Petite fable affable
Il avançait le long du Nil, houe sur l’épaule,
Vers son champ de pruniers,
Carré irrigué, à deux pas des nécropoles.
Dansaient pagne et panier.
Il aimait ces arbres qui poussaient pour des prunes.
Un produisait autant
Que tous les autres ; à son ombre, fraîche et brune,
Il s’abritait du temps.
Aussi travaillait-il tous les autres aux branches,
En leur prodiguant soins
- Bêche, arrose, étête puis traite, élague, ébranche -
Bien plus que de besoin.
Délaissant donc celui qui était prolifique.
Il ne s’en offusquait :
Les pruniers sont, dit-on, arbres fort pacifiques.
Le soir, quand il vaquait,
Son maître le payait de mots. Parfois, hommage,
Il lui pissait au pied
Et, reconnaissance, c’est dans son large ombrage
Qu’il dormait ou pépiait.
Il faisait l’honneur à son tronc, dur comme chêne,
D’y enchaîner son chien,
Le plus précieux de ses biens même si la chaîne
Le blessait pis que liens.
Le temps passant, notre prunier prit de la branche,
Produisant un peu moins.
Ses bons voisins de champ tenaient là leur revanche.
Il croyait néanmoins
Au cœur de celui qu’il avait servi sans trêve.
Mais celui-ci quitta
Son ombre et la vie eut moins de sève. On l’achève.
Ses branches mises en tas
Firent, pour le village, du bois de chauffage.
Oublié qui il fut,
Son tronc fut réduit en planches de sarcophage,
Sans qu’on fît du raffut…
C’est ainsi que, souvent on traite qui travaille,
Ou trop vite, ou trop bien,
Et que l’on ménage ceux qui, vaille que vaille,
Lambinent, ô combien !
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