marché et les cigales
Quand la mer, là-bas, de vos étés martingale,
Vous fait tant vous amasser dans tous ces bruits
Que vous appelez « Vie » et qu’ici je fuis…

À l’heure où nos vies et le temps se déconfinent
Enfin, ces vers embourbés que je chantourne,
Moi, je chante ce là-bas où, joie séraphine,
Mimosa et jasmin veulent que je retourne…

vendredi 5 mars 2021

HAÏKU’PLEUREUX

Je prête et tends volontiers la main à celle qui m’a donné la sienne.

DU RÉGAL AU FRUGAL

Petite fable affable

Grande sauterie chez les sauterelles :
On invite même les criquets à en croquer !
Mais sans bruit car pinsons et tourterelles,
De bosquets en buissons, lors du plus simple hoquet,
Peuvent vous becqueter, mes bons amis, en masse
Et nul ne veut finir gobé comme limace.

On vient de loin pour se retrouver en frairie,
Mettre le couvert sur les estivales prairies
- On le sut plus tard - d’une pauvre vicairie
Qu’un temps inclément a rendue bien moins verte
Que sèche… quand glèbe ne fut pas découverte !

Nos saltarins, par le vert bocage et les bois
Noirs, vont en petits groupes et en silence,
Le cœur à la fête mais, hélas, l’esprit aux abois
Car les étourneaux ne sont que violence,
Les fauvettes cruelles en ces pillages ourdis
Et les coucous gloutonnerie à l’étourdie.

Donc on avance en tapinois vers la terre 
Promise aux orgies entomiques en clan
Sans espérer les retardataires.
Là, un petit lassé, lâche un : « C’est loin, Maman
Le raout du mois d’août où l’on doit faire ventre.
Parce que j’en vois beaucoup, moi, des zélés chantres. »

Une mésange entendit cette voix si menue
Et la mit, avec ses soeurs, à un commun menu 
Non sans avoir convié tout oiseau du crû.
« Jeunes gens, prenez garde aux choses que vous dites.
Tout peut sortir d'un mot qu'en passant vous perdîtes.* »

 * Victor Hugo, Toute la lyre?

mercredi 3 mars 2021

HAÏKU D’ŒIL AU TÉLESCOPE

Né sous une bonne étoile je suis toujours dans la lune c’est pour cela que l’on me décrit comme un désastre.

FOLLE SOIRÉE

Attifée comme princesse de kermesse
Et maquillée comme ces reine de rues 
Qui finissent en ruelle sur une promesse,
Le cœur défait, l’espoir mort et l’âme en crue,
Tu pars en soirée, rêves jà disparus…
Mais fais, Fillette, un chant d’amour de tes feintes,
Ces joies succinctes du plaisir hors d’atteinte.

Tu prends le pouls de la foule, fuyant
Bouche qui soupire et regard qui soupèse,
Emportée par sa houle, cœur vacillant,
Corps qui roule, se soûle tout à son aise
Pour oublier que sans faim on va te croquer
Et, las, sans fin, sans doute, après, te moquer.
Fais donc, Fillette, un chant d’amour de ta crainte 
Pour ne pas voir qu’une étreinte est vite éteinte.

Rouge aux lèvres et yeux humides ,
Rose aux joues et  front fiévreux,
Petite fleur froissée tu paies en liquide
Des passades demain souvenirs vaporeux,
Rendant ce langoureux-là si douloureux 
Va, fais, Fillette, un chant d’amour de ta plainte,
Pour qu'on t’éreinte avant que tu sois éteinte.

Entre effroi et sueur tu vas, sans pieds
Compter tes pas, t’en conter pour un sourire
Quelconque qui semble t’apprécier…
Pour l’heur, tu te soûles de ton propre rire,
Pour t’enivrer, lors d’un instant lisse et seul,
Et oublier que le temps t’est un linceul
Loin, ma fillette, des chants d’amour, contrainte 
Par l’œil d’ “amies” peintes, ointes, qui se pintent…