Petite fable affable
« On n’est jamais autant heureux qu’on croit
Ni, las, aussi malheureux qu’on le pense… »
Ainsi raisonnait au temps de nos rois
Un penseur* en charentaises qu’on encense.
Un gros chien s’était mis au hasard
Des rues. Il pleurait en vile vêture,
Tout ce qu’il avait perdu ce gueusard
À vivre sa vie de vaine aventure.
Lui, donc, que pauvreté avilit
Savait, jadis, pâtée, caresses et lit
Et n’a plus, hélas que faim, solitude,
Force coups,… pour nouvelles habitudes.
Il blâme les Cieux qui, à son sort,
L’ont abandonné comme un vil minable
Et, pire, loue toute heure le diable
Qui, pour lui éviter male mort,
Lui laisse tirer sa queue, aimable.
Le destin n’étant pas d’humeur ployable
Ses jours sont regrets, ses nuits remords ;
Il va plus maigrelet qu’un hareng saur.
Il croise l’obèse chat de l’abbesse
Qui, comme elle, au petit matin, confesse.
Mais pour viatique il a donné
À notre errant que nécessité presse :
Hier tu avais tout, être bien né,
Et t'as tout fuit par caprice sans cesse ;
« À qui possède la fortune innée
Est aisé de mépriser la richesse ! »
* François de La Rochefoucauld, Maximes (I, 49)
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