Petite fable affable
Un savant s’était entiché d’une chatte,
Au poil angora, qui fuyait rat et rates,
Preuve d’une éducation irréprochable.
Froid et logique, loin des futilités,
Il la conviait sur son lit et sous sa table.
L’esprit, la main, le ton - tout d’aridité -
De ce vieil homme, pour sa douce et docile
Bête se faisaient amènes ; mieux : humains !
Cela étonnait fort, dans son domicile,
Où la bonne briquait en un tournemain.
Pour ne rien céler, point d’enfants ni de femme,
Hôtes de ses pires cauchemars, Mesdames !
La vieille servante s’appelait Ninon.
Ce n’était bien sûr pas son vrai prénom ;
« Ces êtres sans conscience et, pis, sans science,
Ont-ils besoin d’en avoir un ?! » disait-il.
Elle avait pour ce vieux bougon la patience
D’un ange : il n’en vit rien car fort peu subtil,
- « Les sens ne sont ni raisonnables ni sages ! » -
Donc sensations et sentiments au placard !
On ne change pas dans l’hiver de son âge,
Il ne vivait que par et pour son art,
Et sans goût pour le bagout comme de juste :
Qui devise divise, espère… ou s’incruste !
Le savant disait que l’aimaient les bêtes
Plus que les bipèdes lui faisant courbettes.
Sans mot, Ninon appâta la chatte au thon.
C’était, ma foi, une bien meilleure chère
Que caresses et restes du vieux croûton
Qui, quoiqu’étant titulaire d’une chaire,
Pour faire bonne mesure, était radin.
Elle voulait détromper qui, sur les choses
Et les gens, ne se trompait jamais - bredin ! -,
Plus chatouilleux sur le mot que sur la chose.
Certes, il y avait là plus jeu que malice ;
Pour ce faire, elle avait le temps pour complice.
Ainsi la chatte, peu à peu, s’attachait
À la vieille servante et se détachait
De la main du maître qui devint triste.
Soucis et troubles le rendaient tracassin,
À deux doigts de causer volapük, l’artiste !
Ces fauteuses de chienlit, ces agassins,
Vil quarteron de femelles en retraite,
- Vieux nostalgique, il prisait les mots gaulliens ! -
Parce que sa raison se trouvait distraite,
Furent chassées, sans remords, malgré leurs liens.
Sans un dernier regard. Ce fut sa vengeance :
Pas de dernier égard à l’ingrate engeance !
Sachant que l’on finit bien seul au linceul,
À l’âge, ou pas, où l’on dort grâce au tilleul,
Qu’elle porte des braies, se vête de jupes,
Elle se trouve malheureuse la dupe,
Qui confond soumission, intérêt du jour,
Avec l’amitié ou, pire, avec l’amour !
Preuve d’une éducation irréprochable.
Froid et logique, loin des futilités,
Il la conviait sur son lit et sous sa table.
L’esprit, la main, le ton - tout d’aridité -
De ce vieil homme, pour sa douce et docile
Bête se faisaient amènes ; mieux : humains !
Cela étonnait fort, dans son domicile,
Où la bonne briquait en un tournemain.
Pour ne rien céler, point d’enfants ni de femme,
Hôtes de ses pires cauchemars, Mesdames !
La vieille servante s’appelait Ninon.
Ce n’était bien sûr pas son vrai prénom ;
« Ces êtres sans conscience et, pis, sans science,
Ont-ils besoin d’en avoir un ?! » disait-il.
Elle avait pour ce vieux bougon la patience
D’un ange : il n’en vit rien car fort peu subtil,
- « Les sens ne sont ni raisonnables ni sages ! » -
Donc sensations et sentiments au placard !
On ne change pas dans l’hiver de son âge,
Il ne vivait que par et pour son art,
Et sans goût pour le bagout comme de juste :
Qui devise divise, espère… ou s’incruste !
Le savant disait que l’aimaient les bêtes
Plus que les bipèdes lui faisant courbettes.
Sans mot, Ninon appâta la chatte au thon.
C’était, ma foi, une bien meilleure chère
Que caresses et restes du vieux croûton
Qui, quoiqu’étant titulaire d’une chaire,
Pour faire bonne mesure, était radin.
Elle voulait détromper qui, sur les choses
Et les gens, ne se trompait jamais - bredin ! -,
Plus chatouilleux sur le mot que sur la chose.
Certes, il y avait là plus jeu que malice ;
Pour ce faire, elle avait le temps pour complice.
Ainsi la chatte, peu à peu, s’attachait
À la vieille servante et se détachait
De la main du maître qui devint triste.
Soucis et troubles le rendaient tracassin,
À deux doigts de causer volapük, l’artiste !
Ces fauteuses de chienlit, ces agassins,
Vil quarteron de femelles en retraite,
- Vieux nostalgique, il prisait les mots gaulliens ! -
Parce que sa raison se trouvait distraite,
Furent chassées, sans remords, malgré leurs liens.
Sans un dernier regard. Ce fut sa vengeance :
Pas de dernier égard à l’ingrate engeance !
Sachant que l’on finit bien seul au linceul,
À l’âge, ou pas, où l’on dort grâce au tilleul,
Qu’elle porte des braies, se vête de jupes,
Elle se trouve malheureuse la dupe,
Qui confond soumission, intérêt du jour,
Avec l’amitié ou, pire, avec l’amour !
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