Mosaïque de poésies prosaïques & de proses poétiques

parfois sous forme d'aphorismes, de chansons et surtout de fables…

samedi 31 décembre 2011

AU DOUZIÈME HAÏKU DE MINUIT

Aux Guy l'an neuf ;
Aux autres, l'an veuf !

AU PIED DES MONTS

Cycle pyrénéen

Le ciel qu’incendiait le soleil,
Prend soudain un coup de sommeil
Sous le vieux tilleul de l’aïeule.
Le voilà visité de vents
Plus frais parfois, plus froids souvent ;
On dirait qu’il nous fait la gueule.

L’humble semis des cieux se strie,
Aux premières lueurs d’octobre,
De nues flétries, pétries de gris,
Et le beau temps nous la joue sobre
Sur les crêtes, dont se meurtrit
L’éventail, en jetant l’opprobre
Sur des humeurs soudain aigries.

L’horizon, oisive évasion
Hier est, aujourd’hui, conclusion
De jours moins longs que la nuit seule.
Le ciel bas, las, moule les monts
Et obscurcit jusqu’au piémont
D’où ont fuit les foins, balles, meules,…

L’automne atone refroidit
Les arbres dont les bras s’effeuillent,
Brunit les ballons rebondis
Où des tresses d’ombres se cueillent,
 Éteint les vallons reverdis
Où, quoi que l’on dise ou veuille,
Se cache le cèpe blondi.
Et les collines harassées
Comme les monts embarrassés
N’allaiteront plus les étoiles.
Les rideaux emprisonneront
Des fenêtres où un vent poltron
Va, à nouveau, gonfler sa voile.

Au loin, bien des rochers rugueux
S’estompent en franges, en fange.
Je sais plus d’un ruisseau fougueux,
Dont la voix est celle des anges,
S’abreuvant aux chaos fongueux,
Sanglotant sur ce temps qui change,
Cet hiver qui en fait des gueux.

Le ciel de verrier, sans soleil,
Qui nous fit un été vermeil
N’est plus. La pluie, désormais seule,
Va battre à mort les contrevents,
Pleurant comme fille au couvent,
Jusqu’au retour de l’astre veule.

COLLOQUE AD HOC

Petite fable affable

L’animal sauvage est le pire des périls !
Mais le fauve hirsute qui guette nos faiblesses,
Pour nous planter serres ou dents dans le nombril,
Est-il plus dangereux que ceux qu’on tient en laisse ?

Un soir, Bonhomme l’Ours et Compère le Loup,
Ensemble, ourdirent un vrai plan de filous :
Razzier une ferme, de leur forêt voisine,
Où l’on faisait une fort goûteuse cuisine.
Après avoir, sans mal, digéré de concert
Tout le poulailler, ils prirent pour leur dessert
Qui le veau, qui la truie du métayer en fuite
Les assaisonnant, au besoin, de quelques truites.

Repus comme moine en carême, nos larrons
Retournèrent à leurs pénates en lurons,
Leur affaire ayant tout lieu de les satisfaire.
Le hasard leur donna l’occasion de parfaire
Leur forfait car, là, à la croisée des chemins, 
Ils trouvèrent, venant, conduits par un gamin,
Une vache et un porc partant pour quelque foire.
Amis à la mort, à la vie, les bêtes noires
Jouent de la mâchoire. L’enfant piqua des deux.
Mais pas les lourds bestiaux au regard cafardeux.

Nulle menace, nul cri, quoique redoutable,
Ne semblait effrayer ce doux gibier d’étable…
Enfin, la vache dit à son lourd compagnon :
« Je crois bien, mon Ami, que ces deux gros grognons
Ignorent qu’il suffit que je joue les fofolles
Pour que tous les Hommes, d’un seul élan, s’affolent
Et transforment toute leur campagne en charniers
Et brasiers sans oser me manger, résignés ! »

Nos prédateurs n’ont pas vu qu’une poule rousse
Complétait le duo. Et parlant comme on glousse,
Elle ajouta : « Ah, ma Bonne Amie, et moi donc :
Si je tousse, râle ou éternue, tous les joncs,
Tous les troncs, deviennent suspects. Nul ne m’approche :
Les oiseaux ont la paix, finis fusils et broches ;
On fuit jusqu’au duvet que perdent les oisons ! »
- Et quand c’est moi, fit le verrat, ça me fascine :
La moitié du Monde panique et se vaccine ! »

Et nos proies vont, toussant ou sautant, c’est selon,
Sous les yeux des lascars qui ont mal au côlon
En songeant à cette si bonne chère faite,
Tantôt, dans la ferme qu’ils ont si bien défaite !
Sans soupçonner d’avoir été bécassinés,
De peur d’être à leur tour minés, contaminés.
Depuis, ils fuient l’Humain ou son cheptel, et quêtent
Potions et piqûres dès qu’ils croisent une bête !

L'ESPOIR

Faudra arriver, tôt ou tard,
À reprendre forces et courage :
La plage n’est qu’un avatar
Sur ce chemin semé d’orages
Qui, au village, a son ancrage
Et nous mènera sans retard
Là où l’eau n’est pas un mirage.
Là-bas, tu vois, c’est Gibraltar !

Il fallait qu’on boug’ not’ pétard.
Oui, notre vie à l’amarrage,
Qui était pire qu’un mitard,
Sans bagage, prend un virage.
Ailleurs, il y a de l’ouvrage
Pour les sérieux, pas les fêtards :
Ateliers, chantiers, pâturages,…
Là-bas, tu vois, c’est Gibraltar !

Bien sûr, il y eut les racontars,
Les cris, les pleurs de l’entourage,
Les mises en garde des vantards,…
Mais qu’importent larmes et outrages :
Leurs raisons, leur amour, leur rage
Sauront comme est bon le nectar
Qui se cache dans ces parages.
Là-bas, tu vois, c’est Gibraltar !

Ami, c’est fini le cirage
Nous aurons doublons et patards
Parce ce que, tout là-bas, tu vois, c’est Gibraltar !

QUESTIONS ANGOISSÉES D'UN GÉOGRAPHE DÉBOUSSOLÉ

Connaissez-vous les Danche de Châlons (51) ?
Est-il normal de ne pas piffer quelqu’un de Pouant (86) ?
Pommeys (69) est-ce si perdu que cela ?
Doit-on craindre La Baffe (88) ?
Qui a mis St Pantaléon (84) à l’envers ?
Pourquoi veut-on nous faire croire qu’il n’y a ici-bas de Bouchemaine (49) qu’australien ?
Oraison (04), c’est funèbre ?
Est-ce que les prix à Lahosse (40) sont plus élevés qu’ailleurs ?
Lange (38) est-ce divin ?
Qui peut croire que Lagos (64) puisse être la capitale du Nigéria ?

jeudi 29 décembre 2011

HAÏKU DE POING

À temps corrompus, lois sévères !

LE VIEUX SAGE

Cycle pyrénéen
D'après F. Blanche (1921-1974)

Dans le trou d’une verdure apaisée,
Sous le silence de ce ciel tranquille,
Reposant ainsi son âme empesée,
Il médite, seul, sur le temps qui file.
Calme et détendu, le regard au loin,
Au fil de chaque réflexion à naître,
De ses pensées perdues il reste maître,
Immobile, dans le  parfum des foins.
Impassible et droit, peigné à la diable,
Indifférent au léger vent affable,
Au fil de ses idées qui, parfois, se perdent,
Il songe, qu’en ce doux lieu,… il s’emmerde ! 

PLEURER

D’après « Voir un ami pleurer » de J. Brel

Bien sûr, il y a une étoile
Qui, ce soir, s’ombre au ciel si sombre ;
Bien sûr, les larmes se dévoilent
Quand les silences sont en nombre
Et, bien sûr, même sans envie
Il faudra ici demeurer,
Et faire refleurir la vie…
Mais voir un père pleurer !

Bien sûr, on est droit, on fait face.
Au seuil du deuil, on reste digne
Quoi que la Mort veuille ou bien fasse.
On croit encore au moindre signe
Et l’on parle de l’avenir
Bien que l’effroi vienne effleurer
Froid, l’écume des souvenirs…
Mais voir son père pleurer !

Bien sûr, il y a l’espérance
Qui livre un long et vain combat
À l’impuissance, à la souffrance
Et qui, tout autant, vous abat.
Bien sûr, toujours on mord au mors
Alors , qu’en flots, vient affleurer
La lie des regrets, des remords.
Mais voir mon père pleurer !

Bien sûr, nos enfants, eux, nous poussent
Vers l’avant, nous forçent à vivre
Quand le temps, grain à grain, s’émousse
Ou bien court, ivraie devenue ivre.
On redevient tuteur, étai ;
Affaibli, mais prêt à leurrer
 Faisant comme si rien n’était…
Mais voir leur père pleurer !

LE MORDANT DU PETIT MÂTIN

Petite fable affable

Un roi, comme tout homme de bien,
Avait un mâtin pour bon gros chien.
« Mâtin, qu’il est mastif pour son âge ! »
Pensaient sa Cour et son entourage
Qui redoutaient les crocs du mastoc :
Dès mâtines, il avait la dent dure,
Et la phrase qui taille le roc
Qu’il fasse verdure ou bien froidure.

Ce bougre, qui se croyait mâtin,
Aimait briser, casser, en découdre,
Jouant, cabotin, d’un baratin
Qui frappait fort, comme faux et foudre.
Comme il s’acharnait, tel un vrai roquet,
Chacun cachait ses maux, ses hoquets
Par peur de ses mots ou de ses mines,
D’incisives remarques… canines !

Lui se croyait très spirituel
Quand il était simplement cruel,
Méprisant, bas ou bien vulgaire :
Ce qui fait rire vilains et hères
Est toujours bon pour le souverain :
Ces rires lui donnaient le courage
De s’en prendre à toujours plus de reins,
D’y défouler sa hargne et sa rage.

Ce chien, en outre, se pensait beau
Bien qu’il ait une face de fesse ;
Mieux, il jurait, jouant du jabot,
« Jamais ne me lasse de ma laisse ! »
Il oubliait, comme tout nourri,
Qu’il n’aurait pas eu un grain de riz 
À mettre dans l’eau de sa marmite
Sur son seul talent et ses mérites.

Mais il le sentait. Et plus altier,
Il mettait le dentier tout entier
À blesser, ayant acquis l’aisance
Qu’on a à force d’insuffisances.
Avoir des amis, être bien né,
User de facilités pour plaire,
Mènent plus loin qu’avoir dons innés,
Travail parfait ou vie exemplaire.

Mais à peuple déçu, roi déchu.
C’est ce qu’un matin, ce vieux royaume
Connut. Notre mâtin fut fichu.
Il redevint un simple Guillaume,
Remisant ses crocs au râtelier.
Rongeant frein et os, sans nul collier.
Depuis, il mâche d’autres ordures
Que celles qu’aima sa dent si dure…

QUESTIONS ANGOISSÉES D'UN GÉOGRAPHE DÉBOUSSOLÉ

Les fiancées d’Allemant (51) sont-elles toutes tondues ?
Authon (04) connaît-elle la chanson ?
Est-il vrai que seuls les cons servent à Thouars (79) ?
Est-ce que Bossey (14) vaut mieux que Bailleul-aux-Cornailles (62) ?
La Côte d’Or (21) n’est-elle célèbre que pour son chocolat (très) noir ?
Les habitantes du Caire (Egypte) étant plutôt basanées peut-on dire pour autant que les Cairotes sont cuites ?
Peut-on jumeler sans peur La Tremblade (17) et Angoisse (24) ?
Phade (17) mérite-t-elle vraiment son nom ?
Peut-on vivre sur un grand pied à Peuton (53) sans se faire La Tronche (19) ?
Quoi qu'on en dise et quoi qu'on en pense, il n'y a pas de Sarry (19, 71 & 89) ni de Roupy (02) en Indre (36) ?