Petite fable affable
Dans la geste agreste de cette aire du monde
Comme dans celle moins policée encor’
Des cités, certes urbaines, où s’endorment nos corps,
On trouve souvent les mêmes histoires fécondes :
La peine pour les uns, aux autres le profit
- Quitte à faire entre gloire et trépas pirouettes -
Et pour qui ne veut la première mais souhaite
Le second : un mariage sans rififi !
Un pigeon, du genre chétive créature,
S’était naguère, en sa prime enfance, lié
D’amitié avec un moineau, pilier
De platane, un vrai débonnaire de nature.
Le premier aimait cette envie suscitée
Par la réussite quand, sans ambiguïté,
L’autre aimait simplement sa vie de roture.
À l’âge de l’envol, on quitte tout pour son destin
Vivre. On voyage ensemble mais chacun emporte
Son paquet, avalant des lieux qui apportent
Fortunes diverses, tourments plus que festins.
On se pose où on trouve couvert et vivre,
Avant que de, côte à côte, route poursuivre
Vivant chacun ses quelques bribes de destin
Un matin, ils trouvent, au même endroit, ce qu’ils cherchent :
Le piaf, ce nain, ce pygmée, tranquillité
Et le ramier une amie riche en liquidités.
C’était une commère de Cour mais ce faux-derche
Berce cette douairière, grasse d’atours
Et humide de plaisir, de cent flatteurs discours.
On voit donc là jusqu’où l’ambition se perche…
Car l’aimée, sèche d’esprit, aride de cœur
Était une dinde, une vraie, ce qui fait rire
Friquet : « Me farcir la dinde, pour un empire
Non merci. Sans façon. Je me voudrais vainqueur
Plutôt d’un limaçon ! Il faudrait, tête chaude,
Raison garder ! » Quand en calculs on baguenaude,
La Raison est laissée aux priseurs et aux chiqueurs !
L’oiseau des rues ajoute : « Grand bien te fasse
Et puisse le Ciel qui nous rassemble, Ami,
Nous voir encor’ réunis longtemps : épigamie
N’a jamais tué personne ! » Et le temps, lent, passe.
Rien de nouveau sous le soleil, Mon Vieux,
Ou tout du moins sous ce qui en tient lieu
Là, alors, entre joies et poix, angoisse et poisse.
Voulant la paix, le moineau aima ses grands bains
En flaques, ses bons vers dont il faisait des brindes.
Voulant qu’on l’admire, Biset aima sa dinde ;
Cherchant aventure elle choya Colombin
Qui, las, vécut la peur au ventre : si sa Belle
Défuncte avant lui, il perd pois et mirabelles
Ne valant pas mieux que piaf ou larbin :
C’est ainsi, quand les Moires vous font peu de grâces,
La Vie ne vous épargne rien,… sauf la disgrâce !
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