Petite fable affable
Un toutou quelque peu cabot
Se plaint du sort qu’on lui réserve :
« Pourquoi supporter au jabot
Ce collier qui sangle ma gorge ?
Pourquoi faut-il que je les serve
Pour avoir une pâtée d’orge
Mélangée d’abats avariés ?
Pourquoi faut-il que l’on m’enchaîne
À la souche d’un vieux poirier ?
Me voilà sonnette et cerbère,
Jusqu’à une sortie prochaine
Mais sans espoir qu’on me libère.
Pure race, je dois mendier
Leur affection et ma pitance.
À servir je dois me dédier :
Berger ou chasseur en campagne,
Tout en constance, en assistance ;
Gardien en ville, où c’est le bagne !
Est-il quelque lieu où le chien
N’a pas à rendre de service
Pour être nourri mieux que bien
Et apprécié pour ce qu’il est ?! »
Un chat siamois, tout en vice,
Entend ce qu’il articulait.
« Il y a, dit-il, à se plaindre
D’être aussi maltraité que toi
Et, comme tu le fais, de geindre.
Dans mon pays, là-bas, au loin,
Tous les chiens ont le même toit
Que leurs maîtres, bercés de soins.
Ceux-ci grassement les nourrissent
Sans jamais rien leur demander
Et cèdent même à leurs caprices :
Nul chien ne chasse ni n’aboie
Chez moi et nul n’a à garder
Ni bête, ni homme, ni bois ! »
Et sur la foi de ces paroles,
Le chien se voit déjà servi,
Sans avoir à tenir de rôle.
Donc il s’enfuit sans que personne
Rien n’en sache, hors le chat ravi.
Il part sur la côte bretonne
Et s’embarque pour ces pays
Qu’on lui a dit paradisiaques
Où il vécut comme on lui dit,
Grossissant comme oison s’emplume.
Enfin, il fut bien servi quoique…
Avec du riz et des légumes !
Les demi-vérités nuisent toujours bien moins
Que les desseins de qui nous les sert. Et de loin !
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