Mosaïque de poésies prosaïques & de proses poétiques

parfois sous forme d'aphorismes, de chansons et surtout de fables…

lundi 9 novembre 2020

LA ROSE & L’AZURÉ

Petite fable affable d’après La Rose &  le papillon
d’A. Houdar de La Motte (Fables nouvelles,  II, 7)

Dame Nature se riait du Printemps
En offrant douceur sereine à tout instant.
Flore y dispensait ses faveurs odorantes,
Pomone et Cybèle promettaient cent rentes
Dans ce grand jardin où roseraie, éclose,
Donne à la fable qui suit ses faits et causes.

C’est là qu’un frais bouton de rose éclata ,
Prêt à s’ouvrir à tous desiderata
Des nues d’azur,  pétales serrées encore.
Au papillon aux ailes de ciel bordées
D’hermine que rien, jamais, n’édulcore, 
Brillantes comme des soleils en cordée,
Elle s’offrit. Sous l’adresse de ses caresses,
 L’ingénue, rosissant prou, s’épanouit ;
Ce premier venu procura l’allégresse
À Rosie et l’extase de celle qui jouit.

La rose en rougit car on est plus pudique
Que lubrique en son si bel et bon pays.
Puis le galant va courtiser, épisodiques
Passades, d'autres fleurs et ainsi trahit
L’aimée du matin. Changeant comme un caprice
Et léger ô combien, l’infidèle passa
Sa journée à batifoler sans avarice.
Au soir, il retourne à sa belle qui lui dit ça :
« Je t’ai vu butiner qui çi de nobles têtes,
Qui là de rustiques corolles, l’Ami.

- C’est que j’ai le goût sûr, étant un esthète.
Et je vous reviens. Flatteur, non, Ma Mie ?!

- Est-ce tout l’Amour que vous éprouvez, traître
          Goujat ?!

- Il vous sied d’user de ce maître-
Mot, Ma Rosie, car Mignonne dîtes-moi
De quelle abeille refusâtes-vous l’hommage ?
Ma frivole, quelle mouche, tout émoi,
Ne vous a-t-elle piquée ?… Est-ce dommage
Qu’une séductrice soit si gracieuse ?
Que non pas !… Allez, donnez-vous sans compter
Et point je ne viendrai vous en conter
Car c’est dans l’ordre des choses qu’un volage
S’éprenne d’une coquette et l’épouse en partage ! »












Illustration : Elisa Satgé, printemps 2020

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