Mosaïque de poésies prosaïques & de proses poétiques

parfois sous forme d'aphorismes, de chansons et surtout de fables…

lundi 23 mars 2020

LA FORTE ESCORT

Quoiqu’elle s’adonne à la Madone,
Ce coquet caquet, dans le printemps
De sa vie, effeuille - y’a maldonne ? -
La fleur de son âge à tout instant
Car, toute entière, elle se donne…

Depuis longtemps il en est ainsi :
Cette ménade des promenades,
Ses charmes avec chacun négocie.
Le soir dévêt, d’une capucinade,
Sa vertu ; le matin, comme une scie
Lui rend sa pudeur sans une larme.
Corps de passage et cœur au rebut,
Les plaisirs provisoires recherchent
Cette Vénus des minus, qui a bu
Toute honte et, pis, pas faux derche,
Jusqu’à la lie car trop d’attributs
Tentent, hélas, les perches et les berches !

Ah, elle n’attire pas les rajahs
Cette vestale de vestiaire
Que tous les plaisants trouvaient déjà
Enfant, tentante toute entière
Et la couvraient de présents, najas !

Mais cette hétaïre des satyres
Ne sait pas se taire : à chacun
Son secret, en maison ou en tire,
Donc son paquet, hors du baldaquin
S’entend, quoique alors elle en retire.
Elle fait dès lors la joie d’aucuns :
Elle reprend tout vain bruit de bouche,
Répète tout chamaillis de mots,
Tendres paroles ou vers un peu louches,…
Alors aux mauvais amants les maux
Car qui entrait, un temps, en sa couche
N’enfantait que rumeurs et bon mots,…

Ayant de sa profession la langue,
Notre renchérie cassait sans faim
Les bonimenteurs tout en harangue
Édiles à idylle sans fin
Ou Casanova laissés exsangues.

Mais tremblaient comme branches de saule,
Indignes d’être des Don Juan,
Ils jetaient bas leurs masque et rôle
Avec elle et les quelques truands
Prou adonisés que, sur parole,
Elle a libérés de problos gluants.
Ils la protégeaient de l’insolence
De qui, la vêtant de voluptés
Factices et de cette dolence
Qui gît là, à fleur de peau, optaient
À son égard pour la violence
Quand leurs défaillances elle caftait…

Le temps de ces doux désirs complices
Et l’ambre si pur des passions
Ne durent guère, et dès qu’hélas plisse
La peau vient la démission
Des amours et l’heure de la malice.

La sueur des souvenirs s’égrène
Alors en perles qui font parler
De types, bonne ou mauvaise graine,
Défunts ou défaits, qui font reparler,
Obrombrant tout un genre. Sans haine.
Ainsi finit, sans s’éniarler,
La vie d’une simple bourlingueuse
De braguette pour qui, toujours,
L’efflorescence - que l’on dit gueuse -
Des concupiscences prête, au jour,
À rire et, à la nuit rugueuse,
À l’action sous tous les abat-jours.

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