Mosaïque de poésies prosaïques & de proses poétiques

parfois sous forme d'aphorismes, de chansons et surtout de fables…

mardi 29 novembre 2011

HAÏKU'RIR DE MALCHANCE

Il est des gens qui vivent auprès d’une mer Morte
et ont un père grabataire !

CELLES QUI SCELLENT

Ses yeux hostiles, sa bouche close nous taisent
Une histoire qui n’est pas une parenthèse :
Par-delà les collines dressées vers le ciel,
Au-delà de la plaine chaude et frémissante,
Était un doux vallon au frais parfum de miel.
Là, à l’ombre d’une frondaison buissonnante
Se nichait, tendrement cachée, une maison
Qu’elle aimait à ouvrir à la belle saison.

Mais des fous sont venus, par une nuit de cendre,
Ont labouré le val et, sans rien condescndre,
Piétiné les fourrés, dévasté la maison
Où, à foison, ils ont répandu leur poison.

Ils ont laissé derrière eux l’âcre odeur du fiel
Qui a pétrifié son âme, hier rayonnante.
Et par-delà les monts écrasés par le ciel,
Au-delà d’une plaine froide et frissonnante,
N’est plus, tapie dans les ombres, qu’une prison
Qui mure ses lèvres et enferme sa raison.
Ses yeux hostiles, sa bouche close nous taisent
Une histoire qui n’est pas une parenthèse.

MIRAGE ÉPHÉMÈRE

Il est inconstant comme le vent,
Ravit l’œil du passant qui l’avise
Pourtant, changeant comme le temps,
Flouer est son blason, sa devise.
Car il badine pour butiner,
Puis il s’égaille pour lutiner
 Plus loin, en voyageur versatile,
Vaguant entre futile et utile.

Volant, volage, de cœur en cœur
Comme un papillon de fleur en fleur,
L’amour n’est donc qu’une girouette,
Tout en volte-face et pirouettes.

Chatoyant comme une aile irisée
Et ondoyant pour mieux vous griser
C’est une illusion au charme habile 
Qui désarme tant il est labile.
Il orne la saison des passions,
Sans intention, tout plein d’attentions,
Puis, comme il est venu, il s’efface
Quoi que l’on veuille, quoi que l’on fasse…

Volant, volage, de cœur en cœur
Comme un papillon de fleur en fleur,
L’amour n’est donc qu’une girouette,
Tout en volte-face et pirouettes.


Illustration : Élisa Satgé, été 2019

QUESTIONS ANGOISSÉES D'UN GÉOGRAPHE DÉBOUSSOLÉ

Istres (13) n’est-elle peuplée que d’histrions ?
L’herbe est-elle plus verte à Pelouse (48) ?
Y a-t-il une prison à Cellule (63) ?
Pourquoi le théâtre de Molières (46) est-il si connu ?
Les amis de Camarade (09) sont-ils nos copains ?
Reverens (30) vaut-elle mieux que Courbette (39) ?
Vaut-il mieux aller de Cabanes (81) à Maisons (14), ou l’inverse ?!
Pomme de Pruniers (36) vaut-elle mieux que prune à Pommiers (02) ?
Les aiguilles de Tricot (60) servent-elles pour Laines-aux-Bois (10) ?
On sait des devins de Bordeaux (33). On connaît des savants de Marseille (13). Mais qu’en est-il vraiment des ingénieurs à Grenoble (38) ?

HAIS CONFIANCE !

Petite fable affable


Il n’est rien de plus bête et impitoyable
Que le monde des bestioles, incroyables
Prédateurs et, pire, perfides félons,
Quelle que soit leur taille ou leur échelon…

Une chenille avait élu domicile
Dans une vieille chambre où tenaient concile
Une mouche, un cafard et une araignée.
On ne peut être plus mal accompagné !
La tétaranhe avait une faim canine ;
Tout en matoiserie, les autres espionnaient 
Et dénonçaient qui hantait la mezzanine
À la tisseuse qui en collationnait.
Que ne ferait-on pas pour avoir la vie sauve ?!
La chenille enflait - Ah, tentante guimauve ! -
S’en vantait ; un bavard conte ce qu’il faut
Dire et ce qu’il vaut mieux taire. Quel gros défaut !
Avant qu’elle s’encoconne comme évêque,
La velue au gosier altéré la becque…
« Ah, si jeunesse savait… », même à demi,
Elle se méfierait de certains amis.


*
*     *


D’aucuns m’ont aussi conté une autre fable
Qui nous montre qu’il n’est pas plus agréable,
Quand on n’est plus nourrisson au mamelon,
De passer à la casserole ou au poêlon…


Pour un papillon la vie est difficile,
Quand ses jours touchent au couchant codicille.
Voulant sauver ses quelques maigres deniers
Pour des enfants qu’il savait tous chicaniers,
L’un d’eux les confie à la pie qui rapine
Jour et nuit après avoir bien bedonné
Dans la Banque. C’est moins usant qu’à la mine !
Comptant son temps, se sachant prêt à canner,
L’insecte abandonne aussi au corbeau chauve
Son âme qui était moins noire que mauve.
Les deux oiseaux furent pire que gerfauts :
Bien mieux que la Camarde abattant sa faux,
Ils se partagèrent, à titre d’hypothèque,
Son corps encore vif comme une pastèque…
« Ah, si vieillesse pouvait… », même à demi,
À personne, elle ne se confierait mie.

dimanche 27 novembre 2011

HAÏKU DE CRAYON

Bien des gens gravent sur marbre le mal qu'on leur cause
mais esquissent sur feuille volante le bien qu'on leur fait !

POUR LA GOUVERNE DES FOURMIS

Petite fable affable
Plus excité que puce et plus méchant que teigne,
Frère Pou s’invita chez ses amies fourmis.
Se voyant au-dessus bien plutôt que parmi,
Se faisant plus piquant que bogue de châtaigne,
Il s’imposa à elles et, tout haut, leur promit
De réformer leur vie afin donc qu’elles atteignent
Performances et succès, de peur qu’elles s’éteignent ;
Puis jeta l’interdit, décréta le permis.
Notre parasite, malgré son allégeance
Aux règles ancestrales qui guident les fourmis
Et à leur souveraine à qui il se soumit,
Fit sa révolution en toute diligence,
Régentant va-et-vient, traquant les insoumis,
Façonnant son monde sans la moindre indulgence :
Réclusion, expulsion, répression pour l’engeance ;
Culte à sa personne pour les âmes endormies ;…

La police en nervi servit cette Régence
Pliant la populace aux appétits du pou :
La grouillante cité n’avait plus d’autre pouls !
Pourtant aux yeux des gueux, il commit négligence
Quand, de l’auguste reine, il se voulut l’époux…
Au regard de leurs mœurs, quelle inintelligence !
Il y eut branle aussi pour bien d’autres exigences…
Rien ne sut, ne vit ni ne comprit notre pou
Quand les manants, proscrits, mirent fin à sa messe.
Saoulé par sa gloire, ô délice de Capoue,
Il négligea ce feu qu’il aspergea - le pou ! -
Avec une rosée de ces vaines promesses
Engageant qui les croit, de l’idiot au Papou.
D’une patte aux fesses s’acheva la kermesse :
Adieu les déraisons, terminées les grand-messes.
On reprit donc en main son destin… Fi du pou !
Gardons-nous des bêtes qui flattent les nations,
Sécurisent leur vie avec ostentation,… 
Saigner qui la supporte est leur seule ambition ;
Régner en seul maître, leur trop vraie tentation !

SURFER, C'EST SURFAIT !

  Leur planche de salut pour la pêche à la morue, celle qui n’a rien dans le chou et encore moins de dessous, ils l’ont en main. Avec ce faix, ce bienfait parfait, ce sésame qui fait de l’effet, l’affaire est dans le sac… et le ressac. De toute façon, c’est un fait, les vagues sont toujours “trop” et les rouleaux jamais “assez”, alors, ils restent sur la plage pour commettre leurs méfaits.
  C’est donc l’errance au cœur des apparences pour ces coqs sans clocher, attifés comme des paons, branchés et brushés, encore à l’âge d’être mouchés. Ils font la grève pour traquer leurs proies à l’étal, loucher sans se faire doucher, bêcher les thons et dire leur fait aux planches à pain. C’est du surf, le gros du turf dans ce rucher pour riches débauchés, ce bûcher pour biches débâchées.
   Ainsi ces fauchés, aussi aisément défaits que refaits, doivent paraître pour être, nicher et plancher pour chevaucher… et s’empanacher de ce forfait !

ENFANCE EN SOUFFRANCE

Parc’ que m’a voulu noire un dieu ou la nature
Mon peuple n’a pas d’Histoire et moi de papiers
Je n’ai droit qu’aux insultes aux mots qui dénaturent
À voler ou à mendier et aller nu-pieds

Je n’ai qu’un squat ou une tôle pour toiture
Et je m’épuise d’être par leur traque épié
Et souffre d’être par leur matraque estropié
Parc’ que m’a voulu noire un dieu ou la nature

Poubelles à faire ou à vider j’irai expier
Demain les racines de mon autre culture
À moins que d’un trait un obscur gratte-papier
Ne m’envoie quémander ailleurs ma nourriture
Parc’ que m’a voulu noire un dieu ou la nature 

QUESTIONS ANGOISSÉES D'UN GÉOGRAPHE DÉBOUSSOLÉ

Chercher Crosses (18) à Toutlemonde (49) n’est-ce pas un peu idiot ?
Peut-on croire quelqu’un qui se dit issu de Rosières (43) ?
Si Ibos (65) s’apellait Chaum (31) aurait-elle un « Pôle Emploi » ?
Une vache à Vaux (19) vaut-elle mieux qu’un agneau de Mouton (16) ?
Qu’ont-il de plus ces fameux « caleçons d’Aix (13) » ?
Est-il vrai que la Creuse (23) est un pays bosselé de plateaux et de collines ?
Les manchots sont-ils tous originaires de la Manche (50) ?
Y a-t-il plus de jeunes à Villevielle (04) que de vieux à Villeneuve (09)
Est-ce un signe de pauvreté que d’habiter Job (63), cité presque entièrement reboisée à l’aide de petits boulots ?
Côté habitant, risque-t-on de perdre le dernier de Cult (70) ?

vendredi 25 novembre 2011

HAÏKU D'ÉTAT

Réforme des retraites aidant,
on cessera de gagner sa vie quand on la perdra !

LE PUMA ÉDENTÉ

Petite fable affable

Aux vagues confins latinos

De l’altiplano andino,
Un vieux puma blanchi, végète
Comme une bête qu’on rejette
Parce qu’elle ne tient plus son rang.
Or, notre animal était grand
Fauve et le roi en sa province.
Mais voilà qu’avec l’âge, il grince.
Griffes limées et dents rognées,
Il a du prendre un associé,
Un condor aux serres tranchantes,
Le bec retors, la vue méchante.
La faim justifie les moyens !
C’est pis-aller pour le doyen ;
L’autre buse lui chante pouilles
Et, malgré cette collusion,
Rêve de bâfrer sa dépouille…
Bien qu’elle ait peur des contusions.
Si, pour l’heure, elle s’agenouille
Quand, enfin, viendra l’occasion,
Quand manqueront les provisions…
En attendant, on s’accommode,
Même si ce n’est pas de mode.
Et nos alliés ont du pot : 
Le puma lève ; son suppôt
Course la proie. Dans une gorge
Poussée, elle est, comme orge,
Broyée par une grosse roche
Jetée par le fauve tout proche.
Les deux lascars, à l’unisson,
Toujours, se font bonne moisson.
Repus de repas, de repos,
Ils ont les os loin de la peau !
Vint le temps de sucer des pierres.
L’emplumé voulut mettre en bière
Le fauve, un jour qu’il sommeillait
D’un œil. L’autre, d’un coup de patte
Le cloua au sol comme une blatte.
« Tu te goures !… » a-t-il bredouillé,
Babillant des excuses plates.
Le puma dut le zigouiller
D’un coup de caillou écaillé.
Des quidams de la pire espèce,
Parce qu’ils volent plus haut que vous,
Vous toisent, et jamais, n’avouent
Qu’ils vous prennent pour cons ou fèces.
Sachez les laisser venir
Pour mieux les circonvenir.

L'ABSENTE

D’après « L'absent » de G. Bécaud & L. Amade

Qu'elle est lourde à porter l'absence de l'Aimée,
L'Aimée qui tous les jours était en bout de table,
Qui ne sourira plus, la vie est vulnérable,
Quand poignarde le Mal qui vient vous abîmer.

Oui, elle était mes jours, mes joies et mon  bonheur,
Ma raison de vivre sur cette vieille Terre
Qui n’est pas qu’arcs-en-ciel ou fleurs bleues en parterres,
Faisant, et ma force, et ma faiblesse, à tout heur.

Et moi, je reste là, parlant d’elle au passé,
Sentant là son parfum, guettant ici son ombre,
Et j'écoute le temps ajouter un grand nombre
D’heures privées de sens qui viennent m’enchâsser.

Oui, mes jours se vident en mots heurtant les murs,
 En pas perdus, regards hagards, sans sa présence ;
Dans la maison trop grande où, seul mon corps avance,
De remords en regrets, sans espoir d’un futur,

Ayant le froid d’un lit, cherchant en vain sa main
Pour se retrouver, las, dans un long tête-à-tête,
Insupportable, à table, avec sa propre assiette
Matin, midi, soir et… recommencer demain.

Qu'elle est lourde à porter l'absence de l'Aimée
Qu'elle est lourde à porter l'absence de l'Aimée !