Mosaïque de poésies prosaïques & de proses poétiques

parfois sous forme d'aphorismes, de chansons et surtout de fables…

mercredi 23 février 2011

VOIE LACTÉE, VOIE D'EAU

Hier, quand je m’endormais, les rideaux des fenêtres
Se sont transformés en nuages ; Baromètre
Bloqué sur la tempête. Et puis c’est ma carpette
Qui, alors, ondula en vagues vaguelettes
Battant le matelas ; le vent jouait trompette.
Mon lit-bateau, lui, devint une goélette
Car mes draps se dressant soudain se firent voiles. 
Sous la coque, passaient des ailerons de squales !

Dessus mon fier vaisseau,
Dans le grain, la bourrasque,
Il me pleut à pleins seaux
Des grains d’or sur le masque
Car, moi, je vogue aux Cieux,
Capitaine audacieux.
Mes tiroirs-sabords crachent
Des étoiles en bordées :
Semonc’. La brise arrache,
À tribord, des cordées…
À moi, fortune et gloire,
Les châteaux de la Loire !

De dessus la grande hune,
De son œil énervant,
Me défie cette lune
Que je vais, proue au vent,
Éperonner en brave.
Et tant pis si j’en bave,
Après un abordage
 J’irai la décrocher
Oui, comme au plus bel âge,
Avec grappins, crochets.
À moi, fortune et gloire,
Les châteaux de la Loire !

Debout sur mon gaillard,
Le beaupré face à l’astre
Je file, ivre et braillard,
Lui faire son désastre,
Laissant dans mon sillon
Milles constellations. 
Mais soudain le vent tombe ;
Les voiles pendent au mât.
Un silence de tombe.
J’ai mal à l’estomac…
Une comète frappe
Et le néant me happe.

La coque  perforée,
Oui, mon bateau s’abîme
Je coule, dévoré
Par les flots et l’abîme.
Adieu, fortune et gloire,
Les châteaux de la Loire ! 
Il me faut écoper
Sans relâche cette eau
Que rien ne peut stopper,
Entraînant mon bateau
Vers des fonds plus serins,
Cimetières marins.

Chaviré, échoué, j’enrage car les flots
Viennent de m’engloutir navire et matelots.
J’étais si près du but !… Mais tout reprend sa place :
Voilages, tapis et lit sont tels que la veille.
Adieu la voie lactée et toutes ses merveilles. 
Au revoir mes rêves déjà finis… La poisse,
Moi, je me réveille encore en eau, tout mouillé ;
Une nuit de plus où je me suis oublié !

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire