Mosaïque de poésies prosaïques & de proses poétiques

parfois sous forme d'aphorismes, de chansons et surtout de fables…

dimanche 11 octobre 2020

DE CES VEILLÉES-LÀ

Cycle toulousain

Le soleil las, se parant de par les embarras,
Est parti nous faire sa nuit ailleurs. À l’heure
Où les repas quittent la table, on fait débarras
Des heures finies, on oublie qu'un ciel parfois pleure
Et on referme le gros chapitre des chagrins
Du jour pour prendre le frais au pas de nos portes.
Sur d’antiques chaises où la paille se taille un brin,
Exilées d’une cuisine désertée, la cohorte
Des voisins, à la belle saison, colloque dehors
Des travaux finis et des tâches à faire, du sort
Nôtre avec des rires gras et des voix encore fortes.

C’est la veillée d’été celle où on n’invite pas
Les saches de noix au coin du feu ni les tchapaires
De castagnas chauffées. On n’y trouve que tous les tcharaires,
Dans la marmaille et les veilhots embaumés, ou pas,
De fumée. Ce n’est pas là que les bachelettes badent
Les goujats et se trantolent pour leur attirer l’œil.
Non, on vit le temps présent non le passé en rade
Ni le demain en germe… Arrive si tôt le cercueil !
On ne fait qu’à goûter le soir de jours tant qui vous usent,
Se ronger les sangs se déranger l’esprit, Têtard,
Sur notre fin finale sera pour la froide saison qui ruse :
« L’hiver n’est pas bâtard, s’il ne se fait tôt il s’fait tard ! »

Mais, cal pas desconar, ça rembobine et raisonne
On se truffe d’un trait car, vrai, ça boulègue un peu
Avec le vin doux qui vous délie la langue qui fort résonne
Dans la nuit qui apaise la Vie, son râpeux et son pompeux.
Le gat et la mirgue se font vaillants alors qu’emménagent
Les tourtereaux, l’hiver tout branlant les ayant unis.
Mais c’était temps : ces deux-là, faisant jà bon ménage,
Ils avaient fêté Pâques avant les rameaux !… Alors punis !
On déparle aussi. Sur les si bonnes paroissiennes
- Les dérageantes, les arrangeantes… - et le ritou
Dont la bonne fait et, las, défait le lit itou,
Et qui nous gueita, là, derrière ses persiennes…

L’ancien, dont les yeux qui faisaient pimpanelle, lui
Consolait les veuves et les cocues. De fort coupables 
Occupations qui te l’ont fait partir au diaple,
- Aux colonies ! - tout à plein insufférables si luit
Lo solhel. Et oc, on estoquait souvent les brêles
Dans ces soirs-là et on estomaquait de rumeurs
De rudessos, paroles en l’air retombant en grêle,
Pour picanher ou espanter, mi-enjoueur mi-blâmeur :
« Qui n’veut peut vendre ne met pas en vitrine, pécore ! »
Disait-on en ce tribunal du villageois cheptel
Jusqu’à ce que les ruines qui nous dominent encore
Soient happées par l’ombre goulue. C’est celles du castel…

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