Mosaïque de poésies prosaïques & de proses poétiques

parfois sous forme d'aphorismes, de chansons et surtout de fables…

vendredi 13 mars 2020

NOUS

Nous, pouilleux, pauvres hères et manants,
Gros Jean com’ devant de tous les temps,
Derrière la charrue, dans la rue,
Les mains dans la bouse ou dans la boue,
Tous va nu-pieds et malotrus,
On était pourtant des gens debout,
Même de fatigues fort recrus.

C’était pas vice la pauvreté ;
La faim n’était pas impureté.
Manches retroussées, on a mouillé
Notre chemise pour vous bâtir
Vos châteaux et églises souillées,
Nourrir vos palais ou les nantir
Sans merdouiller et sans brandouiller.

C’était comme cela, jusqu’au trépas,
Du temps des rois puis de grand-papa.
C’était comme ça, y’ pas longtemps
Quand, dit-on, les temps avaient changé
Et ça l’est aussi à cet instant…
Parce que rien n’a vraiment bougé
Et qu’on a tout supporté. Comptant.

À nous, petites gens, les grand maux ;
À vous les puissants les bons mots,
Grands d’hier, riches d’aujourd’hui.
Si votre mépris nous est acquis,

Nous qui prenons toutes les pluies,
Sans nous, ma foi, vous seriez qui ?
Auriez quoi, hors votre ennui ?

Ça c’est sûr, on connaît la chanson :
On finit toujours en caleçon
Devant la machine ou le canon ;
On suera sa vie jusqu’au linceul,
À moins qu’on finisse au cabanon
Pour avoir toujours été trop seul,
Nous qui, pour vous, sommes nés sans nom…

Ça c’est sûr, on connaît la chanson  !
Vous nous prenez pour des enfançons
Qui ayant fait rêver leur Manon,
Crèveront là d’avoir espéré,
D’avoir tout donné comme un ânon,
Soumis, pire déconsidérés
Griffes limées. Caries aux fanons !

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