Mosaïque de poésies prosaïques & de proses poétiques

parfois sous forme d'aphorismes, de chansons et surtout de fables…

vendredi 31 décembre 2021

HAÏKU DE FEU

Essayer de « mettre du plomb dans la cervelle » de notre belle jeunesse n'est point aisé… à moins d'être un snipper !

L’ÉPI LÉGER & LE LOURD

Petite fable affable librement inspiré de
Les deux épis d’A.-F. Le Bailly, Fables nouvelles divisées en
 quatre livres et faisant suite au volume publié en 1811, 1823 (I, 14)

À quelque temps de la moisson, deux épis
Se côtoyaient dans un champ de céréales
Lesquelles 7 Peu nous importe ici. Ils pépient,
Sous un ciel aux tendresses idéales.

L’un, sous le poids de sa manne, tout courbé,
Semble prier Cérès et sa Proserpine,
Mais l’autre porte sa tête haut, et bée.
Il lui manque un grain et - cruelle épine -
Même un peu plus, dit-on, en cette assemblée
Où voisinent et cousinent tant de blés.

Et il tient, à peu près, ce langage
À notre pénitent : « Pourquoi te casser
Ainsi le col, soumis et modeste, on gage
Que tu portes tout le malheur d’un monde lassé !

- Ma posture n’est point fruit d’une austère
Dévotion, d’une insondable plaie
Laissée béante ou de quelque chapelet
De malheurs, ni d’une imposture à te taire…

- Laisse-toi aller et bercer par les vents !…
Laisse-toi porter par le temps dès le levant !

- Je ne le peux pas car, vois-tu, j’ai la tête,
Moi, l’Ami, aussi bien pleine que faite,
Et cela, las, oblige, à la vérité,
Plus à l’humilité qu’à la volupté.
Donc point de salut hors la gravité
L’abnégation, la simplicité ! »

mercredi 29 décembre 2021

APRÈS HAÏKU

On parle d’ « outrages du temps » quand vous êtes d’un autre âge que « votre Temps ».

L’OISEAU SILENCIEUX

Petite fable affable

Ce rossignol-là ne chantait point, Mes Amis.
Honteux de sa voix ou très pudique peut-être,
Me direz-vous ? Non pas !… Il craignait, las, cet être,
De se susciter, chez ses pairs, des ennemis
Ou d’encourir la jalousie d’autres porteurs d’ailes…
Qui ouït paon, faisan, ou même Dame pie
Comprendra ce que je veux dire. Quel dépit 
Que mélodistes sans talent ayant du zèle !

Il se taisait, le jour, pour ne point déranger
Et se cachait la nuit de peur que l’on cause,
Dans les verts halliers, de qui dérogeait
À son espèce, incapable de vers, de prose,…
« Philomèle je t’ai nommé ; et chanteur tu es !
Fit Jupin, fort irrité comme on le présume.
Sache, pour ta gouverne, qu’un nom, ça s’assume :
Sans orgueil ni réserve, sois toi plutôt que muet ! »

mardi 28 décembre 2021

lundi 27 décembre 2021

HAÏKU AU PALPITANT

Un bourreau de travail  n’ayant pas le temps d’être aussi celui des cœurs, j’ai choisi mon camp !


L’ESTHÉTIQUE DES BOURRIQUES*

Petite fable affable

Deux ânes, lassés de leurs verts prés,
Décidèrent de tailler la route
Pour aller voir ailleurs, on s’en doute,
Si l’herbe y était plus à leur gré.
Ces grisons, harassés par les sentes
Qu’ils parcouraient lors, philosophaient :
Ça vous pousse un peu dans les descentes
Et, en montées, vous aide en effet…

Tous deux causaient donc de leur famille
Et des cieux qui la condamnaient,
Quand ballots et balourds tant fourmillent,
À passer pour “bâtée”, en damnée :
« Le zèbre, sot qui n’est point monture,
Pourrait quelque peu justifier
Cette si stupide conjecture…

- On ne peut aux Sauvages se fier !
Donc l’onagre est à fourrer, Mon Frère,
Dans le même sac à bourricots !

- Les tropiques sont stériles terres,
Impropres à produire leur écot
De  bonnes et serviables mules…
Les seules qui seraient nos émules !

- Ces crétins ne sont que peccatas !

- Par contre on les dit prolixes 
(C’est le sort des benêts, des bêtas,… !)
Et fort prolifiques hors leurs rixes :
Quand la Nature s’éveille en eux
La vertu s’endort… et pas qu’un peu ! »

En dissertant, ces grands dadais d’ânes
Daubèrent tant kiang et mulet,
Cavaleurs mais hélas “en panne”,
Que baudet trop velu et donc laid :
Un vrai remède à l’Amour, Mesdames !

Sur le cheval, l’avis des roussins
Diverge : il n’est pas crapoussin
Certes, mais une flamme jalouse
Fait que ce cousin fort bien né,
Que nos bêtes ont pourtant dans le nez,
Ne saurait être loué, c’est inné,
Sans tout aussitôt sentir la loose !

« Il a les les oreilles trop courtes, Ami :
Il n’est acceptable qu’à demi ! »
Convinrent-ils, tout en prud’homie.

C’est ainsi : tout ce qui nous ressemble
Est perfection à nos yeux.
Est-ce pour cela qu’à l’Homme il semble
Qu’humain est image de Dieu ?

* Librement inspiré par Le merle de l’abbé  Jean-Louis Aubert (1731-1814), Fables nouvelles (1773).

dimanche 26 décembre 2021

HAÏKU’IR

J’ai beau m’être rendu à tous les points de vue mentionnés sur les cartes, je n’en ai adopté aucun !

samedi 25 décembre 2021

ÇA VAUT L’HAÏKU D’OEIL

Paradoxalement, c’est un lieu commun que de parler de « site exceptionnel » ici ou là !

LE GEYSER DOMESTIQUE

Petite fable affable d’après Le jet d’eau & le ruisseau
de Charles-Étienne Pesselier (1712-1763)

Au parc du château du coin, jouant glissando,
Un modeste ruisseau coulait sans pompe
Ni fracas, dans l’ombre d’un splendide jet d’eau
Éclaboussant tout du suc de sa trompe.

Il s’élevait, tout en bruissant, orgueilleux
De pouvoir presque toucher les nuages,
Comme s’il abreuvait le Dieu des Dieux,
Arrogant comme paon à son jeune âge.

« Rû incongru et saugrenu, n’es-tu donc pas 
Las de ramper ?… Ah, par trop je t’honore
À te laisser côtoyer, toi sans nul appât,
Mes éclats nacrés, mes beautés sonores,… !

- Certes tu t’élèves bien plus haut que moi 
Mais elles vont bien moins loin, tes gerbes !

- Serpentin !… T’es incapable de marcher droit,
Mesquin et jaloux, à traîner dans l’herbe !

- Toi, nombre de sombres canaux t’y ont forcé
Et gaines de tuyaux en enfilade,
Toujours plus petits, insufférables corsets,
Font qu’au-dessus de mon cours tu parades
Et cela ne me crée, crois-moi, aucun émoi :
Je suis moins brillant, certes… mais libre, moi ! »

jeudi 23 décembre 2021

HAÏKU DU FISC

Nouvelles mesures gouvernementales : puisque la taille n’y fait rien, on remet la gabelle !


LE HIBOU QUI BOUT…

Petite fable affable

« Cette campagne serait un pays de cocagne
Si j’y avais d’autres compagnons, d’autres compagnes,
Que crapules et fripons !
Disait un hibou, docte et auguste oiseau nocturne,
À l’humeur terne et au caractère taciturne.
Je ne suis pas un capon
Mais ce ne sont, las, que gredins, larrons et crapules !
Quand les malandrins et les coupe-jarrets pullulent :
Que ce soit Sire Leu,
Ce vil pendard cruel, cette odieuse fripouille,
Ou Compère Renard, maître escroc qui tant farfouille
Les buissons de l’alleu.
Venues des airs, Soeur Agasse  qui partout musarde,
Les noires carves ou Dame Buse la charognarde,…

- Il est vrai que vous, fit un mulot - un vaurien ! -,
Vous êtes grand granivore, exemplaire frugivore
Voire, au milieu de tous ces vilains carnivores,
Frugal végétarien ! »
Ce n’est pas sur ce gain que roule sa cuisine,
Chacun le sait et surtout la souris sarrasine,
Qui piqua notre géant
De la nuit : « Moi ?!…  Fi donc : je nettoie la Nature
Des nuisibles ; seuls les vaunéants, je capture ! »
Et il goba, sans tiquer
Cette insolente proie, plus potelée que poupine.

Quand l’amour-propre est piqué
Toute excuse, soit-elle fallace, ôte l’épine !

mercredi 22 décembre 2021

mardi 21 décembre 2021

HAÏKU FATAL ?

Je n’ai jamais de mal à supporter qui ne se porte pas bien soi-même. 

LES SINGES SACRILÈGES

Petite fable affable d’après L’indien & le tigre
d’A.-Fr. Le Bailly (1756-1832), Fables nouvelles divisées
 en quatre livres et faisant suite au volume publié en 1811, 1823 (I, 8)

Un brahmane vint à perdre, hélas, son père.
Comme il est d’usage en sa lointaine contrée,
Il lui dresse un bûcher, à l’abri des vipères,
Sur un rocher et y met, sans pleurs montrer,
Le feu. Lors, comme la tradition l’exige,
Sa mère se jette au brasier, en lige
Hommage. Il n’est d’âge pour se sentir 
Orphelin. Il l’est doublement. Sans mentir.

Quand n’est que fraisil en la sépulture,
Notre homme, en larmes, quitte les lieux,
Fourbu, le dos brisé de courbatures,
D’avoir, sans dormir, prié ses dieux,
L’âme rompue par la douleur, amère
D’avoir ainsi perdu, d’un coup, père et mère.

Il n’a pas fait trois pas, quand, consterné,
Il oit bruits qui le font se tourner :
Des singes profanent la demeure ultime
De ses parents. Il écume de courroux…

Mu par une ire plus que légitime,
Ramassant un bâton, il assaille et roue
De coups tous ces crapoussins, ces vandales,…
Il joue autant du bois que des sandales.

À sa merci, on implore son pardon
Et on demande grâce à son bourdon.
« Fais-nous tes esclaves pour ton humeur
Apaiser et réparer nos erreurs :
Nous ne sommes que regrets et remords »

Le sage refusa d’un mot fort peu tendre :
« Quel respect des vivants peut-on donc attendre
De qui ne respecte la cendre des morts ? »

dimanche 19 décembre 2021

HAÏKU’KU

L’offre d’espérance(s) provoque de longues files d’attentes.

L’ESCLAVE DU ROI

Petite fable affable

Par-delà l’onde qui cerne le monde
Était un roi bon, homme généreux,
Désireux que sujets soient heureux,
Lesquels louaient sa sagesse à la ronde.
Pourtant, cet aimable souverain-là
Avait à son service un jeune esclave
Qu’il n’épargnait guère, un être suave,
Docile, disponible, jamais las,…
Il n’est que qualités, sans équivoque.

Le jour de ses quinze ans, il le convoque
À la salle du trône devant la Cour.
Comme il se doit, notre servile accourt,
Apeuré que le monarque ne le tance,
En public, pour avoir failli ou fauté
Et que ne le rosse cette assistance
Qui le méprise comme un vil crotté.

« Avance donc, fait le roi, alors qu'il entre
Dans le saint des saint du palais royal.
D’aucuns te disent vertueux et loyal !

- Je m’efforce de l’être, oui, en cet antre…
Pour vous y être utile, Majesté.

- Que sais-tu faire ? Tu peux tout lister…

- Mais rien que mon travail mon bon maître :
Nettoyer écuries, laver pavé,
Balayer, immondices relever,…
Suivant ce que dit le contremaître
Bâtir s’il faut, détruire au besoin,
Labourer, semer, moissonner à point ;
À la bonne saison faire la vendange ;
Aider aux cuisines au coup de feu
Comme aux travaux d’aiguille un petit peu ;
Assurer l’épandage après les vidanges,
Piocher, charrier, débroussailler,
Équarrir, façonner, roses tailler,… »

On fronce le nez ou pointent des rires
À l’énoncé de toutes ces basses œuvres,
Dans la Noblesse du pays qui couleuvre,
Assemblée ce jour là et qui aspire
À voir châtier ce petit morveux
Qui parle trop, Sire, étant nerveux.

Ce-dernier l’arrête d’un geste :
« Fort bien :… je t’affranchis sur le champ ! »

Puis sur un ton beaucoup moins méchant,
Il ajoute : « Désormais, sans être en reste, 
Je peux t’avouer que tu es mon fils
Et que ton sort, chardon parmi les lys,
Était l’éducation la meilleure :
Loin du fumet des fastes et des flatteurs 
Tu as vu l’enfer du décor, les batteurs
D’estrade, leur rouerie et, las, leurs leurres.
Maintenant tu sais,  mon fils, comment vit
Qui n’est que folle fumée ou que fêtes ;
Et toute ta richesse est leur défaite,
C’est que tu sais, mieux qu’en cent avis,
Comment, et sans fin mais pas sans faim, vivent
Ceux qui, tous les jours, se cassent les reins
Pour le bien général courant les coursives :
Que ton sceptre leur soit plus or qu’airain ! »

vendredi 17 décembre 2021

HAÏKU’KU, RICO !

De joies superficielles en tristesse profonde telle va ma vie, tels vont mes jours.

LE PAPILLON & LA TORTUE

Petite fable affable

Comme des histoires je crayonne,
Un papillon en jardin brouillonne
Ses jours tant comptés de fleur en fleur,
Allant, venant sous Râ qui rayonne,
Et découvrant tout sans peur ni pleur.

Placide en bourbe, une carapace
Mirant ce vain manège s’en lasse :
« Pourquoi, l’Exalté, tant t’agiter ?
Tu fatigues fort qui se prélasse
À faire durer sa vie… Excité !

- C’est que mon destin est éphémère
Et qu’il y a tant à voir, Grand-Mère,
Tant à savoir du monde d’ici
Avant de goûter les rives amères
De l’au-delà. Il en est ainsi !

- Mais tu vas gâter ta santé, Mon Frère ;
Abréger ton temps !… Tu désespères
Qui, comme moi, avec appétit,
Se ménage pour arriver, pépère,
Au bout de son âge, Mon Petit ! »

Se posant lors sur la cuirasse
Mémérisante, il fait, un peu crasse :
« À quoi sert donc de vivre vieux,
Si l’on ne vit pas au mieux ! »

mercredi 15 décembre 2021

HAÏKU TEMPOREL

Entre « C’était mieux hier ! » et « Ça ira mieux demain ! », je préférerais avoir mieux aujourd’hui !

LES GIBBONS & LE GIBEUX

Petite fable affable d‘après Les rieurs & le bossu d’A.-F. Le Bailly
Fables nouvelles divisées en quatre livres et faisant suite
 au volume publié en 1811, 1823 (IV, 6)

On peut, ma foi, devenir des plus instruits
Et rester, dans le fond,  un parfait abruti.
Des bacheliers en frairie, une nuit
Qu’ont éclairée barolos et chiantis,
Croisent dans la rue, sous la lune déjà grosse,
Un homme contrefait et, là, tout haut, s’en gaussent.

« Mes amis, fait le premier doctement,
Cet être renflé est, voyez, un dromadaire.
Ainsi s’appelle l’animal, forcément,
Qui n’a qu’une bosse hélas, quand Ma Bayadère,
Ma mie, elle, en a fort généreusement deux !

- Cette Carabosse, fait un autre merdeux,
Est bien mâle et attend, comme une vraie cloche,
Sa belle Esmeralda, pas vrai Quasimodo ?…
On s’amuse, Rigoletto, fais pas l’gros dos !
Ne dit-on “rire comme un bossu”, Le Floche ?

- Oh, n’énervez pas Polichinelle, Copains !
Ce tortu-là n’est peut-être pas un clampin :
Serait-il, déguisé, Monsieur de Lagardère :
“Allez-y donc, touchez ma bosse Monseigneur,
On dit dans tout Paris qu’elle porte bonheur !” »

- Bossué des temps nouveaux, c’est le légendaire
Ésope revenu vivant du monde des morts d’antan ! »
Affirme alors le dernier, tout en rotant,
Avant que de téter dignement son Madère
Et, plus noir que gris, d'embrasser le lampadaire.

Lors, on ne sent que trop que l’homme en a assez :
« Je suis bien Ésope, en effet, Folles Têtes,
Répondit l’homme fripé sans plus se froisser.
Puisque, sans fin, je fais fort gloser les bêtes ! »

mardi 14 décembre 2021

lundi 13 décembre 2021

HAÏKU MOUILLÉ

Sous l’ondée et sur les ondes, ce soir, l’ondine…

LA SUBLIME APPARITION

Petite fable affable d’après V.-A Arnault, 
La statue de neige (Fables, III, 13), 1812

Cette nuit, il floconna - c’était prédit ! - 
Sur nos masures et sur le poulailler.

Or, au matin,  la volaille a beau piailler 
Pour admirer sans fin ce spectacle inédit,
On tarde à libérer ces ergots et ces crêtes
Qui enfin lâchés, frappés de stupeur, s’arrêtent.
Miracle ou mirage : une forme faite de neige
Trône au cœur de la cour. Tout autour, on s’agrège,
On s’ébaubit et commente, oubliant le froid.
« Ah, jamais statue ne fut plus belle, je crois !
S’exclame une oie.

- C’est marbre digne de l’Antique !
Confirme une poule.

- Sculpturale plastique !
Ajoute une de ses soeurs qui part fouailler.

- Quel ciseau, quel burin ce chef d’œuvre a taillé !
Rajouta le paon piteux. J’en rougis de rage !

- Quels esthètes vous faîtes ! Causez pâturage
Et serpolet mais pas “art” : Un rouge bonnet
Sur des boules superposées, avec pour nez,
Une carotte plus des cailloux dans les orbites
Et un balai… Vous criez au génie un peu vite !
N’importe qui peut faire cela et je vais 
Vous le prouver. » Fit le coq d’Inde qui savait
Ses lettres, ce qui le rendait pédant et cuistre
Plus que savant, bien moins sage que sinistre. 

Il compulsa ses encyclopédies usées
Et feuilleta les catalogues des musées
Pour montrer à cette poulaille ce qu’ “ART”
Veut dire… Rien à voir avec ce “gros bazar” !
Quand il a fini son labeur, se meurent les heures
Du jour : la neige est souvenirs ; la forme leurre.

Le coq de chez nous, pourtant avare de verbe
Lui dit : « Le sage, le vrai, conserve sa verve
Pour disserter sur de méritoires objets
S’il ne veut pas, ce Ridicule, déroger ! »

samedi 11 décembre 2021

HAÏKU DE SOUS

Pour se vendre ou se donner certaines femmes sont très apprêtées !

LA BLANCHE CONGÈRE & LA ROUTE PASSAGÈRE

Petite fable affable

À l'hiver frémissant, bordant un chemin creux,
Fangeux comme pas deux et à souhait bourbeux,
Était une congère, un vrai gros tas, commère
Comme il en existe aussi, las, la lippe amère :
« Comment peut-on vivre en pareille saleté ?
Où tu n’es fagne, c'est fange à satiété !

- À l’aube, j’étais, comme toi, immaculée
Mais le travail à cet état m’a vite acculée,
Ma carapace de gel a craqué au pas des bêtes,
Au passage des roues ferrées qui, sans courbette,
Ne m’économisent guère, malgré ce temps :
Je n’ai, au jour, la paix que de rares instants !

- Quelle misère ! N’être qu’ordure et que tourbe,
Quelque sillon de vase pour moisson de bourbe !
Et encore si tu gardais pour toi ta saleté
Mais non, il faut que tu la viennes projeter
Sur ma robe laiteuse en mille éclaboussures,
Me contaminant de ton infame salissure !

- Mais un matin prochain, le soleil viendra
Qui me cuirassera mais, las, tu ne seras
Plus là pour me voir belle : ce qui est futile
Est fort éphémère, non ce qui est utile  ! »

jeudi 9 décembre 2021

HAÏKU DE FROID

Une tête brûlée peut-elle rester de glace si on lui propose de l’eau tiède ?

ÇA REMUE DANS LES NUES

Petite fable affable d’après Le soleil & le nuage
De Cl.-J. Dorat (Fables ou allégories philosophiques, 1782, IV, 19)

Au-dessus de nous, le soleil en majesté
Contemple la vie paisible de ce village
Où tout n’est que joies, rires, plaisirs et tablées
Sous l’ombrée : on y paresse à tout âge.
« Je peux être fier de moi : c’est mon œuvre
Que tout cela !… Sans moi point de gens en rue,
Ni de cette envie de jouer les couleuvres,
Pas de feuilles aux ramées si drues, si ventrues,…
Tout ce que mes rais d’or touchent est un chef d’œuvre ! »

- Heureusement, je lave la poussière,
Fat, que tu poses sur tout ! Fait une nuée
Passant par là d’un ton las de rombière.

- Que dis tu, toi qui, sans moi, n’est que buée,
Et dont tous les pleurs ne sont, quand je rayonne
Simple vapeur ! Alors reste-moi courtois.
Sinon, pleutre inutile, je t’aiguillonne.

- Moi ?!… Je rends leur lustre aux pavés et aux toits
Pour réjouir l’imbécile populace, 
Embellis sans fin l’arcade reverdie 
De cette promenade où nul ne se lasse,
De mes coups de blues, ces ondées étourdies.
Là est tout mon orgueil, je le confesse :
Moi, je suis indispensable à leur bonheur ! »

L’aquilon joufflu souffla à leur adresse :
« Il n’est crânerie ni gloire, j’en ai peur,
Qui ne résiste au fil du temps !… Cette lame
Mienne tout emporte. Qui la réclame ?! »

mardi 7 décembre 2021

HAÏKU D’EUGÉNIE

Obtenir un bagage intellectuel vous flanque des valises sous les yeux si vous ne voulez pas finir dans le sac !

LES MOUCHES DE CHAI

Petite fable affable

« Voilà qui va vous moucher ! » Dit l’araignée 
De la cave à deux diptères. Ces commères,
Désormais embobinées, ivres ou amères,
Ont mouchardé, non sans les égratigner,
Sur les aragnes de la maison, ses cousines.

Quand, las, on entend que l’un de ses parents,
Tout avarice, est plus cruel qu’un varan,
Même si on ne sait où est la cuisine,
On prend la mouche !… Or, tout à discuter,
Elles avaient dénigré qui vivait en chambre :
Une libertine ; une autre, tout en membres,
L’esprit émoussé mais la langue affûtée,
Hanterait le couloir ; ayant mal fait toile
Et tunnel au grenier, à fleur d’étoiles,
La troisième, sans variation,
Serait de querelleuse complexion,…

Je vous fais grâce de tous leurs poèmes
À propos des « grosses », au sujet des « poilues »,… 
Même si dans cette famille on ne s’aime
Guère, je l’avoue, et ne se voit pas plus,
Cela n’est pas supportable tout de même !
L’octopode les poussant en son saloir,
Leur balance : « À parler comme vous le faîtes
Des autres, sans le savoir, ni le vouloir,
Vous dîtes beaucoup de vous, Petites Têtes ! »

dimanche 5 décembre 2021

HAÏKU’RANT ÉLECTRIQUE

Hier, nous étions « branchés ».
Aujourd’hui, on est « connectés ».
Demain, on sera « intégrés » ?

LE LAPIN RUPIN

Petite fable affable

Le soleil ardait. Tout à son affleurissage,
Un papillon croisa le chemin d’un lapin
Se croyant madré, quoiqu’appesanti par l’âge ;
Il décidait de se rapprocher du village. 
Lassé de ne manquer de rien. Ce clampin
Aimait la vie facile comme un galopin.

Adieu  broussailles, garennes et bosquets ;
Vive la luzerne, le trèfle et les carottes !
Qu’importe le feu du four, ce vieux frisquet
Se gardait jà bien des chasseurs tout en bottes
Qui vous frottent les oreilles en tirant jacquets.

Gourmet de l’oeil mais le regard gourmand, la bête
Fraternise avec qui voisine nos maisons,
Mammifères amis, oiseaux et bébêtes.
Profitant des bons manieurs de serfouette,
Il est vite du cercle qui, à toute saison,
Mange à nos tables en hôte. Et avec déraison.

Dans le petit jardin où il s’est installé
Ce vorace met assez vite sur la paille
La maisonnée qui tant peine à se régaler
De son dur labeur quand, sans fin ni faim, ripaille
Ce goulu… qui en a du mal à détaler.

Alors, on lui dit : « L’humaine patience
Est fort vite bornée !… Te mesurer tu dois.
Pour toi. Et pour nous aussi. » Mais, hélas, l’aisance
Endort tout bon sens et gonfle de suffisance
Or quand la cervelle trébuche, l’esprit choit
Et, pis, vous offre un trépas de premier choix.

samedi 4 décembre 2021

HAÏKU DE TRAITS

Les desseins du destin ne valent pas mieux que les dessins d’Estaing*.


* Valéry Giscard de son prénom !

vendredi 3 décembre 2021

HAÏKU ART

Un paresseux est quelqu’un qui préfère se faire suer plutôt que de transpirer !

LA PIÈCE D’OR & LES MONNAIES DE CUIVRE

Petite fable affable

Serrés dans une cassette ferrée, scellée,
Sous un gros matelas de masure payse,
La larme d’un soleil, pleine d’éclat, devise
En l’espèce, avec sous auxquels on l’a mêlée.

« Oncques ne vit ici-bas pareille infamie :
Je suis un Louis, fait de pur métal blond,
Fils des ducats, bel héritier des doublons ;
Que  fais-je, Dieu, en si vile compagnie ?
Je me dois de côtoyer la terne racaille,
De moins que pistolets, tout en vile ferraille !
Que pèse ce pèze, ces vulgaires billons,
Ces peu brillants et si bruyants picaillons ?

- Ta race se harasse d’causette à Cosette ?!…
Et cet écu, parbleu, c’est du poulet, Mazette ?!
Nous ne sommes que l’humble fruit du labeur,
Le maigre salaire de beaucoup de sueur,
Mais nous servirons, dès demain, à faire emplette
De quoi vêtir et nourrir ceux de la fermette.
Et à quoi donc peut bien servir un trésor
Qui jamais ne sert et que, pas plus, on ne sort ? »

mercredi 1 décembre 2021

SOUS L’HAÏKU’ETTE

Il est des animaux domestiques un peu trop familiers à mon goût !

LA FARCE D’UN MAÎTRE PAS SI PATELIN

Petite fable affable

Mues par quelque envie à assouvir,
Moins que par devoir à accomplir,
Paradent des mouches au cul des vaches
Le long de la grand’rue où se cache
Un écolier fort peu pressé, 
Malgré maints jurements et promesses,
De rentrer dans le rang. C’est assez,
Las, il faut y aller. D'une fesse,
Il y va : devoir à accomplir 
Plus, hélas, qu’envie à assouvir !

Revenant à ses moutons, en classe
Il rentre, et à l’opprobe fait face.
Fieffé fainéant et roublard,
Ce cancre ne fera pas de lard
À l’école, mais leçon s’impose.
L’instituteur donne un devoir
Qu’il corrige aussitôt ; et la prose
De notre bon cossard est à voir :
Zéro pointé. Pas d’effort louable
Pour qui, las, dort toujours sur sa table.

« Bon, aujourd’hui, jour de bonté :
J’offre un point de plus à ce que j’ai noté
Pour tout sou qu’on me donne. Parole ! »
Nul ne trouva à redire chez ces drôles ;
Entre rire et pleurs, à cors, à cris,
Mains monnayent une meilleure note,
Y compris celles de notre aigri
S’étant fait une petite cagnotte
En récré’ : « Fort bien !… Tant promis,
Tant tenu : Voilà mon jeune ami ! »

Et pour les dix pièces, sans rire,
Que le gouapeur lui tend, sourire
En face, le régent place, en fait,
Sur la copie du clampin, en rouge,
Dix gros points ronds du plus bel effet.
Pour voir ça toute la classe bouge
Et s’esclaffe au dépit du goujat
Qui entend dans le vain brouhaha :
« Méfie-toi de qui n’a aucune
 Parole et, plus, de qui n’en a qu’une ! »

mardi 30 novembre 2021

lundi 29 novembre 2021

HAÏKU Y ZINE, INTERNES…

À tout prendre, ce que nos élites appellent « le gratin » n’est souvent qu’une bande de nouilles !

DE L’UNION CONTRE L’OPINION

Petite fable affable d’après L’âne vert
de Cl.-J. Dorat (Fables ou allégories philosophiques, 1782, III, 8) 

Une veuve du village, encore verte,
Voisinait avec un gaillard qui louait
Ses bras à deniers comptant, tout l’été,
 Au plus offrant, donnant à la plus offerte
Le reste pour pas une pistole. En vrai !
Ainsi il vivait heureux quoique pauvret.

La veuve aspirait à convoler encore
Quoique s’éloignât le temps de son aurore.
Elle avait du bien. Lui n’en avait pas.
C’était assez pour faire un premier pas.

Qu’en diront bachelettes, folles jeunesses ?
Qu’en murmureront commères et curé ?
Rumeurs viens et médisances sans finesses
Vite, se feront mortifères arrêts.
Quand sera sue la chose charivari
Et hourvaris courront, sans fin, la voirie !

Ainsi seront gâchées les noces campagnardes
De cette remariée qui jà paillarde
Avec qui a la moitié de son âge.

« Va, ne crains pas le tumulte du village
Lui fit, matin, le bellâtre convoité.
Je sais comment faire taire pareil tapage.
Fais-moi confiance. Je vais les gâter :
Ce n’est plus sur notre étrange ménage
Que, demain, crois-moi, le bourg chansonnera ! »

Après l’église et la mairie, sans hourras,
On gagna donc l’auberge où les épousailles
Devaient devenir, pour tous, fête et banquet.

À peine entrés, on moque ces accordailles
Quoiqu’invités. Ainsi font tous les roquets ! 
Mais stupeur : un âne vert passe en fenêtre
Son museau et brait à tout va son mal-être.
On en oublie ces mariés allant, Dieu,
Contre les us et coutumes du lieu.
On ne parla plus lors que de ce prodige
Dont toute mémoire garde les vestiges.

Là, le jeune époux à sa Belle glissa,
Dans un sourire qu’il effaça, fissa :
« Donne aux causeurs du nouveau et de l’étrange
Et, lors, plus rien d’autre ne les dérange ! »

samedi 27 novembre 2021

HAÏKU HIT

À l’heure des voluptés, tout instant paraît moment.

RETOUR DE GLASGOW

Après la C.O.P. 26, Novembre 2021

Avec l’avide cupidité de pourceaux
Vous vous vautrez, hélas, sur vos monceaux
D’argent sans en partager un morceau,
Vivants sans dessein et sans rêve,
Amassant sans fin et sans trêve.

La terre est inféconde à trop donner
Pour vous, elle va nous abandonner
Ne pouvant même plus, las, bourdonner
Donnant sans dessein et sans rêve,
Offrant tout sans fin et sans trêve.

Vous, sangs corrompus, vous avez tant nui,
Noyés dans votre néant, suprême ennui,
Vous faites entrer dans une longue nuit
Qui souffre sans dessein ni rêve,
Qui n’en peut mais sans fin ni trêve.

L’air surpris, cul assis et cœur ranci,
Qu’il en soit, ma foi, déjà ainsi
Mais fiers d’en être arrivés ici,
Vous n’avez ni dessein ni rêve,
Que vous, vous seuls, sans fin ni trêve.

jeudi 25 novembre 2021

SAL’HAÏKU

Les sales types sont, trop souvent, des propres-à-rien !

LE CACHET DES COUVERTS

Petite fable affable d’après Les deux pincettes
de V.-A. Arnault (Fables, IV, 3, 1802)

Maladresse ou étourderie,
On a mélangé torchons et serviettes, 
Ou plus exactement, Nanette, 
Un couvert en vermeil a atterri
Parmi  ceux qui sont en étain,
Vils outils du quotidien.

L’isolé de la ménagère,
Déprisant, n’y va pas avec le dos 
De la petite cuillère
Pour causer, lui qui est un cadeau
De mariage, qu’on réserve
Aux “occasions”,… Il énerve !

« Me mêler aux plébiens,
Vulgaires ustensiles, n’est méprise :
C’est une insulte de béotien !…
Ma façon comme mon décor en frise,
Ne plaident-ils en ma faveur,
Donnant à tout plus de saveur ?
Que le plus noble ornement de de la table,
Fait de fort bon et beau métal,
Voisine avec le commun… I-nac-cep-table !

- Silence ! Trancha, en brutal,
Un couteau lassé par ces mots.
Tu me fatigues, sot grimaud !
À qui s’en sert, qu’importe ta parure :
Ce sont toujours les mêmes doigts
Qui nous saisissent qui te touchent, Autruche !
Mieux vaut penser, à bon droit,
Que l’on doit toujours le respect
À l’emploi et non à l’aspect ! »

mardi 23 novembre 2021

HAÏKU’R, HAÏKU’R, LE FUTÉ

À long terme, « le court terme » ne paie pas !

À DEVENIR BRINDEZINGUE

« Quelque bien qu’on dise de nous, 
on ne nous apprend rien de nouveau »
(F. de La Rochecoucault, Maximes, 303)

Est-il étrange que je sois « bizarre »
Et que je passe, ici, pour « un oiseau rare » ?
Je vis dans un monde déséquilibré, 
La plume à tous vents, toujours en équilibre ;
Est-il étonnant que je me veuille libre
Dans un monde, hélas, où tout est calibré,
Qui nous met tous en case et, pis, tout en cage ?
On me dit donc, souvent, « fêlé du bocage »…

Est-on si « tordu » à vouloir marcher droit
Là où hypocrisie et mensonges sont rois ?

On ne vaut guère de fifrelin, « sous-fifre »,
« Sacré numéro », là où tout n’est que chiffres ;
On est vite « curieux » ou « déroutant »
Quand on cherche cohérence à l’insolite ;
« Insensé » ou « zigoto », quand tôt on s’alite,
Loin de bruits et de raouts déconcertants.

On est vite « farfelu », « drôle de zèbre »
Si on fuit obscurantisme et ténèbres
Car ne pas suivre la norme est « anormal »,
« Amoral » presque… si ce n’est « animal ».

On est « original » quand ses origines 
On ne veut renier et fort « saugrenu »
De n’être point sot ; « lunatique » ingénu
Quand on est toujours bien luné, Frangine !

Je suis « dérangé » parce que dérangeant, 
Un « drôle pas drôle », un « cinglé » trop cinglant,… :
Rimer fait de moi un « excentrique »
Voire un « extravagant » divaguant, en vers
Et contre tout, un « egotique » sceptique,
Désormais « baroque », sans doute un « pervers »,
« Drogué » ou « homo’ », voué au ridicule
Et à l’oubli… en quelconque particule.