Mosaïque de poésies prosaïques & de proses poétiques

parfois sous forme d'aphorismes, de chansons et surtout de fables…

lundi 31 décembre 2018

HAÏKU D’POMPE

Peiner fatigue, paresser repose !

INSIPIDE INCIPIT ?

Vous ne lirez, quoique que vous vous disiez hommes,
Et encore moins ne méditerez ces vers.
Ni oracle ni devin, j’y suis pourtant bonhomme
Et bénin dans ma vision de votre univers.
Rimeur qui a du mal à se penser un poète
Je me prétends, ma fois, encore moins prophète.

Mais vous serait-il possible du haut de vos sommets
De suffisance que l’un de vous, là, m’écoute ?
Abaissez-vous, comme vous en a Jean sommés,
À regarder nos humbles fables, quoi qu’il en coûte,
Comme invitation à la réflexion
Non comme une Bible guidant vos actions.

dimanche 30 décembre 2018

HAÏKU MENOTTÉ DEUX L’AN NAU

Pour mener à ses desseins une femme il faut lui mettre l’anneau au doigt.
Pour en faire autant d'un homme il suffit de le lui passer au nez !

L’IMMORTELLE FACE AUX MORTELS

Quand la Mort a l’indécence de s’annoncer,
Que son ombre froide sur nous passe
Pour nous dire qu’il est l’heure de renoncer,
Hiers et demains dès lors trépassent,
Emportés. Au point du jour, point de jour
Alors que la Vie vous baille toujours un séjour,
Une raison d’être et un espace :
La lie de l’hiver s’offre au lit de l’univers
Vous offrant le lourd sommeil des yeux ouverts
Dans la violence du silence
Où s’éteint toute malévolence.

Quand la Faucheuse vient à vous se présenter,
Que son souffle elle commence à répandre,
Que sa Faux vous semble nouvellement dentée
C’est qu’est venu, las, le temps de prendre
Congé de soi. Elle nuit au jour à l’envie
Et ajoure la nuit la plus noire sans avis
Pour mieux nous faire ainsi comprendre
Que nous attend déjà, peut-être trop, le néant 
Où nos âmes seront confiées au gouffre béant,
Finis remords et inquiétudes,
Doutes, regrets,… soient-ils foultitude.

Quand Dame Camarde ses hommages vous fait,
Gaie comme corbeau sur un carnage,
Elle fait porter à vos heures son faix
Mine vos repos. En rien ne vous ménagent
Ses crocs et ses serres. Pas plus votre esprit,
Votre cœur que votre corps, donnant tout son prix
Elle ne ménagera votre âge
Vous ôtant votre carapace en un instant
Et, rapace, elle savourera fort ce temps.

samedi 29 décembre 2018

HAÏKU MUNE

Le souhait est à la volonté ce que la mare est au lac.

LE MULET & LE BARDEAU

Petite fable affable

Tout en débonnaireté et bedondaine
Rebondie, cy, là, un bardeau allait sa route
Par chemins et sentiers mais sans fredaine.
Un mulet, s’en allant mie à vaudéroute,
Suivait ce compère qui tout savoir croyait.
Ce premier de cordée, en rien éthique,
De querelleuse complexion, oyait
D’une mâle oreille reproche et critique ;
Balourde bêtise ou naïve candeur
Fort content de lui et plus encore de qui 
L’encense, il mène le duo, grandeur
Qu’il doit à son père qui n’était point estiquit.
N’était que d’y songer ! Trémulant, dandine
Son train notre couple lent, lourd de son faix,
Composé d’un mulet qui suit, henni en sourdine,
Un bardeau guidant et fort sûr de son fait.

Mais ce sottard ne savait pourtant, en sente
Comme en allée, pressentir le moindre danger
Ni prévoir le plus petit péril. Et l’innocente
Bête donc, toujours et partout, s’arrangeait
Pour fourrer le museau là où son comparse,
Ne l’aurait mie fait. Lassé des horions,
Il cède alors le pas à l’autre : « Est-ce là farce ? »
Fait le mulet compté pour vil brimborion
Jusqu’ici. Sentant bien le pourquoi de l’offre
Il la déclina et le bardeau qui fut,
Courtoisement éconduit, car il le gauffre
De compliments, l’oint de vertus touffues,…
Reprend la tête du convoi : l’esprit se brouille 
Ou se perd mie sous la caresse flattant
Notre vanité, ne nous chantant pas pouilles,
De soi - et du cajoleur - des plus contents.

Jamais donc ce concert ne tourna à l’aigre
Malgré, parfois, des propos fleurant vinaigre
Car le mulet, en son for, guettant la bévue
Prochaine du meneur, pensait dans son mouvoir :
« Si Bêtise se met devant pour être vue,
Intelligence reste en arrière pour voir ! »

vendredi 28 décembre 2018

HAÏKU STICK

Celui qui fait des sacrifices
En tire rarement bénéfice…

SÉCHERESSE

Au beau milieu de ce vallon coulait une source
 Où je venais seul me désaltérer matin et soir,
M’abreuvant fort à ses perles comme on se ressource,
Lesquelles devenaient rosée au repoussoir
D’heures et d’un temps qui ne savaient que faire la course.

Arrosé de ses gouttes dont, là, je lapais l’eau
Sans vergogne. À peine désoiffé, sur la mousse
Humide qui la parait, Ah, l’enivrant tableau !,
Je m’aparessais peu, un sourire à la frimousse,
Et y coqueliquais labourant prou le daleau.

Mais dans ce beau val ne ruisselle hélas plus goutte.
Se mouiller de tous ses parfums et s’humecter
De son nectar n’est plus que souvenir. Et je doute
Même de ses souvenirs qui jaillissent, affectés
À l’évoquer, du puits d’une mémoire en déroute.

jeudi 27 décembre 2018

VERS L’HAÏKU NUÉE, EAU DE LÀ !

L’oubli a du bon même si, parfois, c'est omission impossible.

LE CABOT & LE CORNIAUD

Petite fable affable

Un chien chiche-face, n’ayant guère usance
Des os qu’il avait enterrés quand se mouraient
Ses pairs dehors jetés, répétait que l’aisance
Venait à qui se levait matin et qu’il suffirait
De traverser la rue pour trouver un bon maître,
Pour vivre heureux, quelque écorne que la vie
Vous ait faites et où elle vous ait fait naître.
Inutile donc d’avoir mépris ou envie.

Un cabot de rien, fort fendu en gueule
Couvant plus souventes fois maladies qu’œufs d’or,
Ayant défauts qu’on ne saurait, sauf les bégueules,
Celer ni mettre sous scellés, jouant les cadors
Trouvait que de tels parlers étaient de gros mensonges :
Le radin s’emberlucoquait et, présomptueux,
S'acharnait à rester un de ceux qui ne songe
Qu’à manger à leur faim en restant vertueux :
« Quoiqu’ensomeillé bien après la mi-nuit 
Et désommeillé à la pique du jour je reste
Les pattes trémulantes et le corps estéquit,
Errant prou et mangeant peu, hélas, aussi preste
Que je sois à saisir, ma foi, l’occasion
Qui passe. Toi qu’es né riche, tu l’as facile !

- Se peut que non, se peut que si !… La prévision
Est ma force, et je ne suis pas difficile.
Va !… Se rebeller contre sont sort est inutile
À moins, Corniaud, que tu n’aies perdu l’esprit
Qui chez toi, à tout dire, semble peu de choses.

- Si j’écoutais mon courage qui, lui, a grand prix
Mais, là, ne me dit rien tu aurais ta dose :
Tu verrais, je te jure, tout ça d’un autre œil !

- C’est chié chanté ! Approuva le cabot pingre.
C’est moins bravoure que bravade, corniaud,
Car tu es, sot, des plus faibles et des plus malingres.

- Tu oublies que tu es seul, et moi, tout agneau
Que je te paraisse, je suis vraiment sur les dents.

- Oh, sur les rares qui te restent tu veux dire !

- L’empâté qui nourrit d’insultes les perdants,
Matin, finit en pâtée. C’est aisé à prédire ! »

mercredi 26 décembre 2018

HAÏKU DE CHAUX

Pendant des siècles la Bible nous fit croire que « la » Femme aimait le pommier.
Funeste et regrettable erreur,… elle lui préfère, chacun le sait, le péché !

LE NOËL QUE J’AI VU

D’après Le Noël de la rue (H. Contet & M. Heyral)
chanté, jadis, par Edith Piaf

En notre siècle m’as-tu vu
On ne voit plus ceux qui vont nus
Notre monde est un paradis
Dont Noël est l’Eden, sans dédit…

Le Noël que j’ai vu
Est sans neige et sans vent…
Celui que j’ai vu
Fait pleurer des enfants
Qui, sans jeux et sans joie,
Là, devant les vitrines,
Sont transis par le froid.
Ce sont cousins, cousines,
Petits du genre humain
Mais perdants… Des perdants
Qui n’auront, las, rien
De ce qu’ils voient de loin…

Car moi je les ai vus,
En plein cœur de l’hiver,
Allant à peine couverts,
Ces gamins de la rue
Tremblants de tous leurs os,
Dans un squat à clodos,
Ne mangeant presque plus
Et tout à plein perdus…

Le Noël que j’ai vu
Est sans neige et sans vent…
Celui que j’ai vu,
Est celui d’enfants
Aux parents jà absents
Ou piqués et livides,
De migrants se cherchant,
De gens aux poches vides,…
Tous ceux qu’on ne voit pas
En marchant, achetant
Pour d’autres enfants, rois,
Et fêtés à bon droit…

Le Noël que j’ai vu
C’est le mépris de vies,
Consciences endormies,
Égoïsmes entendus,…

mardi 25 décembre 2018

HAÏKU’QUE DE BATO

Jadis l’eau douce menait aux alcools forts.
Ainsi les éclusiers éclusaient et les mariniers marinaient !

LE CRÉATEUR RÉPROBATEUR

Petite fable affable

« Plus on a de serviteurs moins bien on est servi ! »
Se dit, las, Dieu un de ces matins de brume
Où son dépit flotte, en nappes, dessus nos vies.
« Sans charger le portrait de la mouvante écume
Qui parle en mon nom ni être zizanieux,
Il faut avouer que, parfois, ils m’ennuient l’âme
À mourir avec leurs sermons cérémonieux 
Plus creux et vides que leur “Tronc des Pauvres”, Dame !
Ces fidèles, pourtant mes fils, et leurs bergers
Qui prétendent se plier à ma loi, divine
S’il en est, prennent les bons fruits de mon verger
Pour assouvir leurs instincts comme on le devine :
Toute fille leur est loudière ou folieuse assez,
Surtout si elle n’a de sol en l’escarcelle,
Est sotte caillette ou pis crédule angoissée  ! »
Il arquebuse ainsi tous chasseurs de sarcelles.

Mais notre joufflu, mafflu et fessu Très Haut, 
Et sans délayer plus outre, poursuit sa vaine
Mousquetade, les mots n’éteignant pas trop
Son ressentiment : « Le pis, c’est bien là ma veine,
 De tous ces fléaux, c’est qu’en mon nom révéré
Ils font venir à eux les enfants… Sans vergogne !
Comment pourrais-je le taire, quoiqu’affairé
À réparer leurs fautes !… Ne les ai-je en pogne !
Non, je ne peux admettre que sous mes Cieux
Il y ait, pour l’Homme, deux façons de me vivre :
L’une que professe en mon Église l’ocieux
Et l’autre que l’on pratique hors l’église et son Saint Livre
Car Ma volonté est une sur cette Terre !
Donc Je ne puis plus, que Je m’en sois témoin,
Tolérer que ces viles pratiques de recoins
Soient… sans aller plus loin que le presbytère ! »

lundi 24 décembre 2018

HAÏ(dé)KU HÂTE

Couteaux tirés finissent toujours par rentrer… mais rarement en fourreaux !

NOS HIERS VUS D’AUJOURD’HUI

Au bon temps de nos folles avoines
Nos amours n’étaient que blé en herbe
Instants volés et moments idoines
Pour faire fleurir nos cœur superbes
Soudain pour  les étoiles cueillir
Leur lueur fragile recueillir
Pour supplanter le vain en verbe

Au temps de l’herbe folle des sens
Aux printemps des sentiments des vertes
Années où vivaient à contresens
Tous « les autres » on allait alertes
Fretin fretailler quand jà la nuit
Se promenait pour chercher fortune
Ou courir dans l’ombre d’autres lunes
Et nous laisser seuls tromper l’ennui

C’était l’avril de nos amours où tendres
Nous dévidions le fil fou d’un temps
Où on pense inutile d’attendre
Où tout est frémissant palpitant
Nous ne savions pas qu’il condamne
Ces baisers qu’on ne laissait dormir
Ces frissons qui ne peuvent calmir
À devenir regrets en lianes

Mes mots renouent là avec ce temps
Mais l’hiver jà sème son haleine
De souvenirs usés inconstants
Sur nos vies devenues mornes plaines
Nos cœurs se glacent à leur candeur
Qu’accrochent les griffes de l’oubli
Que givrent des vouloirs affaiblis
Que gèlent des pouvoirs sans  grandeur

dimanche 23 décembre 2018

HAÏKU VREUR

Si vous aspirez à être inspiré, respirez jusqu’à expirer !

LA VÉRITÉ VS LA RÉALITÉ

Petite fable affable

La Vérité, la Réalité rivalisaient
Pour avoir primeur et primauté au cœur des Hommes.

La première se sentait fort flouée, lésée
Même, d’être sacrifiée par ces vains gnomes
Qui, à l’ordinaire, se mentent à eux-mêmes autant
Qu’ils leurrent autrui à longueur de temps.

L’autre se disait bafouée, voire insultée
Parce qu’on refusait, las, de la voir en face
Chez ces pommes qui préféraient se colleter
Avec leurs rêves ou leurs chimères, fallaces
Qui les faisaient félices plus que le réel.
Pour eux, hélas, l’idéal étant l’idéel !

Leur triste état le voulant, elles se disputent :
Leur humeur rebelute et leur honneur froissé
Les disposent hélas à une navrante lutte
À mort se peut, pour ne pas - ou plus - s’effacer
Quand il suffirait de montrer ses croupières 
À qui veut vous les tailler, l’allure fière.
À dextre, à senestre ce sont buffes baillées
Et soufflets reçus, coups bas et viles ruades
Cambrements et écarts et ce sans louvoyer,
Piétinement, à coups, battements, platissades,…
Devant un adversaire ne craignant pas débours
De temps, ni heurt, ni coup. Non. Bien le rebours !

À tant se botteculer, les duellistes
Se discréditèrent et faillant tout autant
À se départager tombèrent, comme kystes,
Dans un ce monde existant depuis longtemps
Où survivent des mots au sens perdu qu’on encense :
On y tient tous ceux que, las, l’on ne veut plus voir
Et ceux qu’on aurait préféré ne pas savoir 
Se satisfaisant de leur seule connaissance !

samedi 22 décembre 2018

HAÏKU D’RAM

Si Gibraltar est un détroit qui sont les deux autres ?

MEA CULPA GOUVERNEMENTAL…

Quand on a un gouvernement « trop intelligent,
 Trop subtil » c’est que ses citoyens sont, hélas,
Sans finesse et trop cons ; en un mot affligeants.
Comment voulez-vous que Jupiter ne soit las ?

Car ces bons gouvernants sont tellement des gens
Bien, ayant des biens, pensant bien, 
Parlant mieux encor', donc « trop intelligents, 
Trop subtils » pour tant d’insignes plébéiens !
Tous ces mécontents qui resteront indigents,
Ces moins-que-rien qu’on peut mener par le nez
Comme bêtes à l’abattoir d’un air négligent
QU’on peut ainsi toiser malgré leurs démenées…

C’est sûrement parce qu’il est « trop intelligent,
Trop subtil » qu’il s’est permis de la ramener
Et mieux d’être, pour le moins, désobligeant…
Quand il faut se taire et non pas tout gangrener…

vendredi 21 décembre 2018

HAÏKU DAIS

Pour couper court à d’ennuyeuses conversations de voisinages j’ai fait poser des fenêtres à guillotine.

LE VACHER & LE BERGER

Petite fable affable

Revenus de leur prés, fort loin de leur village,
Un jeune vacher disputait à un berger
Le droit d’être fier de son office par l’âge,
De prime, mais aussi parce qu’il ménageait
Vile piétaille grouillante et suintante
Et non nobles et forts bestiaux dont la chair
Nourrirait le seigneur du lieu. Irritantes
Raisons qui justifiaient qu'il prenne de grands airs.

Et le vacher ajouta, sûr de son affaire :
« Car on aura beau dire et faire avec broutards
On gagne autant à les garder qu’à s’en défaire,
Ne valant pas tripette sauf pour plèbe ou routard !

- Vraiment ?!… Moi je n’appête guère à pécunes
Que je ne verrai mie : mon maître, comme le tien,
Profite de sueurs, sans vergogne aucune,
Qui lui coûtent peu et gardera serré son dû. Chrétien
Sait que charité bien ordonnée commence…
Et cela en château, en chaumière ou manse.

- Tu as bon bec, comme fille d’étable. Mais, fi,
Moi, je vais seul sans que partout ne m’accompagne
Un chien, pour faire un ouvrage auquel je suffis,
Mangeant la moitié des sols que je gagne !

- Mon fidèle Médor m’évite de m’aigrir 
Sur mon triste sort et vaut bien d’aucuns hommes
Venant sans fin, dans mon labeur, me secourir.

- Tu resteras les pieds crottés, comme pomme
Que je sais, à raisonner comme nos vieux !

- J’en serai heureux, Bouseux, si je ne me paonne
Jamais de ce que le Hasard ou, au mieux
Un Autre, m’a fait ce que je suis ni si, âne
Parmi les ânes, je ne mets plus bas que boue
Qui vit com' moi mais se voit, plus que je, debout. »

jeudi 20 décembre 2018

HAÏKU LEVRINE

Paranos, les paras ? … No !

FAISONS-NOUS UN MATIN

Nous vivions dans une nuit éternelle
De nous savoir et de nous être pas trouvés
Nous vivions la solitude originelle
Mais veilleuse la lumière couvait
Pourtant sous nos paupières en nos prunelles
Habituées à l’ombre et au désespoir
On s’est ouvert les yeux au clos de tonnelles
D’un regard qui souleva cet éteignoir
Posé sur des jours qui n’étaient que flanelle

Qu’elle fut longue cette nuit
Avant que tu sois aube accore
Et qu’il fut solide l’ennui
Avant que je ne te sois aurore

Si tu le veux faisons-nous là un matin
Qui éteindra en nous peines et pénombre
Et rêvons ensemble à tous ces lendemains
Où seront bannis et le triste et le sombre
Dessinons-nous des réveils tout en satin
Que la solitude plus jamais n’encombre
Baignés d’un soleil toujours renouvelé
Où sourire et tendresse seront du nombre
De nos compagnons pour faire étinceler
Chaque heure qu’on bâtira sur ces décombres

Qu’elle fut longue cette nuit
Avant que je sois aube accore
Et qu’il fut solide l’ennui
Avant que tu ne me sois aurore 
Alors va faisons-nous un matin
Et rêvons-nous des lendemains

Oui quelles que furent nos nuits
Là on va enfin s’en défaire
Si solide que fut notre ennui
On a des demains à se faire
Oubliant ce qui nous a nui
Faisons de nos vies notre affaire

Allez viens faisons-nous un matin
Et rêvons à ses lendemains

mercredi 19 décembre 2018

HAÏ(skr)U TEINT

En anatomie comme en politique, seules les têtes de nœud se situent au-dessus des partis où grouillent les morpions.

L’ÉTOURNEAU RETOURNÉ

Petite fable affable (Nouvelle version)

Pour le pays des soleils généreux
Où, matin arrivée à tire d’ailes,
Vient se blottir l’errante hirondelle
Et vivotent des verts varans véreux,
Initiative fort peu heureuse,
Un jeune étourneau des plus dégourdis
Fors sa bourgeoise, à ce que l’on m’a dit,
Partit, un beau matin, courir la gueuse…

Elle avait été, pourtant, son prime amour,
Celui des « pour la vie », des « toujours »,…
Mais c’est à l’étourdie qu’il aimait vivre.
Non étourdie et, plus, se voulant libre.
Résignée à son sort, la répudiée,
Sans faim, le laissa partir, Crédié.

Lui, de grenadiers en banians,
Trompait le temps et cette malheureuse,
Sans fin, avec moulte et moulte coureuses
- Vierge, épouse, veuve,… - mendiant
Amours sans regretter passé, passades,…
Il se lassa - c’est fait : tout se défait ! -
Mesura enfin sa faute et ses effets :
Il s’en revint, un sourire en façade.

Notre volage apprit la vérité nue
D’un compère loriot reconnu.
Il épitapha ces mots lapidaires
Qu’il tenait d’un ancêtre légendaire :
« L'étourdi qui perd sa passion perd
Plus que s'il se perd dans sa passion ! »

mardi 18 décembre 2018

HAÏKU LOIR

Une porte condamnée ne doit être pas méjugée.

MARE À l’AMARRE

Un étang a jeté l’ancre auprès de ma maison
Amarré au saule pleurant toutes ses feuilles 
Qui pleuvent leurs peines jusqu’à la déraison,
Toujours, quoi que l’on en dise ou que l’on en veuille.
Noyées dans les vapeurs de nos matins d’été,
À corps perdu dans l’eau de là, elles se jettent,
Étranglées par les encyclies sans trompéter,
Avalées par les clapotis n’en laissant miette.

Gardiens de l’onde, massettes et roseaux 
Balaient les gouttes d’argent d’un miroir opaque
Endormi sous un ciel dépoli d’où l’oiseau
Plonge pour réveiller, un instant, cette flaque.

L’onde sage caresse des berges herbues,
Et des rives moussues où jamais ne murmurent
Ni se susurrent ces eaux dormantes tant bues
Par une faune que la nuit souvent emmure.
Cet étang frémissant, que ride un cheveu vert
D’ondine affleurant en surface, et où se pose
Le nénuphar qu’elle y mettra jusqu’à l’hiver
Vit en reflets brillants et en ombres moroses.


Illustration : Élisa Satgé (été 2019)


lundi 17 décembre 2018

HAÏKU’RIOSITE

À port plein verres vides, 
Où porcs pleins vers dévident.

LE VERBE EST (aussi) DANS LE FRUIT

Édito’ pour RuedesFables, octobre 2018

          Monsieur de Voltaire à qui il n’était besoin de tirer les verbes du nez et aimait tant à lever haut le verbe, surtout s’il était à boire, dans son Dictionnaire philosophique s’attaquait à R. Descartes qui, raide comme un verbe de lampe, en rupture avec la tradition aristotélicienne, refusait naguère d'accorder la vertu de la pensée - donc une âme - à l'animal : « Quelle pitié, quelle pauvreté, d’avoir dit que les bêtes sont des machines privées de connaissance et de sentiment, qui font toujours leurs opérations de la même manière, qui n’apprennent rien, ne perfectionnent rien, etc. ! » (article “Bêtes”, 1764). Voilà qui a le - feu - verbe luisant de nos Lumières d’antan et le bon sens de qui regarde, même d’un œil distrait, la bestiale engeance qui nous entoure. Œil de verbe qui ne fut point jeté par notre verbeux code civil républicain qui jusqu’en 2015, où l’animal y est devenu « un être sensible », considérait, sévère, icelui comme « un meuble se mouvant par lui-même », soit un objet quelconque dont le sort n’intéressait que les sensibles et les sots voulant briser ce mur de verbe à coups d’idées et de pensées d’un autre tonneau.

     Pourquoi votre humble serviteur qui a le verbe moins épais que ces fameux gros mots qui naissent de nos grands maux, voudrait-il faire un papier de verbe qui ne serait que redite de l’auguste penseur pas pansu ? Point de verbe double, ici. Il le fait pour apporter une pierre qui ne serait pas plus philosophique que philosophale à cet artisanat de la verberie propre à notre pays - le verbe de Bohême n’est pas mal non plus ! - et ainsi défendre l’art de la peinture sur verbe, qu’il soit d’eau, métallique ou organique. Ce grand sottard le fait aussi pour jeter un rideau de verbe - armé plutôt qu’allégé - sur un monde de délices et de suavités, gavé d’Ave et de Credo à crédit, tirant vers le vert qui se blottit dans la laine de verbe du non-dit et la fibre de verbe des sous-entendus aimant à tout draper dans une Novlang, verbe à vain s’il en est, toute en non-sens plutôt qu’à se voir tel qu’il est… et ne peut manquer d’être, les vers pris sans vert en moins.
     Dans cette maison de verbe qu’est RuedesFables officiant, à plus ou moins bon escient, patient, l’humble fabuliste qui s’essaie à jouer les jongleurs, souffleur de verbe, mais de verbe à soi voire de verbe à pieds, qui fait de l’animal voire de l’animalcule, la manière et la matière de ses récits pour parler des Hommes, vaut-il mieux que l’auguste penseur à la brouette et inventeur de la calculatrice ?… À moins que ce ne soit l’inverse. Avec les “cogitateurs” de son espèce, soient-il de la race “révolutionnaire” dans la maison de verbe du temps qui est le leur, sait-on jamais même si parole - soit-elle d’or - peut se casser comme du verbe. Voilà pourquoi il chante l’animal, conte la bête ou célèbre la faune… pour mieux causer de l’Humain, le « cassos’ » de la Nature dont le verbe est dépoli par trop de civilisations sans civilité et rendu peu urbain par trop d’urbanisme. Car il n’est pas question pour lui de louer une quelconque « Sagesse animale » que d’aucuns ont pu, comme le vétérinaire du Jardin des plantes, Norin Chai (Prix animalis, 2018), observer pour nous damer le pion au point de sous-titrer leur ouvrage Comment les animaux peuvent-ils nous rendre plus humains ? Mais, coit et quiet, le facteur d’apologues, inventeur d’une « humanité bestiale » pour mieux décrire « la brute humaine » - n’était que d’y songer ! - entre chapon chapardés et volailles volées peut aussi mettre en scène, pour remplir son verbe à d’autres sources inspirées ou à ces puits d’où jaillissent quelque vérité, la flore et ses fruits qui depuis le versatile Adam, qui se noya dans le verbe d’O. dont l’histoire nous fut depuis racontée en de roses pages, ont grandement conditionné notre destinée où pullulent les verbes blancs et, plus encore, les verbes de rage.
     C’est ainsi que le fabuliste, même s’il a une face à décourager un crapaud d’être laid, a toujours un verbe dans le nez, n’a pas la prétention d’avoir un verbe correcteur. Il a l’ambition que celui-ci soit le verbe de l’amitié entre des êtres ré-humanisés, polis parce que policés, avec ce fond de verbe qui tend à un humour d’humeur et une bégnine bienveillance même si, parfois, quoique son verbe soit salutaire, comme celui de G. Apollinaire qui sut si bien se mettre au verbe, libre par trop selon d’aucuns, il « se brise comme un éclat de rire ».

     À tous ceux qui, comme moi, préférant voir le verbe à moitié plein qu’à moitié vide, fabuleusement vôtre…

dimanche 16 décembre 2018

HAÏKU’M PLEXION

Je n’aime pas les importuns : je n’ai pas besoin qu’on me gonfle, je suis assez gros comme ça !

IDÉES IODÉES

À leur grand soir, les enfants ont pris le large.
Nous restons à l’amarre, voiles pliées.
Le grand bateau d’hier n’est plus qu’une barge
Qui ne navigue plus, trop lourdement gréé.
Nos souvenirs dérivent, mis à la chaloupe
Pour l’écueil des aigreurs convenues,
Quand rêves et rires chavirent aux nues
Et, de bâbord à tribord, de proue en poupe,
Ce sont coque désertée et pont à nu
Qu’a cet esquif arrimé. Contenu.

Finies croisières, adieu tempêtes
Nous resterons las échoués au port
Face à l’horizon figé, à perpète
Espoir de rares courses et vains transports.
Roulant, tanguant, nous en ferons un havre ;
Où nos matelots pourront, devenus
Capitaines, jeter l’ancre ou leur sandre
Et enrichir nos cales, hier grenues,
Qui, jusqu’au naufrage, peuvent descendre.

Nous resterons au loin des vents qui soufflent,
Pour vous, et pour eux jusqu’à Saint Vincent,
Alizés ou zéphyrs. La bise essouffle,
Jà, nos mâts rouillants, nos haubans grinçants,…
Nous voguons encor’ mais, par la mémoire
Des îles où nous avons accosté bon an,
Mais l’avenir, charge pour tout-venant,
Nous fait affronter les grains nés des Moires,
Surnager à l’écume de nos ans,
Depuis qu’ont pris le large les enfants…