Petite fable affable
Parce que la masse est une nasse,
Malgré les coups, les menaces,
Quoi qu’on le dise plus sombre qu’il n’était,
Un mouton se refusait à vivre
D’une autre façon qu’en bête libre,
Aux matins d’hiver tout comme aux soirs d’été.
Son berger voulait qu’il s’alimente
D’herbe fleurant la sauge et la menthe,
Broutée en heures et quantités décrétées
Avec, en sus, des rations normales
De foin et de farine animale.
« Pour ta santé, siouplet… ’Faut pas rouspéter ! »
Lui, il préférait les herbes folles
Au milieu desquelles on batifole,
Les buissons en Colisée qu’on peut fêter
Et le pampre voluté des vignes
Plutôt que tout ce qu’on lui assigne,
Qu’il n’a pas plus demandé que souhaité.
Son gardien le mène, peu amène,
Par les prés, les clos de son domaine ;
Étable l’hiver puis estives l’été ;
Ras sur les côtés, il le fait tondre
Pour qu’au troupeau il puisse se fondre.
« Oc, on te rendra docile, l’Entêté ! »
Mais au grand dam de ce pauvre pâtre,
Lui préférait gambader, folâtre,
Là où son humeur ou son goût l’arrêtait,
Sans plus écouter les cris, les ordres,
Ni craindre le chien prêt à le mordre,
Puisant quelque ébriété dans sa gaieté.
Il lui fallut donner aux mois tendres
- Ordre du majoral ! - sans attendre,
À quelque brebis semence à satiété.
Ça la défrisait la bête à laine :
« Ne puis-je aimer à perdre l’haleine
Sans rien devoir encore à la société ?! »
Comme ses pairs et mère, l’instable
Animal finit ovin de table
Et, de son maître, ne fut pas regretté.
Puisque l’abattoir nous guette, grave
En toi qu’il faut jouir sans entrave ;
C’est déjà la mort que la sobriété !
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