Petite fable affable
Devant son flacon de vin vidé, ce soudard
Avait le sommeil aussi profond que sonore.
C’est un termite s’en revenant, l’étendard
En berne, de guerre perdue qui là s’honore
D’exploits qui ne lui ont valu que des revers
De médaille la gloire étant une vraie garce !
Verre après verre, alors que menace l’hiver,
Il fourrage dans sa mémoire et ses comparses
D’un jour il abreuve de récits, prose et vers.
C’est un cloporte tavernier qui manège
Et ménage la clientèle en ce lieu.
De ce damoiseau sans dulcinée, avant neige,
Il escompte tirer le bien, le bilieux
Ayant fait bonne picorée après batailles.
Il le fait boire, le rend patraque à raquer
Car cette race de querelleur est de taille
À n’avoir jamais tant qu’elle joue du caquet
Le gargamel étanché comme la valetaille !
Alors notre roué gargotier fait tout
Pour que le soldat ait, certes, gaster et glotte
- Mais aussi vit - servis à l’envie car ces bantous
N’ont de limites qu’escarcelle qui ballotte
À leur ceinturon. Alors qu’importent ces maux
Contés en si belles et si vaines dithyrambes :
Le mastroquet est un serviable chameau
Qui ne sait que compter, faire des ronds de jambes,…
Son commerce est d’argent. Coûtent même ses mots.
Hélas, tout a une fin même en bonne auberge.
Un vieux grillon avec oignon et lorgnon,
Qui passe par là voit le soulaud qui gamberge
Son passé et l’autre qui se fait du pognon
Sans vergogne. Il fait alors à ce si triste sire :
« N’est-il pas temps, pour toi, de penser à demain ?
Si tu ne veux pas que la faim puisse t’occire
Ou, pis, n’avoir que pitance, en un tourne-main,
Réduite à la portion congrue, Messire,
Il faut que ce qu’il te reste en écus et sols
Te fasse un petit champ et une maisonnette
Afin que, cultivé, te nourrisse le sol
Et que s’assouvissent tes soifs de plus honnête
Façon, auprès de tendre femme et de vos enfants
À qui narrer ce qui te navre et te rend aigre,
Sans oublier, le travail pour tout olifant,
Ce bon dicton : “À discours nourris, vaches maigres !” »
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