Mosaïque de poésies prosaïques & de proses poétiques

parfois sous forme d'aphorismes, de chansons et surtout de fables…

mardi 31 janvier 2012

HAÏKU'R DE L'AVIS

Enfant, les autres se donnent à nous ;
Jeune, on s’abandonne aux autres ;
Vieux, on ne s’adonne qu’à soi !

QUESTIONS ANGOISSÉES D'UN GÉOGRAPHE DÉBOUSSOLÉ

Champfleury (10) mérite bien son nom ?
Que penser de quelqu'un qui dirait vivre à Loge-aux-Chèvres (10) ?
Tannières (02) est-ce un trou ?
Est-ce une ville belle Assier (46) ?
À Lacoste (34), joue-t-on au polo ?
Peut-on jumeler Croix (59) et Corent (63) sans risque ?
Saint-Barbant (87) c'est pas rasoir ?
Sancoins (18) est-ce une appellation locale de Cercles (24) ?
Soucy (02) n'est pas Plaisir (78) ?
Paris (75) vaut bien Maisse (91) ?

PANNE DES SENS

 Sous ton empire
L’air alourdi ronronne,
La nuit expire.
Dehors, la rue ronchonne :
Le jour transpire
Depuis une heure
Et le ciel pleure
Perle, s’égoutte,
Cisèle, sculpte et ride
De mille gouttes
Des yeux pluvieux ou vides ;
Les nues dégouttent,
Noyant des rires,
Ardant des ires.
La ville fume
Sous la pluie traversière.
Robe de brume
Pour l’ondée tracassière,
Ourlée d’écume,
Qui lèche-vitrines,
Bruit et crachine.
Dans notre chambre,
Où le jour tue les ombres
De reflets d’ambre,
À nouveau mes sens sombrent
Quand tu te cambres…
Et l’eau rigole
Et dégringole…
Ça chute et darde,
Le caniveau rend gorge ;
Ça hallebarde,
Rues et ruisseaux dégorgent…
Bruine et bombardes
Trempent et rincent
 Manants et princes
Qui s’effarouchent :
Au passage, l’orage 
S’épanche et douche,
Pas sage, dans sa rage,
Burnous, babouches…
L’humeur humide
Des cieux numides !
Le grain agresse.
Il abreuve l’asphalte
Jusqu’à l’ivresse.
Quatre ou deux roues sulfatent.
Larmoient en liesse
Des pépins flasques.
Il pleut des flaques.
C’est un déluge
Qui, dès lors, se déclenche ;
Point de refuge
Quand les nues avalanchent
Jusqu’au grabuge…
Pluie cristalline,
Sauce argentine.
Il pleut des mares.
Mon corps, encor’ navire,
S’abîme au tintamarre…
L’accord accort chavire.
L’âme à l’amarre,
Le cœur en grève
S’échoue… La trêve ?
Soupe servile,
L’averse verse à vide,
Lave la ville
Et se déverse, avide,
En trombes viles…
Laissons là l’ire
À son délire !

LA MÉSANGE BLEUE

Petite fable affable

Une mésange bien éduquée
Ne mangeait que ce qui lui manquait.
Quand vinrent les frimas et la bise
Ce ne fut plus à sa seule guise
Qu’elle becquetait par cours et prés.
Face au cousin au cou empourpré,
À sa sœur charbonnière ou au merle,
À l’heure où un grain vaut une perle,
La pauvre ne faisant pas le poids
Ne leur disputait miettes ni pois.


Refusant problèmes ou querelles
Et la compagnie des tourterelles,
Elle ne volait jamais de biens,
Donc, se nourrissait de presque rien.
Quand elle trouvait un quelque chose,
Elle piaulait, en vers et en prose,
Pour savoir si ce n’appartenait
Pas à un voisin qui y tenait.
Las, il se trouvait, la paix dans l’âme,
Quelqu’un pour en faire la réclame !


Se refusant à prendre ou glaner,
À grappiller comme à chicaner,
Notre oiselle n’était pas bien grasse,
Au contraire d’autres de sa race.
De peur de flouer ou de léser,
Elle n’emportait rien qui pesait
Quand d’autres chipent, chopent et tchapent
Sans vergogne tout ce qui se happe.
Et, sautant ainsi plus d’un repas,
Elle connut un rapide trépas.


Juvénal jadis dit, en penseur sûr et fin :
« On loue l’honnêteté mais elle meurt de faim ».



NIPPON NIGHTMARE

  Lolita de fiesta toute d’énergie et de lassitude échappée de la solitude d’un manga en synergie, tu ressembles à ces photons couleurs des filles en douleur du Mont Fuji. Effigie du Japon d’aujourd’hui, fat et fin, tu es, ma foi, mi-gothique mi-aristocratique, sorte de proton fou lancé entre le rêve dont on ne veut pas et le cauchemar dont on ne sort plus, entre une brève réalité que l’on ne fuit pas et l’excentricité d’un dandysme que l’on ne fait plus.
Radieuse cosplay assourdie de bruit et nimbée de douceur ou rayonnant fruit aux mariages de couleurs hardies, tu es toujours aussi réactive dans un univers ping pong, pink punk, aux relents industriels, oscillant entre un monde cyber et l’horreur immonde, en fusion avec ton temps si court et si incertain. Particule élémentaire dilettante ou poussière acnéique délétère, te voilà gravure de mode et petite fille modèle des ados bêtas, devenus X à force de vouloir être uniques,  d’un Occident oxydé qui, quanta lui, se noie dans sa nausée à force d’avoir les mains sales.
Là est l’absurde et le quark. Brûlante d’effroi, Decora qui fait tâche au décor, électron libre qui veut vivre entre fission et fiction, arrière-petite fille d’Hiroshima, fille de Fukushima, je t’admire et te plains. Toi qui enlaces le feu d’une vie désormais presque éteinte, ce don fait anguille aux teintes de céladon, comme une molécule ronde tu t’enflammes, telle une bille ou une onde partie en vrille : ta réalité, ma Belle sans vague à l’âme, dépasse l’affliction la plus cruelle !

dimanche 29 janvier 2012

HAÏKU DE CŒUR

La gratitude est le fait des cœurs nobles & le faix des esprits ignobles !

D'UN CERTAIN VAL…

Petite fable affable

Un rat, chevalier d’impertinence,
 Loin en amont, dans un certain val,
Se fit, au riant pays des Chats,
Trublion tout plein de pertinence.
Rosse et mauvais cheval sans rival,
Il blâmait jusqu’au chat Grand Pacha.
On ne trouvait que quolibets, piques
Dans ses dires, ses écrits - Frissons ! -
Ce n’étaient que drôles philippiques
Que ses contes, fables et chansons.

Et nul ne pouvait le faire taire
Car point de peur chez ce détracteur.
Sa fronde s’appelait “comment taire…”,
Loin en amont, dans ce petit val !
De critiques, il était amateur :
Chaque jour était un festival
De bon mots. Or, ces coups de semonce
Et ses diatribes, sans répit
Sapaient tout, quelque mot qu’on prononce.
Pour les chats censeurs, que de dépit !

Pour le réduire enfin au silence,
Notre pacha en fit le patron
De sa communication, science
Où plus d’un chat jouait du plastron.
Celui qui pouvait tout se permettre
Se renia, au fond de son val,
Devint docile jusqu’au crémeux,
Serviteur servile de son maître,
Chef ferme et fermé, très à cheval…
Donc si tu veux soumettre, promeus !

QUESTIONS ANGOISSÉES D'UN GÉOGRAPHE DÉBOUSSOLÉ

Biche-t-on à Villafans (70) ?
L’air de Vessey (50) est-il respirable ?
Se fait-on plus de mauvais sang à Vesseaux (07) ou à Veynes (05) ?
Viabon (28) Banania ?
Traverser Veyrières (15) n’est-ce pas un peu dangereux ?
N’est-on pas trop attaché à Ventouse (16) ?
Que sont devenus les amants de Véronne (26) ?
Faut-il se mettre Auvers-sur-Oise (95) ?
A-t-on plus de chance à Verny (57) qu’à Guignes (77) ?
Y a-t-t-il une colonne à Vendome (41) ?

L'OISEAU EN CAGE

Sa plume prend la prose
Ou bien elle compose
D’étranges passeroses
Sans la moindre ankylose 
Des vers gris des vers roses
Selon l’humeur sa dose
De peurs de sinistrose
Bref elle s’impose
S’oppose s’interpose
Du moins je le suppose
Sa plume prend la prose
Elle se lance elle ose
Et dispose et dépose
Des machins et des choses
Espère le grandiose
Et comme sous hypnose
Elle cause elle glose
Propose ou indispose
Sans pause ni sclérose
Du moins je le suppose
Sa plume prend la prose
Badine ou bien morose
Elle rit elle arrose
Jusqu’aux portes forcloses
Elle explose elle s’expose
Et mord ou ecchymose
Les psychoses la gnose
Puis jongle en virtuose
Cherchant l’apothéose
Du moins elle suppose

VACHERIE, LA MACHINE RIT !

La vie ! Drôle d’engin, vraiment ?…
Cette machine est sûrement,
Tendrement ou méchantement,
Le dur rouage d’événements,
Enchaînant tourbillonnements,
Rires et tiraillements,
De naissances en testaments.
Tranquillement. Tragiquement.
Tournent, lentement, vainement,
Tristement mais résolument,
Ses roues rouées : peines, tourments,
Soucis, peurs et pleurs d’un moment,…
Usinant, usant, simplement,
Sèchement et sévèrement,
Jusqu’au joint,  joies, amusement,
Fraisant plaisir, soulagements,…

Des roues dentées - Pourquoi ? Comment ? -
Ses courroies de cuir, sottement,
Amènent crûment, rondement, 
Ronronnement, roucoulements,
- « Mécanique des sentiments ! » -
 Puis rudiments du rudoiement ;
Mettent en  pièces, savamment.
Tiédeur. Froideur. Rugissements.
Automatisme ou grincements,
Les ressorts du ressentiment
Masques et travestissements,
Conduisent aux écrous sûrement,
Aux errements, aux serrements,
Bien qu’on ait fait mille serments
En supplément. Sincèrement.
Solidement… Stérilement. 

La vie est bielles pour qui ment,
Simple assemblage seulement,
- Pignons et tout le tremblement -
Balanciers et balancements.
Pour les autres, si sottement
Programmés pour aimer gaiement,
Reste l’essieu pour pleurer, M’man.
Ruissellement… Débordements…
Laminés triomphalement,
Leur compteur, moteur et aimants
Tourne jusqu’au tarissement.
Reniements et renoncement.
Revirements. Retournements.
Ressassements. Ressentiments.
Sournoisement et sourdement.
La vie ? Drôle d’engin, vraiment !