Petite fable affable
Le peuple de l’herbe, en ayant assez
De la loi de la jungle,
Après avoir bien colloqué, potassé
Et s’être rongé jusqu’aux ongles,
S’est enfin doté de règles et lois
Pour qu’en bas règnent la concorde,
La justice et l’équité qui, ma foi,
Manquent trop, il faut bien qu’on me l’accorde,
À l’humaine espèce où les gens de bien
Ne sont autres que les seuls gens de biens.
On rédigea, en Dracon, en Solon,
Un code qui serait valable
Pour tous et chacun - tempête, aquilon,… -
Compilant, en somme fiable,
Les droits et devoirs réglant le gazon.
Les lézards firent la police,
Avec zèle et tout autant de raison ;
L’araignée la justice, à l’avenant,
Entoilant le moindre contrevenant.
Mais le peuple du sol et du ciel
Qu’il rampe, coure, saute ou vole
Remarqua, non sans humeur et fiel,
Que la justice ou l’équité convolent
Bien rarement avec droit et lois :
Osmie, fourmi, cloporte ou éristale
Étaient plus souvent hors-la-loi
Que lucane, hanneton, mante fatale,…
Alors on retourna à l’anarchie,
À la jungle, au Talion,… bref au gâchis.
Partout, pour les insignes, les petits,
Les sans-grade et bouseux de base,
La loi, quoi qu’on veuille et qu’on en ait dit,
Sont des mots gravés sur l’ardoise.
Elle est et reste, drame universel,
Non une inaccessible étoile
Mais, sans être sur la plaie pis que sel,
Comme l’arachnéenne toile :
Le bourdon s’y fraie un passage au jour
Quand la mouche s’y empêtre toujours !*
* D’après un proverbe russe que reprit H. De Balzac
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