Mosaïque de poésies prosaïques & de proses poétiques

parfois sous forme d'aphorismes, de chansons et surtout de fables…

samedi 30 juin 2012

IVRESSE

Je bois par habitude
À tous mes châtiments
Et à mes turpitudes

Je bois à leur quiétude
Et à tous les tourments
De notre multitude

Je bois par lassitude
De tous les boniments
De leur sollicitude

Je bois aux certitudes
De mon licenciement
Sans cri ni gratitude

Je bois à l’inquiétude
D’être sans logement
Autre vicissitude

Je bois à leurs études
Sur l’appauvrissement
Vue de leur altitude

Je bois aux servitudes
Et à l’abaissement
À ma décrépitude

vendredi 29 juin 2012

LA FIANCÉE

Cycle toulousain

Oui, pour lui, elle s’est faite belle,
Une rose accrochée au cœur.
Son rendez-vous, c’est sa liqueur
Sa douceur à elle, Annabelle :
Elle est sa mie, sa fiancée ;
Son amour l’a fait avancer.

À mi-voix, elle se raconte
Assise, là, en face de lui,
Qu’il fasse soleil ou bien pluie
Lui dit le rien et ce qui compte,
Elle est sa mie, sa fiancée,
En robe blanche et garancée.

Il n’a pas changé. Elle l’aime.
Du courage il est le portrait
Malgré la douceur de ses traits :
Le corps droit, l’œil fier, la peau blême,…
C’est son homme, son fiancé,
Lui, encore beau, élancé.
Elle est connue de tout le monde.
Elle vient encore et toujours,
Les bons comme les mauvais jours,
Quoi qu’on dise d’elle à la ronde :
Elle est sa mie, sa fiancée,
En robe blanche et garancée.

Enfin, le jour vire casaque.
Elle se lève alors, sans un son,
Passe son doigt fin sur son nom,
En couleur doré, sur la plaque,
Sur la photo du fiancé.
Émaillée. Froide. Faïencée.

Et puis, comme à son habitude,
Sans larmes mais non sans douleur,
Là, lui abandonne sa fleur
Et retourne à sa solitude,
Elle, éternelle fiancée
Que son amour fait avancer.

jeudi 28 juin 2012

À CE CATALAN QUE LES HOMMES FIRENT ESPAGNOL…

Cycle historique

Ici ma mémoire et mon âme sont enclines
À saluer la mort des inconnus majeurs,
Qui face aux bourrasques ne plient ou ne s’inclinent :
Venus pour échapper, un jour, aux égorgeurs,
À la colère des tonnerres ravageurs
Et devenus, chez nous, des héros anonymes
Dont on a oublié jusqu’au vrai patronyme ;
Cherchant l’égide de notre hospitalité
Ils ont défendu les valeurs qui nous animent
Et notre honneur, malgré toutes nos lâchetés…

Toi, tu ne fus, au grand jamais, pusillanime.
Tu as pris les armes pour cette liberté
Qu’à défendre nous ne fûmes pas unanimes.
Comme tu fis, chez toi, pour cette dignité
Que te refusait un pouvoir de fer ganté,
Qui t’a acculé à reculer en montagne.
 La peur et l’ombre.Puis tu dus fuir le bagne
Promis à tout perdant devenu impuissant
Dans le combat mené face aux cris, à la hargne
Des loups et des corbeaux jamais repus de sang.


Mais la folie furieuse ignore les montagnes,
Qui n’arrêtent pas ses brandons incandescents :
Un vent fou les poussa plus loin que ta Cerdagne.
Nous t’avons interné, à Pâques fleurissant,
Puis on t’envoya, Toi, le désobéissant,
Écorcher ton temps loin de la Place Dauphine,
Chez les agonisants, ceux qu’alors on confine
Face à ces fours qui vont consumer leur sursis,
Mêlant la mort aux vents, en poussière si fine.
La Faucheuse, pour Toi, n’en voulut pas ainsi.

L’instinct, à côtoyer la Camarde, s’affine :
Miradors, barbelés, chiens et même glacis
N’ont pas pu empêcher ta fuite séraphine…
Tu repris le flambeau, dès ton retour ici,
Jusqu’à ce que notre ciel soit désobscurci.
Si le soleil revient toujours après l’orage,
Pour qu’on n’oublie pas ces outrages, ni la rage
Qui livra des cendres aux souffles rugissants,
Tes yeux délavés nous rappelaient le Courage,
Gardiens du souvenir, du sang et des absents…

L’humaine mémoire fait si souvent naufrage…
Certains oublièrent, en nos temps vieillissants,
Que l’Homme est pire que le loup quand il enrage,
Et que l’on fait saints des assassins indécents,
Eux qui, de leurs crimes, ne sont pas rougissants.
Quand tu t’en confiais, en plissant les paupières,
Ta voix si rocailleuse, où s’enroulaient des pierres,
Se fissurait d’avoir battu ces chemins-là
Sans avoir rencontré l’ombre du grand Saint-Pierre…
Vinrent d’autres combats. Toujours là. Jamais las.

Sur Toi, désormais, pèse une pesante pierre.
Une flamme fière et droite, sur ce toit-là,
Rappelle ta foi et ton combat, ces croupières
Qu’aux ayatollah de Loyola tu taillas,
Comme aux bruns séides d’un fat maréchalat.
Que cette pierre sur laquelle je m’incline,
Mémoire immobile d’un passé qui décline,
Soit la première de ce combat ravageur
Qui couve, en notre temps, où la Peste est encline
À revenir hanter nos jours, l’esprit vengeur…

mercredi 27 juin 2012

INDIGNE-TOI

Regarde, entends et bouge,
Oui, dès que tu vois rouge !
Si la parole est vouge
Fais-en toi une gouge :
Si tu es indigné
Suffit pas de signer,
Il faut que tu proposes
Que tu penses et oses :
Vois, écoute et puis fais ;
Fais, défais et refais.

Ici, Demain s’invente
Dans une foi fervente.
Oui, ce monde se meurt
D’habitudes, de peurs,…
Regarde, entends et bouge,
Oui, dès que tu vois rouge !
Si la parole est vouge
Fais-en toi une gouge !
C’est pour quand le bonheur ?
Les principes vainqueurs  ?
Tout est achats et ventes
Et nos valeurs s’éventent.

La vie est un combat
Quand on est né en bas,
Alors bats-toi, mon Frère !
Comme l’ont fait tes pères,
Fais résonner ta voix,
Remets tout sur la voie !
Regarde, entends et bouge,
Oui, dès que tu vois rouge !
Si la parole est vouge
Fais-en toi une gouge !

Vois, écoute et puis fais ;
Fais, défais et refais.
Il faut que tu proposes
Que tu penses et oses :

Puisqu’ils ont mis à bas
Un homme bon qu’au bât,
De craintes en misères,
Il nous faut changer d’ère,
Jeter qui nous fourvoie ;
Qu’jamais on n’les revoit !
Regarde, entends et bouge,
Oui, dès que tu vois rouge !
Si la parole est vouge
Fais-en toi une gouge !
Indigne-toi, regarde
Et puis, surtout, prends garde…

mardi 26 juin 2012

DES US QUI M'USENT

Si rois et cour sont morts, restent les courtisans.
Calculateurs sournois, c’est le plat de la langue
Qui fait leur fortune et leur talent de faisan.

Ces chasseurs de regards, toujours là, partisans,
Ont faim d’honneurs, soif de faveurs, trouvant harangue
À faire que ce soit calme ou que cela tangue.
Ils font leur fortune de mots en médisant.

Ces traqueurs de hasards, qui vont tout méprisant,
N’ont pas le scrupule ni l’honneur comme gangue :
S’ils sont caressants c’est qu’ils se veulent blousants.

 Assauts de courtoisie ou quolibets frisant
Le mouton tondu, ils ne sont jamais exsangues :
Tout, partout et toujours, leur est miel, leur est mangue !
Courtiers en amitiés, règnent les courtisans.

lundi 25 juin 2012

AMOURS MANUSCRITES

En comptant sur les doigts mes pieds mal assurés,
Au feuillet, je confie de ton corps quelques lignes,
Décris, de billets pliés en plis susurrés,
Le vélin de ton ventre, écrin de mes écrits.
Tes parchemins secrets parcourt ma plume insigne.
Puis, sur nos délices déliées, elle glisse
Évoquant l’envol d’une parole, d’un cri,…
Pour mourir sur ta peau au teint, au grain si lisse.
Je grave au vent ton nom et, sans fin, je l’inscris
Sur le sable d’un temps d’où les maux sont proscrits…

Plumitif hâtif,  oui, j’aime à châtier ma langue
Pour transcrire de ton corps les ponctuations
Et préfère au papier glacé des harangues,
Ces courbes où je puise, en troublantes confessions,
Mes jeux d’écriture sans rime ni raison.
J’y compose en prose notre carte du Tendre
Y note, au carnet d’un voyage en déraison,
Ces tendres transports qui ne savent pas attendre,
Récitant par cœur les milles déclinaisons
De mon inclination, sans vraie terminaison…

dimanche 24 juin 2012

OUVERTURE

La meute bien dressée aux aguets, à l’arrêt,…

On bat la campagne pour se faire la caille,
Ou bien la bécasse sans le moindre regret.
Nous, on court le lièvre lâché dans les guérets,
Dégomme le faisan quoi qu’il vaille, où qu’il aille.
Certains laisseront des plumes dans la forêt,
D’autres mordront poussière ou boue comme racaille !

Front et menton bien hauts on va à la bataille ;
Ni répit, ni repos par les vaux, sur les crêts.
Et tant pis si trinquent rats, blaireaux et furets :
Dans la broussaille, il ne faut pas que l’on détaille !
Si tu n’as de plomb dans la tête, Dubéret,
Tu en auras plein les fesses, alors : Mitraille !

Gare aux balles perdues, ce n’est pas un secret,
Elles ne le seront pas pour tous. Officielle,
L’ouverture c’est pour aujourd’hui. Je suis prêt
Aux tirs de barrage et aux salves torrentielles.

J’userai d’appeaux, de rabatteurs bien proprets.
Sans poser de lapins, gibecières plurielles,
Chaque coup doit porter, concret et sans apprêt
Car, crois-moi, c’est plus qu’un sport, la Présidentielle !

La meute bien dressée aux aguets, à l’arrêt,…