Sur La bohème (Jacques Plante & Charles Aznavour)
J’avais moins de vingt ans,
Quand m’est venue, battant,
Une envie de renaître.
Les mots en ce temps-là,
Servaient à fair’ du plat,
Se vendre ou bien paraître.
Pour moi c’était manie
M’sentant un peu banni,
L’amour criait famine
En ces temps biscornus.
Entouré de gamines,
J’écrivais, en continu,
Des poèmes, des poèmes,
Pour tout vous dir', vers rimant par deux,
Des poèmes, des poèmes.
Un brin pompeux, un peu verbeux.
Je faisais des dizains,
Des sonnets, quelques-uns,
Aux pieds aléatoires,
Aux vers pas très heureux
Rimant parfois bien creux,…
Mais je voulais bien croire,
Sans vous l’avouer trop
Que j’n’étais pas manchot
Pour parler aux étoiles
Et chanter l’univers,
Le spleen pour seule voile,
Marchant phrase à l’envers,
Mes poèmes, mes poèmes,
Qui m’feraient rir’ si j’les relis,
Ces poèmes, ces poèmes,
Que pourtant j’ne renie…
Ainsi, je me livrais
Croyant me délivrer
Des maux de mes nuits blanches
Jouant de leur tocsin,
Des affres, en essaims,
Tourmentant mes dimanches,
Posant leur sale tain
Sur mon cœur éteint
Toujours sevré de « J’t’aime ! »
Que mon âme ravie
Aurait aimé qu’je sème
Pour la femm’ d’une vie
Ces poèmes, ces poèmes
Qui me font rir’, ceux d’y’a vingt ans,
Ces poèmes, ces poèmes,
Que je relis de temps en temps.
Quand les ailes du jour
Ploient sous l’voile d’atours
D’une nuit de tristesse
Où ne me revient plus
Une rime voulue,
Je retourne, sans presse,
À un des vieux cahiers
Où, en pleins et déliés,
Dort tout ce qui subsiste
De ce temps qui est mort,
Tout en mots égoïstes,
Mais qui cellait mon sort
En poèmes, en poèmes,
Qui ne sont, las, pas bons du tout ;
Ces poèmes, ces poèmes
Qui m’auront fait du tout au tout…
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