Mosaïque de poésies prosaïques & de proses poétiques

parfois sous forme d'aphorismes, de chansons et surtout de fables…

vendredi 9 juillet 2021

LE PLUS SERPENT DES DEUX

Petite fable affable

Rampant et sifflant, en bonne intelligence,
Un serpent vivait avec l’humaine engeance ;
À sa vie, il apportait remède et bonheur.
Celle-ci, avant qu’il ne vînt, dans le malheur
De la famine végétait d’un an sur l’autre
Tant les rongeurs goûtaient le seigle et l’épeautre.

Mais son appétit féroce eut vite raison
Des voraces pullulant en toute saison.
Il avait été le compagnon d’Esculape
Et savait guérir autant que faire agapes.
Tout n’était qu’avoine et froment à foison,
Joie et paix, sauve santé et bonne entente.
Et ces dons, libres de tout acquittement,
N’exigeaient soumission ni jurement.

Survint, matin, un homme de foi, un fourbe
De mauvaise foi qui, moins terre que tourbe,
Mit dans la cervelle si creuse des hommes,
À la furetée, une histoire de pomme
À laquelle il ne croyait guère mais aimait
À faire croire, rappelant qu’il fit vœu, naguère,
De renoncer aux biens qu’il n’avait guère
Pour prêcher le salut par chemins et charmaies.

« Les serpents ne sont que morsure mortelle,
Ou, fieffés flatteur, piqûres cruelles !

- De Mercure, mes parents furent amis
Et donc au Panthéon des Cieux admis !

- Ah ! Il n’est qu’une puissance céleste
Et je la sers en traquant les terrestres pestes…
Tes dieux sont morts d’avoir été païens,
D’avoir corrompu d’honnêtes citoyens
Et leurs femmes allant nu-fesses, tête couverte,
Pour se livrer à d’obscènes découvertes !
Le mien, là, les habillera de fleurs
Et de leurs époux sera bienfaiteur
S’il soupent, comme moi, d’un verre d’eau claire
Et suivent ce qui leur est dit en chaire !

- Et surtout si, apprenant plus de Lui,
Ils en comprennent moins pourquoi Sol luit ?

- Impertinent ! » L’homme desserra un coup
Qui du reptile brisa tout net le cou.
On l’en blâma à ce que j’ai ouï dire.
Puis on oublia. Et advint le pire.

Là, où n’étaient que de bons grains, autrefois
On n’eut que glands, faines, noisettes et noix .
Même, aux jardins, les herbes devenaient folles
Sous l’égide rigide de l’homme à l’étole.
Puis, sans tant louvoyer, ce vil malengroin
Se proclama aussitôt bon pasteur des hommes ;
Clopant et persiflant, ce brave guillaume
Imposa dîme pour prix de ses bons soins.

Mais cela appartient à une autre histoire
Qui n’est pas de mon propos, cher auditoire,
La mort du serpent seule a quelque intérêt
Rappelant vérité trop peu révérée :
Qui entend faire ou, mieux encore, dire 
La justice ne rejette pas la faute ou le péché
Des pères sur les enfants ni, faisant pire,
Des frères sur les frères en ours mal léché.

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