Au long du long des jours, je passe
Chargé comme âne bâté
Que rien jamais ne lasse
Ou ne presse ni ciel bleu gâté
Ni averse qui par trop verse.
J’ai pour vous des couffins de vers,
Des paniers de rimes diverses
Et des sacs de sons valant vair.
J’erre, gambade ou bien saute
Hors, et for, la mode qui trotte,
À la peine, mais pas chagrin
Même sous le pire des grains.
Blanchi sous le harnais de ma langue,
Tirant des charrettes de mots,
Souffrant le joug d’humeurs qui tanguent
Ou bien la charrue de mes maux,
Je vais mon chemin que bordent
De forts critiques épineux,
Des broussailles qui ne m’accordent
Que des silences lumineux,
Une hautaine indifférence
Qu’on dit polie à mes relances.
Ils me font une haie d’honneur
Ombrant mes pas de randonneur.
Car écrire est ma récompense,
Mon avoine et mon picotin,
Celui qui quoi, que l’on en pense,
Ne finira pas en crottin.
Et un rire raillant mes larmes,
Un pleur rayant l’hilarité,
Je vais baissant non les armes
Mais la tête - humilité ! -
Et, à mon bon gré, je m’arrête
Pour mieux repartir vers les crêtes
De la création qu’on tutoie
Quand on a le ciel pour seul toit.
Le pied sûr, sans forcer l’allure,
Je vais et viens, allant mon train,
L’ego sans nulle boursouflure,
Jamais las, toujours là matin.
Ignorant bâton et carottes,
Je vous offre donc de marcher
À mon côté, d’être mon hôte,
Et de goûter, sans s’écorcher,
Ces bluettes d’un cœur à nu
Qui, ni connu ni reconnu,
Pose des lignes inégales
Fidèles à la glèbe, aux fagales.
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