Petite fable affable d'après un travail de David Sanjaume
Un corbeau bien mal-allant
Allait, les ailes en ballant,
L’âme en pleurs, le cœur en peine
Par les clos et par les prés
En triste et terne livrée.
Il pleurait sur sa déveine.
Un vieux taureau noir le voit.
Et d’un rire dans la voix,
Bref vachard, il l’interpelle :
« Pourquoi bel oiseau en frac
Pleures-tu donc tout à trac ?
L’amour ou la mort t’appelle ? »
Notre endeuillé lui répond,
Comme on tance un fripon,
Que personne ici ne l’aime
Car il ouvre trop son bec
Et qu’il répond toujours sec.
« Voilà, là tout mon problème !
- Quand on est grand et très fort
La vie est d’un grand confort :
Et nul n’ose en mon empire
Troubler ma vie et ma paix,
Ou me parler quand je pais,…
Un petit n’a rien à dire !
Et mieux quand on est monté
Comme moi, jeune effronté,
Et père de qui habite,
Veau ou velle, en la prairie,
Personne, de toi, ne rit.
Alors quitte mon orbite !
- Tu parles d’or, l’alourdi.
Mais tel qui rit samedi,
Dimanche fondra en larmes :
Tu es gras et gros, fort couillu
Mais très cornu… donc cocu !
Alors cesse ton vacarme ! »
Le taureau veut encorner
L’oiseau qui l’a écorné
Et qui depuis, peau de vache,
Narre à tous vents, incessant,
Humour et ton coassants,
Ce que le taureau remâche.
Si tu ne veux pas qu’on t’importune
Tais ta fortune : on aura tôt fait
D’y déceler quelque forfait,
Ou pire, quelque occulte infortune !
Illustration : David Sanjaume, 21 juin 2011
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