Édito’ de novembre 2017 pour RuedesFables
Aujourd’hui, avec votre serviable serviteur, dans RuedesFables, point de sauts de cabri puisque « Cabri c’est finiiiii ! » comme le dit la chanson d’un natif du cabri-corne. Pas d’écrivain célèbre à tirer à la chevrotine ou de vieille bique qui me rende chèvre qui serait destiné(e) à devenir, pour un bon mot, parfois gros, mon bouc émissaire. Alors me direz-vous, mi-chèvre mi-chou car il faut savoir ménager l’une comme l’autre de nos jours, la voix chevrotante et l’œil hagard du Nord : comment vas-tu, toi qui n’es pas un chevreau de l’année, avec si peu de matière - grise de préférence - faire un édito’ qui ne sente pas ce bouc que tu portes pourtant si bien taillé ?
Je ne vais pas, céans, sis sur mon séant, ce serait malséant, battre le biquet longtemps pour faire la lumière sur mes intentions, brillante assemblée : aujourd’hui donc, voulant montrer patte blanche plutôt que page de même tonneau, je me mets la corde au cou en lieu et place de la cravate pour causer tout à loisir de… la vache du pauvre. Ce caprin des dieux que l’on maudit souvent, dont on médit parfois d’un mot dit alors qu’elle broute, elle, où elle est attachée sans s’offusquer ni mettre son grain de sel partout. Bêle ou non, prise en chevrette ou pas !
Vous allez enchaîner comme le canard du même nom : pourquoi professer, prof’ fessu, pour l’amie de M. Seguin un tel - et soudain - amour digne de ……………………* ? Par quel sournois cabri-ce ?… Parce qu’elle le veau bien et que ce pauvre animal ne se taille pas la part du lion dans l’étable des fables ?… De quoi je mamelle, vous répondrais-je ?… Non, plus sérieusement, c’est parce que je trouve que la bête à bûche, toute cornue soit-elle, c’est pas du crottin de chat qui miaule, ça Madame. Et pourtant elle est la plus mal lotie de la basse-cour des miracles de nos fabulistes et les lointains prés des apologues les plus célèbres. Soit-elle des Deux-Sèvres. Elle se fait en effet, dans les textes, plus rare que le lièvre, fût-il de Bièvre, cet orfèvre mièvre qui du bout des lèvres - on parle alors de « bec » - avoue avoir la fièvre grâce au genièvre. La chèvre, si j’en crois les plus grands de nos maîtres qui, comme la poule, philosophent affichés dans les vitrines illuminées de votre RuedesFables honorent, est volontiers présentée comme sotte (J. de la Fontaine : Le cochon, la chèvre et le mouton ; La génisse, la chèvre et la brebis en société avec le lion) comme si derrière toute barbe il y a avait un savant qui sommeillait. On trouve notre sautillant quadrupède, tour à tour et de murs en mûres, dans la peau d’un raisonneur (Auguta Cogney : Esprit de chèvre) ou bien de l’irréfléchi (J. de la Fontaine : Le renard & le bouc), voire dans le rôle de l’entêté (J. de la Fontaine : Les deux chèvres)… et prudent comme un sioux (J. de la Fontaine : Le loup, la chèvre et le chevreau). On s’y perd les chèvres comme dit le pire aîné de nos Pyrénées.
Pourtant, et ce site le prouve, cela avait plutôt bien commencé. Ésope, l’aède chevrier, cheville ouvrière du genre, qui consacra à la Belle aux yeux de biche et à la barbe de caribou, qu’a chanté aussi Marc-Louis de Tardy, quelques textes non négligeables, à elle à son mari marri ou à son petit bout de chou : d’un taureau et d’un bouc, le chevrier & les chèvres sauvages, d’un lion & d’une chèvre, d’un chevreau & d’un loup, la chèvre & l’âne… Après lui, le maître - mètre-cinquante - de Château-Thierry, on l’a dit, fort inspiré par la varlope à questionnements - plus qu’à enseignements - de son glorieux aîné… Mais, hors lui, rares ont été les poètes qui ont rendu grâce à sa graisse au poil de cette si peu grasse brouteuse. Certains, les plus courageux, ont associé l’ombrageuse cabri-cieuse qui avec l’agneau à nourrir (Jean-Antoine du Cerceau) qui avec la bête à rosse qu’est le chameau (Daniel Allemand) voire avec le redoutable tigre (Antoine-Louis Lebrun). Et les autres ?
Alors, en nos histoires à bons contes, réhabilitons les caprins de folie même si je n’aime le bouc que teint. Et pardon si, avec un brin de chèvrefeuille pour cacher la nudité de ma petite personne, du genre penseur pansu, et la crudité de mon propos - c’est bien lait tout ça ! - je vous ai fait un fromage de ces chèvres injustement, ou plutôt inégalement chantées par les fabulistes que vous pourrez croiser RuedesFables et ai voulu -éditorialiste c’est un métier ! - faire la chèvre pour attirer dans cette Rue si bien famée quelques uns d’entre vous et quelques autres allumés du verbe.
Mais si, mais non !
Messie, Ménon !
Méchoui, Mainon** !
Et c’est des rats, et c’est des rats,…
Fabuleusement et cabrette-ment vôtre…
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** Rayez la mention inutile.