Mosaïque de poésies prosaïques & de proses poétiques

parfois sous forme d'aphorismes, de chansons et surtout de fables…

lundi 21 mai 2018

LE RENARD DOMESTIQUÉ

Petite fable affable

Surveillée par un patou digne de garder 
La Gueule des Enfers où flammes aiment à arder
 Si tant est que telle entrée nécessite un cerbère,
La basse-cour s’ébat comme en pays berbère :
Ici, tout n’est que luxe, calme et volupté, 
Sous l’oeil de Maître Coq, roi par tous accepté.
Souverain trônant sur son fumier, il scrute
 Son monde entre deux volailles à la culbute.
Dame Goupil venue larronner des poulets
Avait laissé un orphelin tétant son lait
Seul, ici-bas… Et, par charité, à la ferme
On avait recueilli ce beau roublard en germe.

Il grandit et fut éduqué comme un chien,
Se comportant, au jour le jour, aussi bien
Qu’un toutou, nourri et choyé d’abondance.
La Crédulité étant fille d’Ignorance,
On s’attendait, las, presque à l’entendre aboyer
Chez ceux où il logeait sans payer de loyer.
Seul le gardien du lieu sur ses gardes
Restait, ayant la griffe aigüe et croc qui larde.
Le Roux pourtant n’était ni fourbe ni retors.
Aussi donnait-on au sceptique plus que tort
D’une vigilance justifiant pitance
Et existence par ailleurs… Que d’inconstance ! 

Et ce vieux molosse avait bien raison
De se méfier d’un rusé dans la maison
Qui n’attendait que vienne, un beau jour, son heure
Pour piller toute la poulaille en sa demeure.
Et ce dernier, matois en tout et pour tout,
Crut, quand on relégua, fort lassé par sa toux
D’abois, notre cabot au pré avec les chèvres,
Pouvoir ripailler comme lièvre en genièvre.
Mais la Providence devait être, ce jour
Là, distraite : à peine eut-il posé, au séjour
Des poulets, la patte qu’une gueule béante
Le happe et que résonne une voix effrayante :

« Je savais bien qu’un renard change de poil, 
Non de caractère* c’est, las, adverbial ! »

* D’après Suétone.

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