Petite fable affable
Au pays du vieux dieu Triton, Requin
Tout à sa tyrannie, joue les despotes
Et il n’est habitant des eaux, du plus mesquin
À l’orque qui n’ait nageoire en compote.
À le savoir dans les parages nul péquin,
Même ce bretteur d’espadon et même
Ce marteau qui, en branque, rien n’aime :
C’est un maussade que rend triste la gaieté.
Seuls quelques dauphins continuent à s’agiter.
Esprit émoussé, langue affûtée, nagent
Ces rebelles se moquant sans partage
De la querelleuse complexion du fauve
Des eaux, comme de l’âme à la guimauve
De ses détracteurs cruels, veules s’il est là,
De ses prôneurs, de flagorneries jamais las,…
Nos dauphins avec la naïve insouciance
De la jeunesse, semblent tout aux jeux
Qu’ils entreprennent, tous pétris de confiance
Malgré l’aileron du monstre ombrageux
Qui sillonne tous les espaces où ils gîtent.
Une raie manta à les voir ainsi cogite :
« S’ils n’ont pas peur, c’est qu’il n’y a raison
Aucune de rester à la maison ! »
Le requin dévora cette imprudente
Qui ignorait donc, ironie mordante,
Que les dauphins étaient, eux, toujours aux aguets,
Se méfiant fort,… faisant leur mot des sarguets :
« Là où le Sage n’est que doutes, le Sot tranche
Et, hélas, très souvent, presque aussitôt, calanche ! »
Illustration : Elisa Satgé, été 2019
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