Édito' pour RuedesFables, 27 mai 2016
Autoproclamé « Chevalier de la Fable Ronde » (gaie et bruyante comme il se doit), je tiens parfois, non sans adresse j’espère (RuedesFables pour l’heure !), fable ouverte pour restaurer les gourmets qui goûtent encore aux mets des mots jadis aimés et les gourmands qui les mitonnent selon des recettes cent fois éprouvées et toujours renouvelées. On prétend souvent, qu’avec ces mots, je fais médisant. Peut-être… Mais de loin alors car il y a bien longtemps que je ne les ai plus !
Je vous convie donc, sans réserve ni réservation, fiels divers ou miel des thés, à une franche lippée avec un plat ineffable et surtout à comprendre comment on le compose à base d’un animal, aussi banal que normal, passé à fable à force d’être cuisiné, sévices sous couvert de service…
Voici, pour la première fois je crois, par le menu, conté le secret de la recette que s’arrachent meilleures fables et marmitons de bon ton aimant agapes et ventrées. De quoi faire belle et bonne chère, laquelle ne sera jamais triste eût-on lu tous les livres (donc de 500g au moins), lesquels permettent souvent d’avoir l’idée de départ : où l’ inspiration, un peu chienne, se niche-t-elle ?!
• Prenez un bon kilo de vers à soi de bonne taille et d’excellente facture car on ne regarde pas à la dépense quand il s’agit de n’épargner rien ni personne. Évitez les vers A, vers E et verbeux ; préférez-leur des vers à pieds (pieds comptés, c’est mieux, mais un autre fromage fait l’affaire !) : alexandrins à césure – césure trente – octosyllabes ou déca- du même tonneau, selon votre goût ou celui de ceux que vous n’avez pas su éviter et qui, donc, sont invités à partager ces vers de l’amitié.
• Parez-en une bête jouant tarte sur fable ; si possible animal connu pour être côtoyé de près ou dans un champ proche. On prise toujours plus les fables de jardin et de salon que celles faites d’un bois plus exotique ; on peut faire éventuellement des fables pour la Marine si on cuisine pour des amateurs de plateaux de fruits de mer ou des harengères galamment arrangées. Il existe des fables de matières (de bois, de pierre, de verre,…), mais elles sont souvent moins digestes et plus difficiles à composer… comme les salades qui, j’y songe, ne sont pas toutes des mensonges.
• Lardez de travers (de porc, c’est mieux), farcissez de tares à mi-sou ou fourrez à l’anecdote croustillante le gibier de bourbier ou de sorbier sélectionné que vous aurez pris soin de garder entier ; vous pouvez l’accompagner d’une ou deux pommes. Puis amenez-le, sur votre fable de cuisson favorite, à mariner dans une panade pas possible ou à bouillir de colère ou, mieux, faites-le marri (au bain du même nom, bien sûr) selon vos préférences ; les plaisirs de la fable sont aussi nombreux que notre espèce compte d’individus. Attention, cette étape ne doit pas durer trop longtemps ; la fable astronomique lasse autant que la fable à repasser ; donc ayez l’œil – et le bon ! – à votre préparation car la durée de cette étape varie selon la denrée et la jauge en est « le jugé ».
• Assaisonnez salement ou pimentez – avec aïes et ouilles ! – un peu le tout avant de le chemiser d’une fin édifiante cousue d’un fil aussi blanc que le poivre du même nom, apte à devenir sagesse populaire, car, tout nostalgique que l’on soit, on ne saurait faire fable rase du passé.
C’est fait, la fable est mise, cher gâte-sauce en herbes de Provence !… Nurse (pardon : Bonne à petits !) à tous car toute bonne fable qui se respecte régale la meilleure compagnie qui soit, sans plus d’aromates ni de condiments. Attention toutefois : ceux avec qui on partage, fussent des stances, à autant d’importance que ce que l’on goûte pourvu que la morale ne soit pas plus salée que la note. Cela permet de rester plus longtemps affable surtout si on a opté pour des fables gigognes où le tour de main vaut mieux que le tour de fable. Dans ce cas-là, à chevet la fable de nuit !
Pour vous servir ces quelques ficelles, maître-queux devenu maître coq, je me suis mis à fable. Cette leçon valait bien un hommage, non ?… Il ne me reste plus qu’à rendre mon fablier et à mettre, non les coudes, mais un point sur ma fable de cuisine pour l’achever. Vous, vous n’aurez plus qu’à faire ripaille de cette victuaille en repas, sans repos ni répit, jusqu’à en être repus. Mais faîtes bombance sans outrance et gare aux excès de fable chez ceux qui ont moins de tripes que d’estomac !
Fabuleusement vôtre…
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