Mosaïque de poésies prosaïques & de proses poétiques

parfois sous forme d'aphorismes, de chansons et surtout de fables…

jeudi 25 septembre 2025

MA SOEUR, ÂNE NE VOIS-TU POINT VENIR ?

Petite fable affable d’après Ahmed Matar

Vivant innocemment alors ses temps chauds,
Loin de nos temps modernes qui se complaisent
Dans la violence et croupissent, à leur aise,
Dans l’ordure était, bâti à sable et chaux,
Un petit village où, une nuit, le Diable
Vint à passer, tout d’envies impitoyables.

Ce facteur de terreur, fauteur de tourments,
Hélas, n’y trouva point à torturer d’âme
- Même pas une pie à dénicher, Dame ! -
Il ne put faire, comme désagrément,
Que de détacher un âne de son arbre.
Pas de quoi graver la chose dans le marbre !

Libre, le pauvre animal qui ne paissait,
Las, qu’une herbe rare et maigre de coutume,
Alla brouter feuilles et fanes des légumes
Au potager du voisin. Sans s’en lasser.
Mangeant à grand bruit, lors, il ne put pas taire
Ses mercis à qui ainsi le laissait faire.

Le fermier, réveillé, vit dans son jardin
L’ombre d’un voleur qu’un seul coup d'escopette
Châtierait de son forfait. Et à perpète.
Ce qu’il fit, réveillant l’ânier, un grandin
Malcommode qui, pour venger sa bourrique,
S’en prit à son autrevoisin, un dandin,
Qu’il occit en un tourne-main, hystérique.

La dame du mort héla fort au secours.
Il s’en suivit une algarade nocturne
Qui n’épargna, je crois, ni niche ni turne.
Elle devint hécatombe par ce concours 
D’assistance et, aussi, prou, de circonstances
Où tout était constance ou sans importance.

Au matin, les diablotins et diableteaux,
Ouïrent Satan raconter son passage 
Là où le temps et ses tourments rendaient sages.
« Mais tu fis plus pour qu’ils tirent les couteaux ?

- Non !… Pour mettre à feu et à sang une terre
Laisse un âne vaquer librement et braire ! »

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