Petite fable affable
Perché aux branches d’un chêne,
Un pinson, bien fort,
Trille, module et enchaîne
Si bien, sans renfort,
Que la forêt fait silence
Pour ouïr ces chants,
Tout de joie et d’excellence.
Hors quelques méchants,
Ici et là, on acclame
Un art consommé
Qu’à vrai dire blâment
Ceux, hier, aimés
Qui, méprisés, méprisables,
Se font méprisants.
Mais le plus inexcusable
Vient, c’est amusant,
De notre pinson lui-même.
Sa voix adulée
Lui fait accroire qu’on l’aime,
Fadaise éculée,
Pour lui seul qu’on ovationne.
Vice ou bien plaisir
Il veut qu’on se convulsionne
À tous ses désirs.
Puis il dit que son mérite
Vaut mieux que bravos.
L’or tente ce sybarite
Qu’ennuient ses dévôts.
Et vite il n’est plus que morgue,
Mais son chant, son chant,…
La forêt avait son orgue
D’aurore à couchant !
Alors qu’importent caprices,
Mots durs, bon vouloir,
Mauvaise humeur, becs qui crissent,…
Pourtant un beau soir,
Le pinson se rend chez l’Homme,
Qui, lui, a de l’or
Qu’il offre en très grosses sommes
À qui se fait fort
D’égayer des jours, plus tristes
Fumées que fumets.
Sous l’arbre où notre égoïste
Campe désormais,
Un quidam, au matin, passe
Qui l’entend chanter.
Il s’arrête et ne se lasse,
Tant semble enchantée,
Cette surprenante aubade.
L’homme, tout heureux,
Émiette un pain et le bade.
Mince, c’est un gueux
À qui il offrait bluette !
Vers la motte du château
S’envole donc notre bête.
Il n’était pas tôt.
Arrivé, le pinson chante
Pour le vavasseur
Attablé dessous sa tente.
Cet homme de cœur
Lui offrit de sa pitance.
Pas une once d’or.
L’oiseau vexé recommence.
Sur un geste alors,
Le seigneur fait mettre en cage
Notre impertinent.
Il en perdit son ramage,
Sa voix déclinant…
L’appétit… La vie au terme.
Adieu le Faraud !
Il a contemplé, sans perme,
L’or de ses barreaux,
Dans sa prison toute en ombres
Avant de partir
L’œil et la mine bien sombres.
Vouloir s’enrichir
Et finir comme un casuiste
Pauvre, délaissé,…
Des bois devenus bien tristes
Il s’était lassé ;
Eux seuls gardaient la mémoire
De son chant si beau
Qui faisait fuir la nuit noire,
Taire les corbeaux,…
Combien de gens jeunes, tendres,
Perdent leur âme et leur temps
- Voire plus, avant longtemps ! -
À vouloir à tout prix vendre
Leur(s) talent(s) à prix d’argent.
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