Petite fable affable
Par libéralité, Sire lion convoque
Ses sujets et sans équivoque :
C’est un ordre. Chacun donc se presse, inquiet,
À l’assemblée voulue, et ce du plus niais
Des gnous au plus futé et digne
Des éléphants. Le roi ne dit mot ni ne fait signe
Puis s’exprime, solennel :
« Nous vient une crise des plus criminelles.
Disette et famine nous guettent.
Aussi j’ouvre mes greniers, abolis impôts et quêtes,
Jusqu’à la fin de ces temps durs
À tous, quoi qu’il m’en coûte. Ainsi je veux, c’est sûr ! »
On applaudit Lion. Chacun repart en brousse
Avec plus de joie que de frousse,
Saluant la mesure évidente du roi
Lequel ne courut plus ses proies.
Il y perdit ses forces, hélas, et bientôt son trône
Est menacé tant on l’étronne.
Mais les plus mauvais jours s’éloignant à grand train,
Il voulut, certes sans entrain,
Qu’on revînt aux vieilles coutumes de sa terre.
Il fit annoncer, autoritaire,
Une réunion plénière aux sujets
De son pays et, là, en précisa l’objet.
Nul ne vint au jour dit. Pas même quelque termite
Ou une fourmi chattemite.
Le souverain conçut alors, sa vanité
Froissée, avant le proche été,
De nuire aux jouisseurs de toutes ses largesses,
Dictées par la seule Sagesse,
Qui refusent, après, de retrouver rôle et rang
Dans l’Ordre dont il est garant :
« La foule se presse où l’on donne,
Mais où l’on a donné, l’on ne voit plus personne* »
* Antoine Houdart de La Motte, Apollon, Mercure & le berger (Fables nouvelles, II, 10)
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