Mosaïque de poésies prosaïques & de proses poétiques

parfois sous forme d'aphorismes, de chansons et surtout de fables…

samedi 27 avril 2024

HAÏKU DE CHICOTS

Qui veut croquer la vie à pleines dents à intérêt à les avoir bonnes !

MARIN MARINÉ

Combien de pauvres hères ont quitté l’amère
Patrie pour ne pas, ne plus toucher le fond ?
Combien ont filé, croyant filets filon,
Sur l’océan bordier de natales terres ?

Combien donc ont fuit leur mère et la misère
Leur vie faisant des nœuds, étant puit sans fond ?
Combien se sont sabordés, faute de fonds,
Croyant que se terraient terres moins austères ?

Combien de mousses, de gabiers et marins
D’eau douce ce sont crus capitaines un brin
De leur destin, pilotes de leur gabare ?

La mer ce n’est qu’embruns, que roulis et que grains,…
Si t’en as marre d’une vie à l’amarre,
N’est pas mieux celle qui te brise les reins !

jeudi 25 avril 2024

HAÏKU DE MAUX

La lecture m’a toujours attirée mais c’est l’écriture qui, à jamais, m’a retenue.

NE CHIGNE NI NE CHOUINE

Amie, je t’offre un bouquet de pleurs
D’aucun regret envasé pour l’heur ;
Une brassées de larmes en pétales
Dont l’eau, là, aux yeux de tous s’étale,
Sans beau papier de remord fangé.
Cette rosée qui peut déranger,
N’est pas l’apanage d’un pauvre homme
Qui, trop souvent, larmoie pour un rien
Au silence de la pluie. D’un gnome.
Chialer, c’est pas pour les vauriens.

Oui, mes plus humides sentiments,
Mes sensations qui ainsi dégouttent
Sans théorie du  ruissellement,
Je les dépose au creux de gouttes,
Perdues, échouées, d’un ru en crue
Qui coule, arrosant secrète flore
Née au marais salant d’yeux émus.
Car ils n’implorent. Ni ne déplorent…
Il n’y a qu’instant, non repentir ;
Il y a partage, non mentir.

Ami, je t’offre un bouquet de pleurs,
Mouillant d’une bruine de bonheur
Les cœurs d’un temps tout en sécheresse.
Cette ondée débondée, pécheresse, 
Débordant du vase étroit des jours,
C’est ni lamentation ni supplique,
N’est pas pour apitoyer autour.
C’est moins emphatique qu’empathique :
Cette eau-là est le sang de ma vie.
Donc, sur moi, geins et gémis d’envie !

mardi 23 avril 2024

HAÏKU LUMINEUX

Beaucoup ont le mâle du pays alors que l’allogène est souvent plus brillant !

J’ME TIRE AILLEURS

From I’m movin' on sung by Elvis Presley
written by Hank Snow

Depuis qu’j’suis connu,
J’suis très en vue,
D’tout un tas d’inconnus,
Des m’as-tu-vu
Mais moi j’fuis sans peur,
Les cons, les voyeurs
Vadrouilleurs, ces crieurs
De tout monnayeurs,
Donc, j’me tire ailleurs…

Loin d’leurs soirées coincées,
Où l’on fait qu’têter
Que des jus frelatés
Et de l’herbe assez,
J’me tire ailleurs, 
Voir du meilleur,
D’ces mondanités,
On n’sort que cuité
Donc, j’me tire ailleurs,
Un tant gouailleur.

D’leurs plateaux télé,
J’en ai vraiment soupé
D’me mêler à des fêlés,
D’aller m’louper ;
Loin des railleurs,
J’me tire ailleurs 
Respirer du vrai, 
Et r’garder du frais
J'me tire ailleurs, 
Gouailleur, railleur.

Quand on me court par trop
Sur le haricot -
« Boulot, dodo, métro »,
Cocoricos,… -
J’me tire ailleurs,
Voir du meilleur,
Si j’me fait tartir un brin
Avec Miss Bourrin
J'me tire ailleurs,
Gouailleur, railleur,…
Me dis « Casse-toi ! »,
« C’est pas pour toi ! »,
Lui dis « Casse-toi,
De sous mon toit ! »
Car ces « Casse-toi ! »
Ça laiss’ pantois,
Et bien plus, crois-moi,
Qu’d’montrer son doigt
Et me tir' ailleurs
Loin des chieurs.

J’me dis « Casse-toi ! »,
« C’est pas pour toi ! »,
Vous dis « Casse-toi,
De sous ce toit ! » ;
Tous ces « Casse-toi ! »
Ça laiss’ pantois
Et bien plus, je crois,
Qu’d’montrer son doigt.

J’me tire ailleurs
Voir du meilleur…

Gouailleur, railleur,
J’me tire ailleurs…

J’me tire ailleurs
Voir du meilleur…

dimanche 21 avril 2024

HAÏKU PENCHÉ SUR LE CÔTÉ

On manque plus d’esprit que d’idées dans notre beau pays !

BIENVENUE À BORD

Mon enfance ne fut pas, hélas, sans nuage,
Plus en brunes d’ombres qu’aurores de vermeils,
Mais c’était lors un sage et merveilleux rivage
D’où j’appareillais pour d’illusoires soleils.

Voilà que s’approche, matin, le dernier quai,

Qu’il faut ranger les cartes et, jà, plier les voiles,
Ne plus goûter aux vents et embruns en hoquets,
Et ne plus mie calquer sa course sur l’Etoile…

J’ai vu mille horizons se pointer à ma proue

ue je n’ai pas conquis ni mis sous les verrous,
Laissé filer à ma poupe autant de tropiques…

Entre grains à bâbord, à tribord ouragans,
J’ai traversé un monde et une époque épiques.
Le voyage fut beau… à défaut d’être grand.

vendredi 19 avril 2024

HAÏKU D’À FRIC

Mal acquis est souvent bien gardé !

MAUSSADERIE ou MOROSE LE MORAL*

À Charles Cros (1842 - 1888)

Ce siècle neuf et froid, mais de fer et de feu,
Tue, en nos cœurs meurtris, le miracle du rêve,
Décroche à nos nues grises, et le miel et la sève
De nos contes d’antan pour des propos suiffeux.

Car tous sont boute-feux quand tout est couvre feu.
Donc foin de merveilleux, et on crève sans trêve ;
Fi d’enchantement, des mythes et songes d’aïeux :
La vie nous est brève et les fées sont filles d’Eve.

Finies chimères, idées et la magie des livres ;
Enterrées utopies, illusions qui délivrent :
Le désir est manant quand le plaisir est roi.

Trophées qui affolent, butins qui vous enivrent,
Voilà ce qu’est réussir, voilà ce qu’est vivre
Au siècle de fer et de feu… mais neuf et froid.


* Sous-titre suggéré par Catherine Destrepan

jeudi 18 avril 2024

HAÏKU DE REINS, HAIKU DE RIEN

Aujourd’hui, on confond le sexe et l’amour alors que le premier dure ce qu’il peut et l’autre ce qu’on veut.

mercredi 17 avril 2024

HAÏKU LISSE

L’amour c’est un infini borné par une vie limitée.

LE TEMPS NE PASSE POINT…

D’après Le temps ne bouge point et jamais ne repose
de Jean-Baptiste Chassignet (1571 - 1635)

Le temps ne passe point et jamais ne se pose.
Il nous navre au matin, cheminant à son pas,
Pour nous dépêcher, là, sous un un ciel sans appâts,
Où nous faisons mine de ne croire la chose.

S’écoulent les saisons, qu’on lit à lèvre close, 
En sentes qui sinuent, serpentes, de hauts en bâts, 
L’âme blessé, l’esprit gourd, le cœur au trépas, 
Sans rien qui repose ni l’espoir d’une pause.

Le printemps ne fut point inclément, loin s’en faut
Mais sa douceur, hélas, maints et maints assauts
Fut plus givre glacé que rosée fraîche en sorte.

L’été n’a pas porté de beaux fruits tous les jours,
Et l’automne fut vents mauvais, comme toujours,
Car déjà l’hiver de mes jours frappe à la porte.

lundi 15 avril 2024

HAÏKU DEUX LIVRES

Quoi de plus incongru qu’une page blanche dans un roman noir ?

L’HOMME QUE T’AIMES

Il a le crin blanchi,
L’homme que t’aimes,
Et il s’est avachi,
L’homme que t’aimes.

Mais il est toujours là
Et de toi jamais las,
Lueur au fond des yeux
Et sourire en bouche,
Remerciant les cieux
Quand nos mains se touchent
Ou nos lèvres s’abouchent ;
Quand nos deux corps se couchent
Pour des sommeils profonds
Et des rêves sans fond.

Pourtant tu l’aimes
Avec son air gauchi…
Pourtant tu l’aimes
Malgré son dos fléchi…

Ainsi les heures passent
Qui tant nous carapacent,
Menant feues nos ardeurs
Sur ce qui nous reste
De chemin, sans grand heurt
Et d’un pas moins preste,
Vers le tout dernier lit
Celui qui tout délie
Sauf la douce tendresse
Qui rythme nos jours,
Malgré mes maladresses,
Qui vaut les « toujours »
Et, sans doute, un peu plus même,
Que te disait l’homme qui t’aime…

Malgré son crin blanchi,
Et son vieil air gauchi…
Malgré son dos fléchi
Et ses traits avachis…

samedi 13 avril 2024

HAÏKU DE FART

Allez au ski rien que pour brouiller les pistes est non seulement dangereux mais irresponsable : on se retrouve vite à glisser sur une mauvaise pente !

LA JEUNE VIEILLE

« Le coeur bat là où il n’y a pas d’autrefois » J. Prévert

L’esprit déchiré d’une jamais madame,
Elle va, croquée au cœur, mordue à l’âme,
Affronter les crocs des ans, la dent des gens,
Le regard vide et noir, le pas diligent.
Pour les lèvres écumeuses, le passé trouble
D’une vieille extase compte plus triple que double.

La marche des ans et le labour du temps
Marque un corps mouvant aux lyres du vent.
Vivante parmi les mourants, elle est chimère,
Fantasme qu’on montre au doigt, fille mère :
C’est le mauvais exemple, la court vertu,
La fille perdue, la source émue vite bue.

Quand on t’a défleuri sans fard ta jeunesse
Volée, qu’on t’y a imposée la vieillesse,
Comment savourer un moment l’oeil au ciel,
Goûter le moindre instant quand le miel est fiel ?
Plus la rage de manger les jours qui passent.
Plus la force de boire les heures lasses.

Certes, elle a apprit, seule et froide, à aimer
Bien plus charmes d’avril ou douceurs de mai,
Soleil de février, frimas de décembre
Ou givre en juillet et vents fous de septembre
Mais aux grands inquisiteurs, le grisonnant
Du cheveu est de jeux grisants le tenant…

jeudi 11 avril 2024

DIALOGUE HAÏKU’LLU

« Avec mon idée, ma patronne va se faire des couilles en or !

- Dommage, c’était plutôt une belle femme ! »

ÉCLIPSE TOTALE

Au lendemain du 8 avril 2024
sur une photo de M.Y. Custeau

Le jour se fait blafard au rendez-vous des astres,
Comme s'il annonçait quelque désastre en cours,
Un avenir qui va, sur l’heure, tourner court.

Notre esprit nous ramène au temps de Zoroastre :
 La lumière blême, tuant un temps la clarté
Et un frisson glacé qui fend l’air, tout y est !

Une atmosphère d’apocalypse nous hante.
C’est hypnotisant la nuit à midi sonnant
Et, à défaut d’être malfaisant, dissonant.
Sont-ce prémices de prophéties effrayantes ?

Présages de sombres malheurs, de malefaim,… ?
Cet auspice augure-t-il pour nous « l’Autre Rive » ?
Le jour du Jugement Dernier qui, las, arrive
Pour un monde en dérive et qui marche à sa fin ?



mardi 9 avril 2024

HAÏKU DE BAMBOU

J’ai demandé à mon pâtissier un gâteau pour 8 personnes.
Il m’en a vendu un pour 6 au prix d’un pour 10 !

AU LONG DU JOUR…

Au long du jour
Je cours toujours
D’un repassage au repas sage
Et puis d’un ménage à un « Mais, nage ! »
La vie m’épuise
L’envie s’épuise

Je xourds toujours
Au fil des jours
Souvent butin parfois catin
Chez les beaux teints des vieux bottins
L’envie m’épuise
Ma vie s’épuise

Au long du. jour
Au fil des jours

lundi 8 avril 2024

HAÏKU RÂLANT

          Notre siècle n’a, hélas, d’estime que pour la célébrité née dans la jeunesse et de considération que pour la renommée vite acquise. Et tant pis pour pour le laborieux talent méconnu ou l’humilité industrieuse et créatrice.

dimanche 7 avril 2024

HAÏKU SUR LA TÊTE

Peut-on vivre, à la fois, une petite vie et un grand amour ?

TERREURS NOCTURNES

Ainsi va ma vie, ainsi vont mes nuits…

Éprouvé par la vie et hanté par la mort,
Crépuscule qui s’éteint, aube qui s’allume
Me sont des affres hélas, pire d’un même abord :
Ils angoissent mes heures et soucient fort ma plume…

S’apeurer à chaque soir que la nuit te dorme
Et puis s’étonner de s’éveiller au matin,
Regrettant qu’aurore allonge l’ombre de ormes
Car, à la brune, la peur reprendra du teint…

S’épouvanter que le sommeil jamais ne vienne
Mais se défier des rêves qui me tournent court,
De ces cauchemars qui, encor’, toujours, reviennent ;
S’effrayer d’un repos qui épuise le jour…

Craindre ces lits froids de solitude qui restent ;
Appréhender celui chaud des amours passant ;
Frémir, sans répit, d’une pénombre funeste ;
Redouter les veilleuses allant en faiblissant…

vendredi 5 avril 2024

HAÏKU SENTIMENTAL

L’Amour fait gagner de cœur ce qu’elle  fait perdre de raison.

EN L’ABSENCE DE TA PRÉSENCE

À Tatie, le 21 janvier 2023

Et il pleut, à tâtons, 
Des fleurs de coton,
En entêtant mobile
D’heures immobiles,
Au village endormi, 
Sur l’église assoupie,
Dans la nuit cécitante
Dans l’ennui de l’attente.

Tristesse ensevelie
Dans la peur de l’oubli,
D’un silence anobli
Sans risque d’embellie.

Aux veines de bitume
Du bourg en blanc costume,
Sur sa chair de béton,
Pleurent de gros chatons
De peuplier, manège
Indolent d’une neige
D’heures vite passées
Et d’un temps trépassé.

mercredi 3 avril 2024

HAÏKU DE SCOOPS & DE BUZZS

Les médias, sociaux ou non, font d’éphémères immortels.

VOILÀ REVENUE…

Voilà revenue la cohorte des nues,
Silencieuse légion moutonnière,
Qui court les cieux à l’aurore venue, 
Qui marche sur l’horizon sans bannière
Dans ses vaporeuses cuirasses nues.

Voilà revenue la cohorte des nues,
Armée disciplinée qui paît et qui broute
Pour qu’il ne repousse plus, l’azur ténu,
Jusqu’au bout de ce qui sera sa route,
Lente marche forcée, connue, continue,…
La saison, menue, nous avait prévenus…

Voilà revenue la cohorte des nues,
Qui commence le siège de la plaine,
Pour l’inonder, en assauts sans retenue,
Du bon sang du ciel  qui, à coupes pleines,
Fécondera ses dons menus et grenus
Avec une bonté par tous reconnue.

Voilà revenue la cohorte des nues,
Phalange pour des terres qui par trop donnent,
Trop entretenues, devenues moins charnues,
Seule armée bienvenue, dont on pardonne,
Les excès fous ou la mauvaise tenue…
Car elle offre tout, sauf la déconvenue.

lundi 1 avril 2024

HAÏKU DE SANG

Ne vous laissez pas transporter par la colère : vous n’irez pas bien loin !

À CELUI D’ANGERS

Bienvenue à toi l’Étranger
Toi qui me serais dit-on un danger
Pour ma vie installée bien rangée
Que tu ne songes qu’à déranger
N’aimant rien moins qu’à tout vendanger

Bienvenue à toi l’Étranger
On ne devrait pas se mélanger
Entre gars d’ici et de Tanger
Même si ça peut nous démanger
Car tu es venu mon pain manger

Bienvenue à toi l’étranger
Ne songeant qu’à mon bien engranger
Quoique coursier de mon boulanger
Ou prêt à mes chiottes vidanger
Et ta femme mon bébé langer

Bienvenue à toi l’étranger
Posons-nous un peu pour échanger 
Sur mes poiriers et tes orangers
Et nos deux cultures louanger
Et les a priori effranger

Bienvenue à toi l’étranger
On pourra pas les cons essanger
Nul ni rien ne peut las arranger
Âmes ou esprits ne voulant changer
Et, en médiocres, se revanger…

dimanche 31 mars 2024

HAÏKU DE COLÈRE

La gloire est une p… pour laquelle il faudrait se prostituer !

AUBE BLANCHE

D’après une photo de Marc-Yvan, 22 janvier 2023

Uni, mais pas uniforme, un linceul de silence
Recouvre la ville et le bois domestiqué,
Voilant les souillures d’un vieux monde en balance,
Dissimulant ce qu’on voudrait éradiquer.

Dérobant à nos yeux l’urbaine salissure
Ce drap de lit ouate l’à-pic, embellit
L’abrupt, gomme l’angle et comble les flétrissures
Que l’homme fait jusqu’à l’air de son ciel de lit.

Déguisant nos errements en vraie carte postale
Toute neige nous fait faire le deuil du vain
Et du bruit, atténue, en saisonnier Tantale,
Et même cèle, nos affronts faits au divin.

Sous des nues qui s’enrouent où, aussi du blanc farde
Et couvre l’azur pali, l’infini dépoli,
Cette enveloppe adoucit le pas qui s’attarde,
Estompe les ombres, les camoufle en roulis.

Lors le monde perd sa monstrueuse insolence
Terre ses erreurs sous l’éphémère beauté
Qui lui fait retrouver l’édénique innocence
Perdue depuis le temps de Dame Galatée…



vendredi 29 mars 2024

HAÏKU D’HEURES OUVRÉES

Le « travail forcé » n’est pas un scandale, c’est un pléonasme !

L’ÉTOUFFANTE FEUILLÉE

Sur un travail d’Elisa (2020)

La vie m’est une noire forêt
Où la lumière est faite d’ombres
Dans ses sentes toutes en pénombre,
Où les branches sont lacs et rets.

Sa futaie au cieux fait arrêt
Et nul chant d’oiseau ne l’encombre.
La vie m’est une noire forêt
Où la lumière est faite d’ombres…

Je dois m’élever, sans apprêt,
Pour respirer, hors ces décombres,
Pour vibrer un peu hors du nombre,
La vie m’est une noire forêt.



mercredi 27 mars 2024

HAÏKU DU LIBRAIRE

Les livres immoraux sont à l’image de l’ignominie du temps où ils sont nés non de leurs auteurs.

LA RUE S’EST ANIMÉE

Texte proposé pour l’exposition de M. Falgas
« Les Nouveaux territoires » (Argelès-Gazost, janvier 2023)

Dans les fumées grises, la rue s’est animée.
Le jour désarrimé fait que, là, l’on se grise
Parmi les abîmés ou ceux qu’un rien défrise
Qu’importe bise ou brise, fini de déprimer…

On sort quelques chaises et circule de la braise
Pour le soir sublimer, malgré le temps, la crise,
Faire la fête à l’aise sans autre exégèse.

Qui viendra réprimer la joie d’un lâcher-prise,
De plaisirs sans surprise et d’heures élimées ?
Messieurs, pas de méprise : on a toute maîtrise
De notre coin miné, dépourvu d’entreprises.

Pour vous on est punaises ou faiseur de fadaises,
Toujours là à frimer, minables sous emprise,
Tatoués balézes jamais à court de baise,…

Là rien à réprimer : que des filles éprises
Et des gars sans prise, venus pour « s’exprimer »,
Qu’ont plus la cerise, qui oublient de trimer : 
La rue s’est animée dans les fumées grises !



lundi 25 mars 2024

HAÏKU D’LA PAONE

Même les Lumières se sont éteintes un jour.

NOËL À MONTRÉAL

Sur une photo de Marc-Yvan Custeau

Sous une lumière ambrée qui adoucit
Les formes du manteau de l’hiver hier tombé,
La ville, en bruits et pas, s’endormait, quiète et coite.

Là, pas une ombre ni un être pour souiller
Le blanc, pour affronter l’air froid ou pour brouiller
La page blanche de la morte saison, moite.

Le calme recouvre la nuit qui, tant agite.
Les arbres retrouvent enfin la sérénité
Qu’offre l’immobilité d’une dignité
De gel, givre partant à l’assaut de nos gîtes.

Au silence toute vie a été réduite,
À la lenteur aussi. À la rigidité.
Le prix d’un Noel blanc, l’originalité
Renouvelée de joies dans quelques flocons inscrites.



samedi 23 mars 2024

HAÏKU DE CANINES

Certains mènent leur vie comme on promène un chien, sans songer que c’est eux qu’on a mis en laisse, à qui on a passé le collier du labeur et que l’on nourrit de convenances et de conventions dans la gamelle du banal et du commun que l’on a baptisé « quotidien ».

LE CERCLE DE FAMILLE

Texte proposé pour l’exposition de M. Falgas
« Les Nouveaux territoires » (Argelès-Gazost, janvier 2023)

Lorsque l'enfant paraît, le cercle de famille
S’élargit et alors l’horizon s’obscurcit,
Car l’Avenir n’offre guère, ici, d’éclaircies ;
Ce n’est pas toujours de joie qu’hélas les regards brillent…

Dans un monde en déclin aux valeurs jà rancies
Où la réussite et le confort sont matériels,
Entraves et boulets des temps industriels.

On vit une époque, Dieu, qui est sans merci
Pour les enfants guettés par des dangers pluriels…
L’espoir et le destin sont si caractériels !

Plus son ventre rondit plus sa tête fourmille :
De putains de questions dont l’âme se noircit,
De craintes ou de peurs dont le cœur se farcit
Et de pleurs, pour demain, venant en escadrille.

Ce n’est pas toujours de joie qu’hélas les regards brillent
Chez les mères à venir, et même endurcies :
Leurs joies sont en sursis, leur bonheur mal assis
Comme il en est, hélas, du cercle de famille.



jeudi 21 mars 2024

HAÏKU DE PURGATIF AU PURGATOIRE

Que se passe-t-il si un diable d’homme rencontre une sainte femme ?

QUEL TABLEAU !

Sur un tableau d’Elisa (Novembre 2022)

Un ciel d’aurore rose accouche des brumes
Et fait renaître les monts endormis,
Langés d’un brouillard douillet à demi.
Du sommeil nocturne la vie s’exhume.

Le soleil s’est perdu dans cette écume.
Sa lumière, encore toute anémie,
Fait frémir le lac. Par quelque alchimie,
Lors, les couleurs de l’automne s’allument.

Ainsi, un jour nouveau vient lentement
Vers nous, tout hésitant, et, prudemment,
Avance, redorant Mère Nature.

J’accompagne, rêveur, ses premiers pas
Laissant voir, sans pudeur, tous ses appâts,
Augurant de petits joies futures…



mardi 19 mars 2024

HAÏKU DE COM’

En politique, la plupart des solutions proposées ne font que complexifier les problèmes.

D’AUJOURD’HUI À DEMAIN

Texte proposé pour l’exposition de M. Falgas
« Les Nouveaux territoires » (Argelès-Gazost, janvier 2023)

Tout comme la vôtre, comme celle des autres,
D’aujourd’hui à demain ma vie, las, est passée
Toujours vite en allée, déjà presque effacée
Qu’on soit suppôt de Satan ou gueule d’apôtre.

Le joug du mariage et le bât des enfants
Ont terni mon teint, délavé mes yeux de faon.
Je suis si harassée. Cassée. Déjà glacée.

Quoi, des rêves et des espoirs à mon âge ?!… À d’autre !
Mes projets et mes souhaits, hélas, se sont lassés
De moi. La déception, ce qui m’a tracassé,…
M’ont ridé les joues et plissé le front. Entre autres…

J’ai vécu dans cet appartement étouffant,
Tête emprisonnée et corps cloîtré, piaffant
D’être sans exister en ces temps qu’on dit nôtres…

Graine d’épeautre qui dans tous vents se vautre,
Toujours vite en allée, déjà presque effacée,
D’aujourd’hui à demain ma vie, las, est passée
Malgré mes vœux, prières et autres patenôtres…



lundi 18 mars 2024

dimanche 17 mars 2024

HAÏKU SENSIBLE

Pour trouver du sens aux choses, il faut soi-même savoir jouer des siens.

ANONYME

Texte proposé pour l’exposition de M. Falgas
« Les Nouveaux territoires » (Argelès-Gazost, janvier 2023)

Parmi des visages sans vie et sans regard,
Tout seul et inconnu. Sans un mot en partage.
Et par les rues courues de quidams sans âge
Se déroulent mes jours, là, sous mes yeux hagards.

Je suis insignifiant et indigne d’égards.
Oui, partout étranger et ailleurs de passage,
Je fuis des heures qui me laissent en leur sillage.
La vie ordinaire. S’en plaindre, c’est ringard.

Paraître personne ici, las, c’est exister.
Et à quoi bon être : il suffit de persister
À être sans fard ni fond. C’est de bonne guerre !

Pourquoi vouloir sortir de la banalité ?
Sois comme les autres : commun et vulgaire…
Pourquoi avoir une vraie personnalité ?



samedi 16 mars 2024

vendredi 15 mars 2024

HAÏKU DE BONHEUR

Dans notre monde, on veut à tout prix être heureux alors qu’il coûte moins d’essayer de ne pas être malheureux.

MA VIE DE FEMME

Texte proposé pour l’exposition de M. Falgas
« Les Nouveaux territoires » (Argelès-Gazost, janvier 2023)

Ma vraie vie commence, c’est dans mon horoscope,
Où finit, nous dit-on, celle de Cendrillon :
Je suis son égérie, sa muse, son million,…
Alanguie, je n’ai qu’à poser, comme en syncope.

Moins abeille ou fourmi que cigale ou grillon,
je ne pense jamais à demain, à ma place…
Mes jours pareils passent mais jamais ne me lassent.

Ma jeunesse pousse comme blé en sillon
Quand d’autres filles comme moi, hélas, écopent,
Vivant un temps tout en tirets, en apocopes,
En parenthèses,… soumises à un taurillon.

Mais elles sont chrysalides, et moi, papillon :
Tout ce qu’il attend de moi : que je me prélasse.
Je suis son modèle. C’est lui qui me délace…

Mais un jour finiront ces heures où rien n’achoppe.
Je ne serai plus sa princesse, son million,…
Où commença, dit-on, celle de Cendrillon
Ma vie finira… malgré tous les horoscopes.




mercredi 13 mars 2024

HAÏKU APRÈS COUP

Avec le temps, on a de plus en plus pour nous consoler d’être de moins en moins.

VIE NOCTURNE

Texte proposé pour l’exposition de M. Falgas
« Les Nouveaux territoires » (Argelès-Gazost, janvier 2023)

Dessous son enduit de suie la ville, la nuit,
Vibre et vie, jusqu’aux lueurs fanées de l’aurore ;
Empli de baratin, que les néons dorent,
Ce réduit n’est habité que de vain, de bruits,…

Tout y est fortuit, on ne vit qu’aujourd’hui :
Chaque moment, ami, s’appelle « maintenant » ;
Qu’importe la pluie dans ce carême-prenant !

Dessous son enduit de suie la ville, la nuit
Invite en son puits noir Cendrillons badinant
Ne craignent pas minuit et hâbleurs fascinants… 
Tant pis si en son circuit, on se mal conduit !

On ne produit qu’un fruit : la vie en usufruit !
Courte et en artifices, elle va, maintenant
Debout ceux dont le labeur est aliénant.

Dessous son enduit de suie la ville, la nuit
À laquelle s’adosse le marlou et le lieutenant
De police joue aussi, dehors, aux incontinents,
Car la solitude jamais ne s’y ennuie.



lundi 11 mars 2024

HAÏKU D’BOUQUINS

C'est celui qui lit qui est !

LIBERTÉ

Texte proposé pour l’exposition de M. Falgas
« Les Nouveaux territoires » (Argelès-Gazost, janvier 2023)

Nul ne me connaît et personne ne me juge
Je fais ce que je veux quand l’envie m’en prend,
Et mes jeunes printemps, tant pis si ça surprend,
Resteront de folies le plus beau des refuges.

Oui, je me permets tout. Après moi, le déluge !
Je ne m’interdit rien. Je vois, je veux, je prends !
Je fais comme il me plaît et sors souvent du rang.
L’hiver n’est pas pour moi. Tant pis pour le grabuge !

Ça, je te dérange d’être comme je suis.
Je suis étrange car personne je ne suis.
Qu’as-tu à redire ? Et qu’as-tu donc à médire ?

Ne suis jamais soumise et jamais asservie
Et peux te prédire que tu vas me maudire
Mais qu’importe : moi je vis, quand toi tu survis !